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Tunisie : le président Kaïs Saïed vire le Premier ministre et suspend les travaux du Parlement

URGENT

Tunisie : le président Kaïs Saïed vire le Premier ministre et suspend les travaux du Parlement

Le président tunisien Kaïs Saïed a annoncé dimanche soir qu’il suspendait les travaux du Parlement et démettait de ses fonctions le chef du gouvernement Hichem Mechichi, après une journée de manifestations contre les dirigeants tunisiens.

Les islamistes out ? Des klaxons dans les rues et des Tunisiens qui sortent en plein couvre-feu pour célébrer ou questionner ce qu’il s’est passé dans la soirée de dimanche soir. Après une série de manifestations apolitiques à travers tout le pays, le président a réuni en urgence les représentants du pouvoir miliaire et des forces de police.

Le président de la République a déclaré qu’il limogeait Hichem Mechichi, le chef du gouvernement, et qu’il allait nommer un successeur pour qu’il nomme une nouvelle équipe ministérielle dans les jours à venir. « Nous allons annoncer d’autres mesures pour sauver la Tunisie. Le peuple tunisien doit continuer sa révolution en toute légitimité et nous appliquerons la loi », a-t-il déclaré à l’issue d’une réunion d’urgence au palais de Carthage avec des responsables des forces de sécurité.

« Nous traversons des moments très délicats dans l’histoire de la Tunisie », a ajouté le chef de l’État.

« Ce n’est ni une suspension de la Constitution ni une sortie de la légitimité constitutionnelle, nous travaillons dans le cadre de la loi », a-t-il assuré en prenant appui sur l’article 80 de la Constitution qui lui permet de prendre des mesures exceptionnelles en cas de danger imminent pour le pays. Mais le texte n’est pas clair sur ces mesures, et rien n’est dit sur le limogeage du chef du gouvernement, la levée de l’immunité des députés, ou encore le gel du travail du Parlement pour un mois, comme l’a déclaré Kaïs Saïed dans un communiqué sur Facebook.

Ennahdha dénonce un « coup d’État »

Selon le texte, le président doit aussi en référer à la Cour constitutionnelle qui n’existe pas pour le moment en Tunisie. Le parti islamiste Ennahdha dénonce un « coup d’Etat ».

Seul pays depuis 10 ans à avoir poursuivi sa démocratisation à la suite du Printemps dit arabe, la Tunisie a vécu, depuis que le dictateur  Zine el Abidine Ben Ali a été chassé du pouvoir après un soulèvement qui a donné le coup d’envoi aux révoltes dans de nombreux pays arabes, plusieurs périodes qui éclairent la situation telle qu’elle est aujourd’hui.

14 janvier 2011 : la « Révolution du jasmin »

Ce jour-là, Zine el Abidine Ben Ali fuit pour l’Arabie saoudite après 23 ans de règne sans partage, à l’issue d’une révolte populaire réprimée dans le sang, devenant le premier dirigeant arabe à quitter le pouvoir sous la pression de la rue. La contestation avait été déclenchée par l’immolation par le feu en décembre d’un jeune vendeur ambulant Mohamed Bouazizi, de Sidi Bouzid (centre-ouest), excédé par la pauvreté et les humiliations policières. Le président déchu, qui a été condamné par contumace de nombreuses fois pour homicide, torture et corruption, est décédé à 83 ans en 2019 en exil en Arabie saoudite.

23 octobre 2011 : victoire d’Ennahdha

Le mouvement islamiste Ennahdha, légalisé en mars, remporte 89 des 217 sièges de l’Assemblée constituante lors des premières élections libres de l’histoire du pays. En décembre, Moncef Marzouki, militant de gauche, est élu chef de l’Etat par l’Assemblée constituante. Hamadi Jebali, numéro deux d’Ennahdha, forme le gouvernement.

Avril 2012 : les premiers espoirs déçus

Des affrontements éclatent dans le bassin minier du Sud-Ouest entre chômeurs et policiers. En juin puis en août, des manifestations violentes et des attaques de groupuscules islamistes radicaux se multiplient. Des émeutes éclatent fin novembre à Siliana, ville déshéritée au sud-ouest de Tunis: 300 blessés en cinq jours. Grèves et manifestations, parfois violentes, touchent l’industrie, les services publics, les transports et le commerce. Comme en 2011, c’est dans les régions marginalisées économiquement que se cristallisent les tensions.

Le 6 février et 25 juillet 2013 : les assassinats d’opposants

L’opposant anti-islamiste Chokri Belaïd est tué à Tunis le 6 février 2013. Le 25 juillet, c’est au tour du député de gauche Mohamed Brahmi d’être assassiné. Les deux meurtres seront revendiqués par des jihadistes ralliés au groupe Etat islamique (EI).

Dates importantes de la transition démocratique

Le 26 janvier 2014, une Constitution est adoptée, un gouvernement de technocrates formé et les islamistes se retirent du pouvoir.

Le 26 octobre, le parti anti-islamiste Nidaa Tounes de Béji Caïd Essebsi, qui regroupe aussi bien des figures de gauche et de centre-droite que des proches du régime de Ben Ali, gagne les législatives, devançant Ennahdha.

En décembre, Béji Caïd Essebsi devient le premier chef de l’Etat élu démocratiquement de l’histoire du pays.

2015, 2016 : la succession d’attentats 

La Tunisie est frappée en 2015 par trois attentats revendiqués par l’EI, implanté en Libye voisine. Ils font 72 morts, des touristes étrangers et des membres des forces de l’ordre, au musée du Bardo à Tunis, dans un hôtel de Sousse (centre-est) et un bus de la garde présidentielle à Tunis.

En mars 2016, des dizaines de jihadistes attaquent des installations sécuritaires à Ben Guerdane (sud), tuant 13 membres des forces de l’ordre et sept civils.

La situation sécuritaire s’est depuis nettement améliorée, mais des attaques continuent à endeuiller ponctuellement le pays.

Depuis 2016, les troubles sociaux

Début 2016, une vague de contestation débute à Kasserine (centre) après le décès d’un jeune chômeur, électrocuté alors qu’il protestait contre son retrait d’une liste d’embauche. La colère se propage dans de nombreuses régions.

Début 2018, le pays est touché par un mouvement de contestation exacerbé par l’entrée en vigueur d’un budget d’austérité.

Le Sud tunisien, marginalisé, a été depuis en proie à des heurts entre forces de l’ordre et manifestants.

 Depuis octobre 2019, les scrutins et l’instabilité politique

Le 6 octobre 2019, Ennahdha redevient le premier groupe à l’Assemblée, lors des troisièmes législatives depuis la révolution, mais avec seulement un quart des sièges. Le 13 octobre, un universitaire à la retraite quasi inconnu sur la scène politique, Kais Saied, est élu président.

Le 1er septembre 2020, les députés approuvent un gouvernement de technocrates, écartant la possibilité d’une dissolution sans pour autant mettre fin aux tensions politiques.

Fin décembre, le président Saied se dit favorable à un « dialogue national », proposé par la centrale syndicale UGTT « pour trouver des solutions aux problèmes politiques, économiques et sociaux » du pays.

Auteur
Avec RFI/AFP

 




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