Hamid Sidi Saïd, ancien ministre et wali, est décédé jeudi à l’âge de 83 ans. Il a été enterrée, ce vendredi 9 mai, au cimetière Garidi d’Alger. 

La nouvelle de sa disparition a suscité des réactions partagées, entre hommages officiels et critiques sur son rôle dans des épisodes clés de l’histoire politique algérienne.

Père de Kamel Sidi Saïd, actuel conseiller à la Présidence de la République en charge de la communication, Hamid Sidi Saïd a été l’un des visages familiers de l’appareil d’État durant les dernières décennies. 

 Derrière le parcours classique d’un serviteur de l’État se dessine en réalité une trajectoire plus complexe, révélatrice des logiques de pouvoir et des fractures persistantes entre le centre et les marges, notamment en Kabylie.

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Originaire d’Aïn El Hammam( une quarantaine de kms à l’est de TiziOuzou), issu d’une grande famille maraboutique, cet ancien instituteur a connu une trajectoire remarquable au sein de l’État. Son parcours l’a conduit à occuper des fonctions stratégiques durant les décennies 1980 et 1990 : d’abord , au sein du parti-Etat FLN puis au sein de l’administration et du gouvernement algériens. Il sera wali, puis ministre de la Poste et des Télécommunications en 1989, avant de diriger le ministère de la Santé en 1990. Plus qu’une simple ascension administrative, son intégration au cœur de l’appareil d’État portait une forte charge symbolique : celle d’un héritier d’un lignage familiale qui a toujours constitué un levier pour  accéder  aux leviers du pouvoir moderne.

 À première vue, son parcours illustre celui d’un cadre compétent, promu au sein des institutions au gré des conjonctures politiques. Mais cette intégration au cœur du pouvoir ne fut jamais neutre sur le plan symbolique.

Pour une partie de l’opinion, notamment parmi les militants kabyles favorables à une rupture avec le système politique en place, Hamid Sidi Saïd incarne l’archétype du « Kabyle de service » — cette expression critique désignant des personnalités issues de la Kabylie cooptées par le régime pour asseoir sa légitimité, tout en marginalisant les véritables revendications régionales. Ce rôle d’interface, perçu comme une forme de collaboration passive, voire de trahison, a longtemps suscité défiance et rejet, particulièrement dans les milieux intellectuels et militants de la région.

Un épisode marquant résume à lui seul cette fracture mémorielle : en mars 1980, alors wali de Tizi Ouzou, Hamid Sidi Saïd interdit la conférence que devait donner Mouloud Mammeri à l’université locale. Ce geste bureaucratique, apparemment qui n’avait rien d’anodin, provoque une mobilisation sans précédent, donnant naissance au Printemps berbère — première contestation de masse portée par une conscience identitaire kabyle affirmée.

Depuis, cet épisode reste une tache indélébile dans son parcours, et symbolise pour beaucoup la subordination d’élites locales à un pouvoir central sourd aux aspirations culturelles et politiques régionales.

Aujourd’hui, alors que sa dépouille s’apprête à être inhumée à Alger, en présence de hauts responsables de l’État, le legs de Hamid Sidi Saïd interroge. Il est celui d’un haut fonctionnaire rigoureux et fidèle à l’appareil, mais aussi celui d’un homme dont la loyauté au système a cristallisé, en creux, les limites de la représentation régionale dans l’architecture institutionnelle algérienne.

Sa trajectoire illustre, en dernière analyse, la difficulté persistante de concilier participation au pouvoir et expression autonome d’identités périphériques dans un État centralisé. Elle invite, aussi, à réfléchir sur le rôle que jouent — ou refusent de jouer — les élites régionales dans les dynamiques de transformation politique.

Sofiane Ayache

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