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Zedek Mouloud, le légataire universel

REGARD

Zedek Mouloud, le légataire universel

Oui, Zedek Mouloud est légataire, héritier des meilleurs, des anciens et des récents. Sa poésie danse entre François Villon et Raymond Devos. Au passage, il convoque Jean de La Fontaine. Et Coluche…

Zedek Mouloud est grave et drôle. Un mariage contre nature, presque surnaturel. Il jongle avec les mots comme Zidane s’amusait avec le ballon.

Il parle des vieux sentiers et des chacals qu’on apercevait de loin.

S’imagine-t-il le nombre d’images qu’il fait remonter à nos pauvres têtes, lui qui est plus jeune que nous ?

Au fil de son chant, on devine Matoub, son ami. Slimane Azem, El Hasnaoui, Zerrouki Allaoua… Ses maîtres peut-être. Peut-être est-il lui-même un maître en devenir ?

Allez savoir pourquoi il parle des batailles que se livrent les chats et les souris.

Chacun de ses vers appelle à la reconnaissance, à la renaissance de sa langue : le berbère, tamazigh.

Pourquoi donc ? Les réponses sont simples, naïves, presque idiotes. Pendant combien d’années nous a-t-on pris pour des billes ?

Un peuple sans langue et sans identité. Pendant combien d’années nous a-t-on humiliés, piétinés, agressés ?

Dans les bus d’Alger, c’est à peine si on se soufflait les résultats, en kabyle, de la JSK.

On ne nous a jamais aimés. C’est ce qu’apporte, comme réponse avec beaucoup de prêcheur, de franchise et de talent, Zedek Mouloud.

Mouloud, à travers son verbe, sa voix et ses mélodies fait renaître ma mère. Il me fait retrouver son sein.

Zedek est un vrai rebelle. Qui ne se souvient de ce jour où il a publiquement mordu dans un sandwich, sur la place Matoub Lounès, à Tizi Ouzou, en plein ramadhan ?

A l’époque, on a parlé de provocation. Zedek était dans son rôle. Comme le disait si bien Matoub, il n’est pas arabe et il n’est pas obligé d’être musulman.

Revenons à son travail, à cette voix lumineuse. Revenons à ces textes incroyablement bien construits. Chaque mot inséré dans un vers déconstruit celui qui le précède pour donner du sens à l’ensemble. Tous les vers réunis dessinent un pays, une planète.

Si Mouloud était un homme politique, si l’Algérie manifestait le désir d’avoir un homme censé à sa tête, elle l’aurait choisi comme président.

La bonne blague ! Zedek est un troubadour. Un voleur de mots. Un voleur utile. 

Il n’y a pas une seule soirée, en Kabylie, qui se déroule sans une chanson de ce nouveau chantre, ce prophète. 

Son nouvel album »Negh delmegh » porte les preuves de son engagement pour la démocratie, pour la liberté, pour toutes les libertés, notamment celles des femmes.

Je crois que Zedek aimait sa mère. Je pense qu’il aime sa femme. Je suis sûr qu’il aime l’Algérie.

Zedek Mouloud sera au Zénith de Paris le 12 janvier 2020, à partir de 19H00.

Dernier album : « Negh delmegh » disponible dans les bacs.

 

Auteur
Meziane Ourad

 




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