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Ziad Rahbani est mort : la conscience libre du Liban s’éteint

Ziad Rahbani

Le compositeur, dramaturge et pianiste libanais Ziad Rahbani est décédé ce samedi 26 juillet 2025 à l’âge de 69 ans. Fils de la légendaire chanteuse Faïruz et du grand compositeur Assi Rahbani, il laisse derrière lui une œuvre dense, subversive et profondément ancrée dans les contradictions du Liban moderne.

Dès l’adolescence, il s’impose comme un musicien prodige en composant pour sa mère l’émouvant “Sa’alouni el‑Nas”, au chevet de son père malade. Mais très vite, Ziad Rahbani s’éloigne des sentiers de la tradition pour tracer un style propre : jazz, funk, musique classique occidentale et sonorités orientales se rencontrent dans une fusion libre, poétique, urbaine. Il réinvente les formes, les rythmes, et introduit dans la musique libanaise une résonance politique et sociale inédite.

Au théâtre, il devient l’auteur d’un regard mordant sur la société libanaise : Nazl el‑Sourour, Bennesbeh la bokra chou ?, ou Shi Feshil sont autant de satires grinçantes du confessionnalisme, de la guerre civile, de l’hypocrisie des élites. Son humour noir, sa tendresse pour les vaincus, son verbe tranchant en font une voix à part dans le Proche-Orient.

Artiste engagé, Ziad Rahbani fut aussi un militant communiste, critique envers toutes les formes d’oppression, y compris celles venues de son propre camp.

À Beyrouth, sa mort a provoqué une onde de choc. Le président libanais a salué en lui « un miroir lucide de la société », tandis que de nombreuses figures culturelles évoquent la perte d’une conscience libre, d’un artiste inclassable, témoin infatigable des déchirements de son pays.

Ziad Rahbani n’était pas seulement l’héritier d’un nom. Il était un éclaireur, un homme de théâtre, un inventeur de langages, un chroniqueur musical des espoirs brisés et des révoltes souterraines du Liban. Sa disparition laisse un vide immense.

Djamal Guettala

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