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Visas pour la Turquie : la régence d’Alger et les pirates de l’histoire

TRIBUNE

Visas pour la Turquie : la régence d’Alger et les pirates de l’histoire

La nouvelle de la visite spéciale du Ministre des Affaires étrangères turc à Alger, il y a quelques jours, me fit replonger dans un passé dont je croyais, bonnement, avoir tourné les pages fragiles du livre tombeau renfermant dans sa crypte l’histoire de l’Algérie toujours prise en otage.

Tout allait relativement bien pour moi, dans le meilleur des mondes si ce n’était l’incertitude qui minait mon quotidien à la vue du Hirak qui n’arrive toujours pas à cristalliser l’espérance populaire dans mon pays, encore une énigme de plus dont je serais obligé de faire avec pour me déconstruire à défaut de jeunesse à construire.

La visite impromptue de l’émissaire turc, elle, était relative à une histoire de visas instaurés pour les Algériens selon leur tranche d’âge, il était question des modalités d’octroi du blanc-seing pour pousser la Sublime porte qui ne l‘est plus aujourd’hui à s’ouvrir à nous.

C’est juste une grille rongée par la rouille qui espère ardemment être européenne pour pouvoir se faire badigeonner au couleur de la normalité mondiale, ainsi, les efforts de désorientalisation de Mustapha Kemal n’auront pas étaient vains. Décidément, chassez le naturel, il sera porté par les flots du Bosphore.

C’est un portail de plus qui se referme au visage de nos compatriotes en mal de représentation performante, c’est vraisemblablement un détail pour nous, aberrant soit-il, une histoire de plus en l’Algérie dont tout le monde semble s’en accommoder sans faire trop de vague pour mieux « naviguer sa vie ».

Pourquoi n’en ferais-je pas autant moi qui était un piètre moussaillon hier, en vérité, pour ceux que ça intéresse, je suis un pied plat point marin, je préfère garder mes guibolles sur le sable réconfortant avec une bonne bouillabaisse quitte à me risquer dans un « œdème de quinck ».

Somme toute, je ne suis pas un «super » algérien ermite seul en alerte sur la tour d’une fortification sur l’îlot de Penon reconquise à surveiller de la moindre incartade diplomatique et réagir au quart de tour tel un vieux moteur diesel. 

Franchement, vous m’imaginez, moi, le petit banlieusard « écrivassier » dans son champ Lemonnier pas loin du rivage de la Madrague faire de la résistance aux Turcs, c’est un tant soit peu saugrenu et tiré des serpents dans la chevelure de la Gorgone.

Cela dit pour rester dans les turqueries, Je me souviens qu’étant écolier, les frères Barberousse étaient, entre autres, les héros qui ont sauvé mon pays des hordes d’envahisseurs étrangers avides de richesses et de je ne sais quoi encore, allez savoir.

C’était conceptuel pour moi, des guerriers téméraires qui étaient prêt à donner leurs vies pour une cause qui était notre défense, toute mon enfance « historique » se construisit sur ce modèle de courage et d’abnégation.

C’était des informations bien casés dans mon crâne, la fierté de dire que notre pays avait tenu tête à une armada et qui faisait trembler les eaux calmes de la méditerranée que j’aime plus que tout.

C’est bien plus tard que je compris la supercherie, mes références héroïques étaient finalement fondées sur des pirates, des corsaires si vous préférez, à la solde d’une oligarchie bien implantée   à Alger, toujours les mêmes, l’auberge étant loin de la cote, c’est à croire que nous ne sommes pas sortis de la « taverne » même aujourd’hui .

Personne ne se souciait du pays où des Algériens qui ne l’étaient pas encore, seul le gain était le dénominateur commun dans les conflits qui se succédèrent par la suite.

Je ne voudrais pas faire un cours d’histoire ni m’étendre sur le sujet, mais il n’en demeure pas moins que lors du début des années quatre-vingt-dix, les Algériens étaient accueillis les bras ouverts en Turquie qui traversait une crise économique sans précédent.

Rappelez-vous de cette époque où une tasse de bon café à Istanbul coûtait un million de livre turque, c’était le résultat d’une politique économique désastreuse et d’une inflation galopante.

Il n’était nullement question de tourisme pour les Algériens à l’époque, c’était l’époque du trabendo qui sonnait les prémisses de l’affairisme en Algérie, du cabas au conteneur, du conteneur à l’usine, et de l’usine au jet privé sans transition aucune.

Certes c’était un fléau post-octobre 1988 qui a pu, bon an mal an, sortir de la misère un grand nombre de familles algériennes et de familles turques en même temps, c’était du «gagnant gagnant» à vrai dire, tout le monde y trouvait son compte.

Depuis de l’eau a coulé sous les ponts du Bosphore et dans les ingénieuses foggaras d’Algérie, la Turquie s’est développée à une allure vertigineuse, elle devient aujourd’hui un pôle d’attraction mondial et se targue d’avoir le plus grand a aéroport de la région Europe et des milliers de centres touristiques pour une clientèle désormais conquise.

L’Algérie c’est elle aussi développée mais pas à la hauteur du trésor qu’elle détenait, nous aurions pu être l’un des phares qui éclaire ce monde, nous aurions pu si ce n’était ces maudits bandits de bas étage qui réussirent le casse du siècle.

Une bande de voleurs dont le parrain impotent reste toujours à l’abri sans être inquiété, finalement Bouteflika disait vrai, il nous a laissé à notre médiocrité, mais nous ne savions pas qu’elle serait taillée selon la sienne.

Mais comme le dit l’adage algérien, il y a du bon dans le mal, quand nous laverons notre linge sale en famille et l’Algérie se relèvera c’est ainsi, nos martyrs justifient à eux seuls notre divine protection.

Les Turcs semblent avoir oublié le passé et se mettent à restreindre l’accès à leur pays, un pays où il y a quelques années seulement, le président Erdogan s’adressait à son peuple à partir d’une cabine d’essayage d’un grand magasin tremblant comme une feuille d’automne.

Mais bon, ce n’est pas aussi grave que cela puisse paraître venant des Turcs, la jeunesse algérienne elle, connaîtra la vraie histoire avec un grand H car nous ne pouvons oublier la Régence d’Alger et de la main mise des corsaires sur les richesses du pays.

Nous sommes un peuple de vaillants et ce n’est pas un visa de plus ou de moins  qui va changer la chose, cela dit , il faut savoir que la raison qui fait que nous soyons traités de la sorte , non pas par les turques seulement , c’est l’éducation donnée à nos enfants qui ignorent tout de ce qu’étaient leurs ancêtres. Essayez de faire comprendre à un jeune Algérien que Rome a été sauvée d’Hannibal grâce à l’alliance faite avec Massinissa, il ne vous comprendra même pas .

Allez expliquer à ce jeune que l’église catholique fonctionne aujourd’hui grâce à la révolution faite en son sein par un Algérien, Saint Augustin d’Hippone, et j’en passe.

A force d’occulter notre passé au nom d’un panarabisme qui ne veut même plus de nous, nous finissons par nous égarer et alimenter une culture hybride qui fait qu’aujourd’hui j’écris ce texte. 

Je ne sais pas pour vous, mais en ce qui me concerne je ne peux pardonner le « hold up » identitaire dont fut victime notre peuple, quelle qu’en soit la raison, c’est inexpiable, mille milliards de dollars est une broutille comparée à cette dénaturalisation fomentée par des psychopathes.  

De toute façon, c’est toujours le peuple qui fait figure de tête de turc dans l’histoire depuis des siècles, ce n’est pas nouveau .  
 

Auteur
Nazim Maïza

 




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