Site icon Le Matin d'Algérie

Voleurs de 2023 en prison, ceux de 1962 en « orphéons » !

Alger en 1962
Alger en 1962

Après le départ des roumis en 1962, tout est laissé à l’abandon : commerces, villas, vergers, administrations, etc. Tout était bon à occuper par de petits malins qui ne s’en laissent guère conter. Quand on sait que près d’un million de pieds noirs étaient installés au pays avant et pendant la guerre, il n’est pas trop difficile de s’imaginer le faramineux patrimoine abandonné par les colons.

Qu’est devenu ce patrimoine et par qui a-t-il été distribué ? Qui en a bénéficié ? Loin de moi l’idée de m’adonner à de quelconques statistiques, bien en dehors de mes compétences et de mes appétences, mais il est utile de revenir sur cette période d’emballement et de distribution de ce joli butin …

Tout le monde le sait, les premiers à s’être servis sont les anciens moudjahidine. Y compris ceux qui étaient montés au marquis après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, flairant le magot à portée de main. Après s’être bien goinfrés mais jamais repus, ceux qui avaient occupés des services administratifs divers avaient versé le reste dans le domaine des biens vacants. Des biens soumis à toutes sortes de règles pour le commun des Algériens pour en bénéficier, avec, en priorité, les petits arrangements entre petits copains.

L’exemple dont je me souviens concerne un ancien moudjahid de chez nous (un vrai, pas un faux !) qui avait bénéficié d’un hôtel-bar à Fort-National, aux premières heures de l’indépendance. Des biens dont ont hérité ses enfants et qui constituent encore de nos jours de « petites » sources de revenus en liasses sonnantes et trébuchantes.

Il n’est pas difficile de supputer que la majorité des occupants de ces biens s’étaient fait délivrer des papiers en bonne et due forme par leurs petits copains de l’administration, rendant quasiment impossible tout contrôle plus de 60 ans après !

À signaler que même un oncle paternel avait bénéficié, dès 1963, d’un bel appartement au boulevard Zirout Youcef à Alger pour un pas-de-porte modique et un loyer dérisoire par la suite, avant de se transformer en faux ancien moudjahid, dans les années 1980 (!) pour réclamer sa part de butin et le faire fructifier.

Cependant, de nombreux anciens moudjahidin avaient refusé de se prêter à ce jeu malsain. Parmi ceux-là, je vous ai déjà rapporté l’exemple d’un proche, membre de l’OCFLN de France qui s’était vu offrir, une fois rentré au bercail, une partie du domaine Bouchaoui sur les hauteurs d’Alger et qui avait diligemment décliné l’offre, se refusant de jouer à ce jeu malsain qui consiste à monnayer son engagement ! (*)

Ces deux exemples représentent certainement la cellule fondamentale d’une géométrie fractale dont l’édifice à l’échelle macroscopique s’extrapole au pays tout entier !

En son temps, Abbes El-Madani avait lancé l’idée d’un assainissement des comptes avec la formule « min attayta Hada ? » (D’où te proviennent ces biens). Il est évident que pister les petites fortunes est un exercice difficile à entreprendre, encore moins résoudre, mais concernant les grosses, celles d’on les propriétaires délivrent des chèques à neuf zéros, l’Algérie nouvelle serait bien avisée d’entreprendre un assainissement plus que nécessaire si le but est de construire un pays avec des hommes intègres ! Mais évidemment cela relève de l’utopie la plus absolue, car telle initiative suppose qu’il faille remonter jusqu’aux arcanes supérieures de la pyramide du pouvoir. Dans la lignée de nos délires, il serait intéressant d’enquêter sur l’origine exacte des sommes faramineuses détournées par les affidés du clan Bouteflika pour déterminer s’il n’y a pas une quelconque relation entre les larrons de 2023 et les ascendants de 1962. Et là se dessine un ligne rouge, celle d’une fin de non-recevoir dont l’évidence n’est pas difficile à concevoir !

Voleurs de 2023, à vos prisons ! Voleurs de 1962, à vos orphéons !

Kacem Madani

(*) https://lematindalgerie.com/vrai-et-faux-moudjahid-anecdotes-authentiques/

 

Quitter la version mobile