Le régime tunisien franchit une nouvelle étape dans la répression politique en instrumentalisant une fois de plus la justice pour faire taire les voix dissidentes.
Un nouveau procès, d’évidence politique, vient d’être lancé contre des figures de l’opposition et de la société civile : Moncef Marzouki, ancien président de la République, Imed Deymi, ancien directeur de cabinet de Moncef Marzouki, candidat injustement écarté par l’ISIE à l’élection présidentielle d’octobre 2024, Abderrazak Kilani, ancien bâtonnier de l’Ordre national des avocats,Abdennacer Ayed Limam, président de l’Association des victimes de la torture en Tunisie (AVTT), Adel Mejri, secrétaire général de l’AVTT, Cette offensive judiciaire fait suite à une conférence tenue le 9 mars 2024 à la Maison des associations de Genève, organisée par l’AVTT.
L’événement portait sur les violations du droit à un procès équitable et sur l’absence d’indépendance du pouvoir judiciaire en Tunisie. À cette occasion, les intervenants ont annoncé leur intention de porter plainte devant les instances internationales, notamment onusiennes, contre 54 magistrats accusés de collusion avec le pouvoir dans ces violations.
L’ouverture des poursuites n’émane pas des magistrats prétendument visés, mais du ministère public, agissant sur ordre direct de la ministre de la Justice — preuve manifeste de l’immixtion de l’exécutif dans les affaires judiciaires. Ce procédé illustre la dérive autoritaire d’un pouvoir obsédé par la neutralisation de toute contestation, même symbolique.
Il convient de rappeler que Moncef Marzouki et Abderrazak Kilani font déjà l’objet de condamnations par contumace dans d’autres affaires fabriquées de toutes pièces, ce qui confirme leur statut de cibles privilégiées d’un régime répressif aux abois.
Face à cette nouvelle mascarade judiciaire, le CRLDHT :
Dénonce avec la plus grande fermeté cette manœuvre de persécution politique par voie judiciaire, qui trahit la fébrilité du régime en place.
Exprime sa pleine solidarité à l’égard de toutes les personnalités poursuivies pour avoir exercé leurs droits fondamentaux à la liberté d’expression, d’association et de critique du pouvoir.
Considère ce procès comme un aveu involontaire de la validité des accusations portées contre certains magistrats : la réaction disproportionnée de l’exécutif, par l’entremise du parquet, accrédite la pertinence des dénonciations exprimées lors de la conférence de Genève.Réaffirme son soutien sans faille aux magistrates et magistrats qui refusent de se soumettre aux injonctions de l’exécutif et qui défendent avec courage l’indépendance de la justice, condition essentielle de toute démocratie digne de ce nom.