L’euphorie suscitée par la lettre de félicitations adressée par Donald Trump au chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, à l’occasion du 63e anniversaire de l’indépendance, aura été de courte durée.
Moins de 24 heures après ce message saluant le « partenariat durable » entre Alger et Washington, la Maison-Blanche a adressé une notification d’un tout autre ton : l’instauration de nouveaux droits de douane sur les importations en provenance de six pays, dont l’Algérie. Cette décision unilatérale qui sonne comme une punition vient au moment où Trump recevait cinq chefs d’Etat africains, dont celui de la Mauritanie.
Dans une décision aussi soudaine que révélatrice de la logique transactionnelle qui caractérise sa gouvernance, Donald Trump a annoncé qu’à compter du 1er août 2025, l’ensemble des produits algériens entrant sur le marché américain seront soumis à un tarif douanier de 30 %. L’Irak et la Libye sont également concernés par cette mesure, tandis que Brunei, la Moldavie et les Philippines se verront appliquer des droits de 25 %. Renforcement du partenariat militaire et importation de vaches américaines n’ont pas suffi au régime algérien à plaire à Donald Trump !
Dans sa correspondance aux gouvernements concernés, Trump justifie cette orientation protectionniste par la nécessité de « corriger un déséquilibre commercial persistant », tout en qualifiant les politiques commerciales des pays visés de « non équitables ». Il précise toutefois que les entreprises choisissant de produire directement aux États-Unis seront exemptées de ces hausses tarifaires.
Un double langage diplomatique
Pour Alger, le contraste entre le ton conciliant de la lettre de vœux et la brutalité de la mesure annoncée est saisissant. Ce revirement laisse un goût amer. Les propos élogieux de Trump sur la coopération sécuritaire et économique entre les deux pays, suivis d’une décision visant frontalement les exportations algériennes, illustrent un certain cynisme diplomatique. Derrière les formules de courtoisie, c’est une logique de rapport de force qui prévaut.
Un protectionnisme dans la continuité
Sur le plan strictement économique, l’impact immédiat pourrait rester limité, les exportations algériennes vers les États-Unis demeurant marginales. Mais cette décision s’inscrit dans la continuité de la politique économique de Donald Trump, qui, dès les premiers mois de son second mandat, renoue avec les principes de l’ »America First ». Fidèle à sa rhétorique nationaliste et protectionniste, il n’hésite pas à froisser des partenaires considérés comme stratégiques.
Dans sa lettre, le président américain affirme vouloir corriger un « déséquilibre commercial persistant », tout en appelant à « renforcer la relation économique bilatérale » selon des règles qu’il définit lui-même.
Un avertissement voilé
Au-delà du cas algérien, cette décision s’inscrit dans une volonté plus large de Donald Trump de redéfinir les termes du commerce international selon les intérêts des États-Unis. Le message est clair : la coopération n’aura lieu que si elle s’accompagne d’un rééquilibrage immédiat, mesurable et unilatéralement dicté par Washington.
Pour Alger, cette annonce fait figure d’avertissement : les déclarations d’amitié n’excluent pas les mesures contraignantes, et les promesses de partenariat restent soumises à des logiques de rentabilité politique et économique, dans lesquelles la symbolique ou la fidélité diplomatique pèsent peu face aux impératifs stratégiques américains.
Reste à savoir si cette mesure restera isolée ou si elle inaugure une inflexion plus profonde des relations commerciales entre les deux pays. Une chose est certaine : le ton est donné.
Sofiane Ayache