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Youcef Aouchiche : l’«Algérie nouvelle» risque d’être rattrapée par l’«ancienne»

Youcef Aouchiche, au conseil national du FFS

Faisant l’analyse de la situation sociopolitique et économique que traverse le pays, le FFS qui a réuni son conseil national, ce samedi 2 juin 2023, fait  ce constat implacable : « à défaut d’ouverture politique, et d’une claire détermination au plus haut sommet de l’Etat, l’« Algérie nouvelle » risque d’être spectaculairement rattrapée par l’« ancienne ».

Et de proposer de nouveau son offre politique faite déjà au pouvoir qu’il invite à   » la  construction d’un consensus national (qui) constitue l’unique  voie pour  protéger notre pays, pérenniser l’Etat national et gagner la bataille du développement ».

Dans son allocution  prononcée devant ses pairs du Conseil national, Youcef Aouchiche alerte « les détenteurs du pouvoir sur les risques d’une gestion unilatérale des affaires de la nation », compte tenu avance.-t-il « d’un contexte mondial et régional instable et dangereux, dans lequel les foyers de tensions et de guerre se multiplient ».

Il rappelle aussi que le FFS dit « avoir toujours pris ses responsabilités pour proposer des issues politiques globales et démocratiques à la crise ». Cependant, il regrette que « des cercles dirigeants ont toujours fait le choix irresponsable d’ignorer toute initiative politique susceptible de créer les conditions d’un vrai changement et de prémunir le pays contre les risques de fractures et d’implosion. »

« Des cercles compradores, de groupuscules extrémistes derrière l’échec de la révolte du 22 février »

De fait, estime l’orateur, « la révolte populaire de février 2019 est la conséquence de l’obstination du pouvoir à poursuivre une voie antinationale en consacrant le règne sans partage d’une caste d’oligarques en passe de capter les richesses du pays à leur profit et au profit des intérêts extérieurs. »

Et d’enchaîner : « Cette réaction populaire, de par son ampleur et son patriotisme  aurait pu, aurait dû constituer une opportunité historique pour organiser une mutation pacifique et progressive du système de gouvernance et l’adapter aux aspirations populaires à la liberté, l’égalité et la justice ».

Incriminant « des cercles compradores, des groupuscules extrémistes de tous bords et d’activistes radicaux et populistes » d’être derrière l’échec de « ce formidable élan populaire en le vidant de sa substance politique », le premier secrétaire du FFS estime que « cela ne doit pas conduire les autorités du pays à se méprendre sur sa portée historique. »

Car, explique-t-il, « si le peuple algérien a tourné le dos aux aventuriers et aux stratèges du chaos, il n’a pas pour autant abdiqué ses exigences d’un nouvel ordre politique, plus juste et plus démocratique. Le 22 février a incontestablement fait franchir au pays un point de non-retour vers les vieux schémas de gouvernance, il reste aujourd’hui à parachever sa traduction politique et institutionnelle en favorisant la constitution de contre-pouvoirs. »

« Un statu quo intenable »

Tout en mettant en garde contre les périls inhérents à « l’intenable statuquo actuel », Youcef Aouchiche  pointe du doigt « l’incapacité des autorités à tracer des perspectives politiques qui consacrent l’Etat de droit et qui libèrent les forces productives, créatrices de richesses. » Ce qui, se préoccupe-t-il, « laisse présager à nouveau les pires scénarios. »

Au soutien de son analyse, ce responsable politique avance cet argument: « La démagogie populiste et les professions de foi auto-dithyrambiques ne parviennent plus à masquer les signes du mécontentement et d’exaspération qui se multiplient ».

Le bilan économique  du nouveau pouvoir ne trouve pas grâce aux yeux du chef de file du front des forces socialistes pour qui « les autorités donnent cette impression de ne se préoccuper que de l’Algérie utile, celle des champs gaziers et pétroliers alors que la jeunesse, principale ressource du pays, ne bénéficie toujours pas d’un grand programme économique d’investissement, créateur de richesses et d’emplois. Une situation inquiétante qui risque de conduire à une aggravation des fléaux sociaux. »

Ces malheurs se manifestent sous des formes diverses telles que  » le chômage, la harga, délinquance, consommation de stupéfiants, charlatanisme religieux (qui) constituent le terreau favorable à toutes les manipulations externes et internes visant à semer le désespoir et préparer les conditions des futures révoltes sociales sur le mode actualisé des « printemps arabes » ou des « révolutions colorées » », constate Youcef Aouchiche.

« Les mises en garde récurrentes des autorités sur les dangers et les complots extérieurs, pourtant bien réels, risquent de ne plus convaincre les Algériens si l’étau juridico-sécuritaire n’est pas desserré. Les dirigeants du pays commettent en effet une erreur stratégique en pensant que concéder des espaces de liberté ferait le jeu de la subversion anti-étatique », prévient-il.

Vide politique et refus de faire « porter le chapeau » aux partis politiques 

Et de pointer du doigt ce qui constitue aux yeux du FFS « l’incroyable paradoxe  qui  caractérise l’attitude des gouvernants. » Des dérives qui se manifestent par « la mise sous scellés de la vie politique qui nourrit précisément l’action des groupuscules séditieux et violents. Au lieu de  d’encourager la mobilisation populaire en renforçant les médiations politiques et sociales, les autorités se referment sur elles-mêmes et accentuent le sentiment de défiance envers les Algériennes et les Algériens. »

Ajoutant : « Faire porter aux partis politiques et les élites politiques d’une façon générale, la responsabilité des crises qu’a connu le pays et tenter d’accentuer leur marginalisation en promulguant des lois restrictives et contraignantes et en faisant la promotion de structures-maisons dites de la société civile, ne feront qu’encourager les forces centrifuges. »

Le premier secrétaire du plus vieux parti opposition se dit convaincu que le « vide politique» et les multiples contraintes à l’exercice des droits et libertés politiques, ne feront  que favoriser les groupes politiques mercenaires qui bénéficient, – alors que les partis légaux sont privés y compris de la subvention financière publique qui leur revient de droit -, d’appui politiques, médiatiques et financiers étrangers et locaux, en particulier de l’ancienne « Issaba » qui, bien que neutralisée, dispose toujours d’une grande capacité de nuisance. »

Et de faire ce constat implacable : « à défaut d’ouverture politique, et d’une claire  détermination au plus haut sommet de l’Etat, l’« Algérie nouvelle » risque d’être spectaculairement rattrapée par l’ « ancienne ». »

Pour faire face à ces multiples périls qui, selon lui,  pèsent sur le pays,  Youcef Aouchiche estime « qu’il est vital que la classe politique prenne ses responsabilités et se rassemble en ouvrant de vraies perspectives politiques au pays qui neutraliseront définitivement toute tentation de restauration d’un ordre politique qui a failli provoquer l’effondrement de l’Etat national. »

Ce faisant, annonce-t-il, « le FFS invite l’ensemble des partis à des consultations en vue d’un Pacte historique pour le parachèvement du projet national. » Le parti a toutefois gardé le silence sur les prisonniers politiques qui croupissent dans les prisons. Aucune dénonciation, ni appel à leur détente n’est venu de la bouche de Youcef Aouchiche qui fut un temps un invité de marque de Tebboune.

Tout en la voulant « sans exclusive et au-delà des clivages idéologiques », le FFS estime toutefois que  son initiative dont les contours seront précisés ultérieurement à l’intention de ses partenaires politiques » s’adresse à toutes les forces politiques à la fois engagées dans la défense de l’Etat de droit, des libertés, de la justice sociale et intransigeante quand il s’agit de s’opposer fermement aux velléités, internes ou externes, de porter atteinte, sous quelques prétextes que ce soit, à l’intégrité et l’unité du pays, à l’Etat et ses institutions. »

Dans ce qui  semble être un rappel à ceux qui ne le savent pas encore, le FFS réitère son crédo : « Plus que jamais, la principale ligne de démarcation est entre forces patriotiques et cercles antinationaux ».

Samia Naït Iqbal

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