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Tunisie : l’arrestation de Néjib Chebbi ravive l’unité l’opposition

Manifestation en Tunisie

Manifestation en Tunisie pour dénoncer les arrestations et l'arbitraire. Crédit photo : DR

La scène politique tunisienne est plongée dans l’expectative mêlée de colère contenue après l’arrestation du leader de la Front de salut national, Ahmed Néjib Chebbi, en exécution d’un jugement de 12 ans de prison dans l’affaire dite du « complot ».

Une décision qui a déclenché une vague de solidarité et de colère dans les milieux politiques, syndicaux et associatifs, poussant plusieurs composantes de l’opposition à appeler à une grande marche nationale, samedi 6 décembre, sous le slogan « L’opposition n’est pas un crime ».

Une spirale d’arrestations qui inquiète

L’affaire du « complot » englobe 37 personnalités politiques et civiles, dont la militante des droits humains Chaïma Issa et l’avocat Ayachi Hammami, tous deux interpellés ces derniers jours après des condamnations devenues définitives. Pour les forces d’opposition, ces arrestations successives marquent une dérive autoritaire qui place la Tunisie dans un climat de « répression systématique ».

Les organisateurs de la marche dénoncent un « récit de la conspiration » devenu un outil central de domination permettant au pouvoir d’écarter les opposants, dans un contexte d’asphyxie économique, sociale et environnementale.

La famille Chebbi monte au créneau

Lors d’une conférence de presse organisée par le Parti républicain, l’un des initiateurs de la manifestation, plusieurs responsables ont estimé que l’arrestation de Néjib Chebbi renvoie la Tunisie à ses heures les plus sombres. Pour eux, seule une mobilisation démocratique et pacifique peut constituer une réponse crédible à ce qu’ils qualifient d’« État de répression ».

Son avocate et fille, Haïfa Chebbi, affirme qu’aucune garantie judiciaire n’existe dans cette affaire : « Le message de mon père est clair : la liberté pour tous les détenus politiques passe par l’unité de l’opposition. » Elle estime que la justice, « soumise aux instructions », n’est plus en mesure d’assurer un procès équitable.

Son fils, Louay Chebbi, regrette quant à lui l’absence de plusieurs médias lors de la conférence, rappelant que son père « a toujours cherché à rassembler et non à diviser ».

Condamnations en cascade et soutien international

Plusieurs partis et organisations tunisiennes et internationales appellent à la réouverture du dossier du « complot », qualifié de procès politique. La Ligue tunisienne des droits de l’homme, à son tour visée par des restrictions, met en garde contre une détérioration profonde des libertés.

À l’étranger, l’ancien chef du gouvernement marocain et secrétaire général du PJD, Abdelilah Benkirane, a exprimé sa solidarité avec Néjib Chebbi et réclamé la libération immédiate de toutes les personnalités condamnées dans cette affaire.

Une rue à l’épreuve

La marche prévue samedi s’annonce comme un test majeur pour l’opposition, qui cherche à affirmer sa cohésion face à un pouvoir accusé d’étouffer toute expression dissidente. Elle devrait également mesurer la capacité du street tunisien à renouer avec la mobilisation dans un contexte économique particulièrement difficile.

Dans une Tunisie traversée par l’incertitude politique et la fracture sociale, la contestation autour de l’arrestation de Néjib Chebbi pourrait bien ouvrir une nouvelle séquence où les libertés publiques et l’équilibre institutionnel se retrouvent au cœur du débat national.

Mourad Benyahia 

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