Vendredi 28 février 2020
54e vendredi : « Par Allah, nous ne nous arrêterons pas », crient les manifestants
Alger, 28 février. Photo de Meriem Naït Lounis.
Les Algériennes et les Algériens sont sortis massivement manifester en ce 54e vendredi pour réclamer un véritable de changement dans les institutions.
Les marcheurs restent très incisifs et truculents en matière de slogans (voir plus bas). Le génie populaire s’inspire de la situation et réinvente ses messages. Aussi, le peuple du Hirak se refuse à toute résignation devant le déni manifeste du pouvoir actuel.
Un des slogans qui revient est celui de l’indépendance. Les manifestants le répètent à chaque fois. Les manifestants estiment que le pays est occupé par un régime illégitime.
Même si la mobilisation reste moins importante que celle de la semaine précédente à l’occasion du premier anniversaire du mouvement, il demeure que ce sont des centaines de milliers d’Algériens qui ont manifesté dans les plus grandes villes du pays..
Les slogans ont à nouveau détourné avec humour l’actualité, mettant à l’honneur le nouveau coronavirus, dont un premier cas en Algérie – un Italien – a été annoncé mardi par les autorités. « Ramenez corona(virus) ou la BRI (unité d’élite de la police), on ne s’arrêtera pas! » ou « Vous ne nous faites pas peur avec votre corona(virus), on ne va pas s’arrêter! ». Certains manifestants arborent néanmoins des masques.
« La pluie, le froid, la chaleur, le jeûne du ramadan : rien ne nous a arrêtés » depuis un an, « alors ce n’est pas un virus qui va le faire. Ce virus n’est pas pire que le régime en place », assure à l’AFP Ahlem, bibliothécaire de 50 ans, le nez et la bouche couverts d’un masque chirurgical. Enseignant de 58 ans, Ahmed Bouziane, qui porte un masque antipoussière acheté chez le quincailler, estime qu’il « faut rester vigilants face au coronavirus ». « Mais cela ne nous empêchera pas de marcher », s’empresse-t-il d’ajouter.
Pour Sid Ali, biologiste de 45 ans, les médias « affolent » les gens avec le coronavirus: « la grippe saisonnière tue bien plus de monde » que « ce nouveau virus. On va marcher jusqu’à ce que ce régime tombe ».
« Algérie libre et démocratique », « Etat civil et non militaire », « les généraux, à la poubelle et le pays aura son indépendance », scandent aussi les manifestants, reprenant des slogans plus habituels du « Hirak » qui a provoqué la démission du président Abdelaziz Bouteflika le 4 avril 2019 et continue de demander le changement du « système » au pouvoir depuis l’indépendance en 1962. Comme chaque semaine depuis le début du mouvement, de nombreux manifestants arborent des portraits de héros de la révolution algérienne (la guerre d’indépendance contre la France de 1954 à 1962) ou ceux de « détenus du Hirak », arrêtés dans le cadre de la contestation.
« Où es-tu justice ? Les militants en prison et le fils de Tebboune acquitté », scandent-ils en référence à l’acquittement mercredi, dans une affaire de corruption, du fils du président Abdelmadjid Tebboune – élu en décembre lors d’un scrutin boycotté par le Hirak et marqué par une abstention record.