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Ventre affamé n’a point besoin de papier monnaie !

Tebboune

Dans leur conquête du pouvoir politique, les dirigeants se sont la plupart du temps efforcés à recueillir l’adhésion des masses populaires pour justifier voire légitimer la place qu’ils occupent.

Ils ont très vite compris que le pouvoir politique ne signifiait rien sans le pouvoir financier et ce n’est que par la conquête de ce dernier qu’ils ont pu asseoir leur autorité sur une longue période. Le droit de « battre monnaie » est un attribut de souveraineté qui remonte à la création des Etats.

Le système de financement de l’économie et des ménages apparaît essentiellement basé en premier lieu sur le principe de la centralisation des ressources et leur affectation en fonction d’objectifs politiques décidés centralement. 

L’idée finalement admise voulait que les hydrocarbures devaient assurer les ressources financières et ensuite de les mettre à la disposition de l’Etat qui se chargera ensuite de les répartir entre les différents secteurs économiques pour être finalement utilisés par les entreprises et les administrations.

L’équilibre socio-économique a pu être préservé parce que les problèmes financiers étaient résolus soit par la nationalisation des hydrocarbures, soit par la hausse des prix des hydrocarbures sur le marché mondial. 

Si la nationalisation des hydrocarbures est une décision salutaire de l’armée, la responsabilité de l’utilisation de ces ressources à des fins stratégiques incombait à l’élite intellectuelle qui en avait la charge. 

Malheureusement, elle n’a pas été à la hauteur de la confiance placée en elles. Elle ne veut pas le reconnaître. Elle va jusqu’à susciter une « ébauche de dénationalisation » sous le crédo d’ouverture du marché aux multinationales afin d’augmenter les recettes en devises pour maintenir le niveau de dépenses incompressibles à la pérennité du système. 

Le pays vit au jour le jour. Nous sommes sans planification stratégique depuis la fin des années 70 livrant toute une nation aux multinationales à l’amont et à l’aval la mettant à l’abri des excès du système mondial dominant. Pourtant, ni les instituts, ni les hommes, ni l’argent n’ont manqué. C’est pour dire que le pétrole a également « pollué » nos esprits, nos corps et nos institutions. Il a créé le droit à la paresse des ouvriers, au déracinement des paysans, à la médiocrité des gestionnaires, à la faillite des entreprises publiques et au gain facile des entreprises privées.  

L’Etat apparaît dans ces conditions comme le seul instrument de gestion et se substituant aux individus et au groupe, leur impose sa propre conception des choses par les décisions qu’il prend à leur place.

L’organisation sociale étant ainsi faite favorise la dynamique d’un processus de transfert des pouvoirs de la base et de leur centralisation au sein des appareils de l’Etat. N’ayant pas d’autres moyens d’intervention que par la transmission d’ordres formels, l’Etat multiplie les lois, les décrets, les circulaires et les organes de contrôle créant de toute pièce un système tentaculaire administratif : la bureaucratie étouffant toute initiative de production ou d’investissement. 

Aujourd’hui, l’Etat providence vit une crise financière doublée d’une crise de légitimité. L’option libérale n’a réussi à se développer et à exercer une certaine force de séduction intellectuelle que parce qu’il n’y a aucune alternative crédible aux forces traditionnelles de l’Etat providence. 

La vraie question concerne le rôle de l’Etat en Algérie. Comment peut-il générer le développement d’en haut ? Comment peut-on privilégier l’Etat sans être victime de son pouvoir et de sa bureaucratie ? 

Dr A. Boumezrag

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