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dimanche 18 mai 2025
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Kamel Louafi : « Le paysage est une mémoire vivante, pas un décor à effacer »

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Il est l’un des paysagistes les plus reconnus à l’international, mais c’est à Batna, en Algérie, que tout a commencé. Kamel Louafi a tracé son chemin à travers les continents, les jardins, les mémoires et les cultures.

De Berlin à Abou Dabi, en passant par Hanovre, il n’a cessé de bâtir des ponts entre esthétique, durabilité et patrimoine. À travers cet entretien exclusif accordé au Matin d’Algérie, il revient sur son parcours hors du commun, ses inspirations profondes, et sa vision engagée pour des villes algériennes plus vertes, plus humaines, et plus fidèles à leur histoire. Un regard lucide, généreux et poétique sur l’avenir du paysage.

Le Matin d’Algérie : Vous êtes né à Batna et avez travaillé sur plusieurs continents. En quoi votre parcours personnel a-t-il influencé votre vision du paysage ?

Kamel Louafi : Avant de devenir paysagiste, j’ai effectué de nombreux voyages marquants. Je me souviens notamment d’un long trajet en train de Batna à Berlin-Ouest, à travers la Tunisie, l’Italie, la Suisse, l’Allemagne de l’Est… J’ai aussi fait du stop autour de la Méditerranée, traversé l’Espagne, exploré l’île de Grande-Bretagne avec des amis, et voyagé dans le Sahara algérien dans les années 1975. Ces expériences ont profondément influencé ma manière d’observer les paysages et leur diversité. Plus tard, avec des amis allemands de Berlin, nous avons fait un voyage mémorable jusqu’à Lomé.

Le Matin d’Algérie : Quelles ont été vos premières sources d’inspiration en tant que paysagiste ?

Kamel Louafi : L’Alhambra en Andalousie. Ce lieu est pour moi une source d’inspiration inépuisable.

Le Matin d’Algérie : Comment définissez-vous un paysage durable et résilient ?

Kamel Louafi : Il doit être diversifié et adapté au lieu dans lequel il se trouve.

Le Matin d’Algérie : Quelle place la culture et la mémoire des lieux occupent-elles dans vos projets ?

Kamel Louafi : Cela dépend du projet. Pour un jardin privé ou un petit espace d’agrément, l’essentiel est de créer une harmonie, un lieu où l’on se sent bien. Mais lorsqu’il s’agit de lieux publics, il est possible d’exprimer des dimensions sociales ou politiques, de faire revivre le patrimoine et la mémoire du lieu.

Le Matin d’Algérie : Vous parlez souvent de « revitalisation des surfaces urbaines dégradées ». Quelles approches privilégiez-vous concrètement ?

Kamel Louafi : Je tiens à transmettre aux jeunes étudiants qu’il ne faut pas tout raser quand on commence un projet de paysage. Il faut intégrer les éléments existants, surtout lorsqu’il s’agit de végétation ancienne.

Le Matin d’Algérie : Parmi vos projets internationaux, lequel vous a le plus marqué, et pourquoi ?

Kamel Louafi : Les jardins de l’exposition universelle de Hanovre et le jardin islamique de Berlin.

Le Matin d’Algérie : Que représente pour vous la création du jardin islamique oriental à Berlin ?

Kamel Louafi : C’est un projet à la fois artistique et symbolique. Je viens de terminer un livre intitulé Jardin islamique oriental de Berlin – Le voyage de la culture mauresque à Berlin. Vous en recevrez un exemplaire cet été.

Le Matin d’Algérie : Comment avez-vous abordé l’aménagement des jardins de la mosquée Cheikh Zayed à Abou Dabi ?

Kamel Louafi : Dans le concours que j’ai gagné, j’ai proposé des espaces culturels forts. Dans la grande cour, j’ai reproduit au sol des motifs de tapis en pavés. Autour de la mosquée, j’ai conçu des espaces ombragés, essentiels dans ce contexte climatique.

Le Matin d’Algérie : Quelles sont, selon vous, les priorités actuelles pour repenser les espaces verts dans les villes algériennes ?

Kamel Louafi : En Algérie, il est impératif que les espaces verts soient obligatoires à côté de toute nouvelle construction.

Le Matin d’Algérie : Comment intégrer efficacement la trame verte dans des villes en pleine transformation ou densification ?

Kamel Louafi : Il y a mille façons d’intégrer les espaces verts. Le plus important est d’avoir une réglementation stricte, qui oblige les projets – publics comme privés – à intégrer une part de végétal véritable, et non simplement du minéral.

Le Matin d’Algérie : Vous avez encadré de nombreux étudiants à l’international. Quelles valeurs souhaitez-vous transmettre ?

Kamel Louafi : Je souhaite leur donner la liberté de créer leur propre vision, mais aussi leur faire comprendre l’importance de l’espace extérieur et du végétal. Leur travail doit avoir du sens et s’inscrire dans une relation sensible avec l’environnement.

Le Matin d’Algérie : Vous avez reçu plusieurs distinctions, dont la Croix fédérale du Mérite en 2023. Que représentent-elles pour vous ?

Kamel Louafi : C’est une reconnaissance du travail accompli. Et j’en suis très heureux.

Le Matin d’Algérie : Que représente pour vous cette rencontre internationale à Sétif, et quel message aimeriez-vous transmettre ?

Kamel Louafi : Malheureusement, je n’ai pas pu y assister sur place car je suis tombé malade. Nous avons néanmoins organisé une réunion via Zoom. J’ai trouvé cette initiative très courageuse. Je l’ai dit clairement : Mme Assia Omrani a fait preuve d’un immense courage en mettant en avant ce thème essentiel.

À propos de Kamel Louafi

Né à Batna, Kamel Louafi est un paysagiste de renommée internationale. Formé à Berlin, il a signé des projets majeurs à Hanovre, Berlin, Abou Dabi et au-delà. Curateur à la galerie AEDES depuis 2000 et membre du Centre d’art des jardins de Hanovre depuis 2017, il enseigne dans plusieurs universités en Europe et en Algérie. Il est également l’auteur de nombreux ouvrages sur le paysage et les jardins.

Propos recueillis par Djamal Guettala

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