En Ukraine, après des mois de lutte acharnée, la ville d’Avdïivka est tombée aux mains des Russes, la première victoire de taille depuis la prise de Bakhmout en mai 2023, et une victoire qui intervient presque deux ans après le début de l’invasion à grande échelle du pays par la Russie.
Symboliquement, c’est une victoire importante pour les Russes, stratégiquement, c’est un revers pour l’armée ukrainienne.
La force de frappe russe sur d’autres villes proches va gagner en puissance, puisque c’est une avancée sur le terrain. Des villes comme Pokrovsk, Kostantinivka, et plus loin Kramatorsk, sont désormais encore plus exposées. Kramatorsk et Sloviansk qui ont d’ailleurs été bombardées lourdement samedi soir. Avdïivka était déjà passée aux mains des Russes en 2014 puis elle était devenue, notamment sa zone industrielle, une fortification réputée imprenable et c’est à l’usure et en raison d’une supériorité numérique écrasante que la ville est tombée aux mains des Russes.
Cette bataille montre l’importance du soutien occidental pour que l’Ukraine puisse faire face à l’agression russe – le général Tarnavskiy qui commande les opérations dans l’est du pays a parlé de combats à 10 contre 1 au niveau de l’artillerie, de troupes russes en surnombre jetées contre l’armée ukrainienne sans relâche, y compris les réserves. La situation était tout simplement intenable pour les soldats ukrainiens qui se trouvaient sous le feu russe.
La bataille d’Avdïivka est la première grande décision pour le général Syrsky, nouveau commandant en chef des armées. À l’époque de Bakhmout, c’est lui qui y avait décidé d’y maintenir les troupes ukrainiennes pendant des mois, ce qui lui avait valu le surnom de « boucher », c’est dire s’il n’est pas entré en poste avec la popularité de son prédécesseur le général Zaloujny. Or l’état d’esprit au sein de l’armée et de la population n’est plus le même qu’au début 2023, on en est à près de deux ans de guerre, avec une contre-offensive qui n’a pas eu les résultats escomptés, et des milliers de morts et de blessés alors que les soldats qui se battent depuis deux ans sont épuisés. Et dans tous les discours officiels, on affirme que la plus grande priorité est de préserver leur vie – c’est cet argument notamment qui a été utilisé par Syrsky pour justifier ce retrait.
Loin de cette ligne de front, le président Zelensky, lui, fait tout pour développer des accords bilatéraux avec ses partenaires, alors qu’on est toujours dans l’incertitude quant au futur de l’aide des États-Unis.
Au même moment, on voit que Volodymyr Zelensky signe des accords bilatéraux, similaires à celui signé avec le Royaume-Uni en janvier : lors de sa visite à Berlin, c’est avec l’Allemagne qu’un accord de sécurité a été signé, sur dix ans et avec une promesse d’aide de 7 milliards d’euros pour 2024 à la clé, mais toujours pas de livraison de missiles longue-portée Taurus. Un accord semblable a été signé également avec la France, qui promet 3 milliards d’euros cette année à l’Ukraine. Ces traités bilatéraux sont mis en place alors qu’il y a toujours une grande incertitude quant au futur de l’aide américaine, bloquée par le Congrès.
Sur le terrain, comme on l’a vu à Avdïivka, l’Ukraine n’a tout simplement pas le temps d’attendre que cette aide se débloque et Kiev se tourne donc vers des accords bilatéraux en plus des garanties d’aides fournies par son partenaire européen.
Avec RFI