La visite effectuée par le chef de l’Etat Abdelmadjid Tebboune au Vatican et sa rencontre avec le Pape Léon XIV n’en finissent pas de susciter des réactions, parfois outrées, dans certains cercles politico-religieux en Algérie.
Si, sur le plan diplomatique, l’événement s’inscrit dans le cadre d’un dialogue interreligieux et d’un repositionnement géopolitique discret d’Alger sur la scène internationale, il semble avoir déclenché une levée de boucliers chez les courants islamistes les plus conservateurs.
Au cœur de la crispation : la perspective évoquée d’une visite du Pape Léon XIV en Algérie et d’un hommage solennel rendu à Saint Augustin, figure fondatrice de la pensée chrétienne, originaire de l’actuelle ville d’Annaba. Ce simple projet ravive une mémoire historique que certains voudraient voir enfouie à jamais : celle d’une Algérie plurielle, profondément marquée par des strates de civilisation berbère, romaine et chrétienne avant l’arrivée de l’islam.
Pour ces courants idéologiques, qui ont érigé une lecture rigide de l’histoire nationale en dogme intangible, la reconnaissance officielle du passé chrétien du pays serait perçue comme une remise en cause de l’identité islamique exclusive qu’ils tentent d’imposer depuis des décennies. L’évocation de Saint Augustin, penseur majeur de l’Église et philosophe d’origine amazighe, ne représente pas seulement un sujet théologique ou culturel. Elle touche un tabou politique : celui d’une Algérie dont l’histoire, bien antérieure à l’islam, pourrait servir de socle à une redéfinition plus inclusive de l’identité nationale.
Ce raidissement idéologique témoigne, en creux, de la difficulté persistante à assumer la complexité du passé algérien. Il révèle aussi les lignes de fracture entre les institutions de l’État, engagées dans une stratégie d’ouverture mesurée vers l’Occident chrétien, et une partie de la mouvance islamiste qui voit dans tout dialogue interreligieux une menace existentielle.
La visite présidentielle au Vatican, si elle peut être interprétée comme un geste diplomatique classique, prend dès lors une dimension symbolique plus profonde. Elle interroge la capacité de l’Algérie officielle à affronter sereinement son histoire dans toute sa diversité, mais aussi à résister aux pressions d’un conservatisme identitaire qui craint moins la réalité du passé que les implications politiques de sa reconnaissance.
En somme, cette controverse dépasse largement le cadre religieux : elle met en lumière les tensions autour de la mémoire, de l’histoire et du récit national. Car si la figure de Saint Augustin dérange, c’est surtout parce qu’elle rappelle qu’avant d’être musulmane, l’Algérie fut amazighe, romaine et chrétienne — et que toute tentative d’amnésie historique est, à terme, un appauvrissement culturel et politique.
Samia Naït Iqbal
Mon point de vue sur la visite de Tebboune au Vatican.
Désolée de contredire Samia Naït Iqbal l’auteure de cette contribution pour dire que ce voyage est loin de s’inscrire dans le cadre d’un dialogue interreligieux ou d’un repositionnement géopolitique d’Alger. De plus, une reconnaissance du passé chrétien de l’Algérie n’est pas du tout dans l’intention du pouvoir qui restera, malgré ce voyage, ancré à son idéologie politico religieuse arabo islamique exclusive comme d’ailleurs la mouvance politique islamiste du pays.
Avec cette visite préparée à l’avance, le pouvoir machiavélique est plus dans la communication car il me semble qu’il avait besoin de ce coup d’éclat, de cette visite qui fait écho partout dans le monde, du fait qu’il est un peu plus isolé diplomatiquement du fait de ses positions vis à vis de la France, Israël, le Maroc, le Sahara Occidental, le Mali etc , et il est donc dont la logique de se faire un peu plus « d’étoffe internationale » , « d’étoffe diplomatique » pas plus que çà.
En revanche, ce dont je suis persuadé c’est que ce voyage n’aura aucun incidence ou répercussion sur le plan intérieur. Ce pouvoir ne changera pas d’un iota sa posture politico idéologico religieuse quant à la liberté de conscience , à la liberté de culte que d’ailleurs une bonne partie majorité des algériens refusent du fait de la propagande à la Goebbels du pouvoir depuis 1962 et d’autant que les partis islamistes et le FLN veillent aux grains.
Je suis persuadée aussi que Tebboune ne fera même pas l’effort de foutre la paix aux chrétiens algériens ou de libérer les responsables des églises catholiques protestantes (surtout en Kabylie) de même qu’il n’autorisera pas la réouverture de leurs lieux de culte. Je suis aussi persuadé qu’il a menti au Pape en lui racontant que l’Algérie respecte la liberté de culte, la liberté de conscience en mettant en avant la présence de quelques églises institutionnelles comme le Sacré cœur , Notre Dame d’Afrique ou la basilique de Santa Cruz à Oran. Le pouvoir et son FLN de 62 n’ont pas franchi le Rubicon de les fermer ou de les détruire car elles ont une trop grande valeur symbolique et historique et il y a le risque de provoquer la colère, l’indignation et la condamnation des pays occidentaux chrétiens.
Ainsi Tebboune a certainement murmuré à l’oreille du Pape (qui n’est pas dupe) que l’islam est tolérant ce qui absolument faux en Algérie sur le terrain. Il ne lui dira jamais que chez nous en Algérie dès qu’un citoyen algérien est surpris en train de fumer ou de manger durant le Ramadhan , ils sont conduits au commissariat pour les ficher, voire les poursuivre en justice. Il ne lui avouera jamais qu’en Algérie TOUS les restaurants sont obligatoirement fermés durant le Ramadhan et que les citoyens chrétiens ou athée ou même les touristes de passage n’ont qu’à se débrouiller pour trouver à boire ou à manger !
Conclusion : le Pape a certainement rit sous cape. 🤣🤣🤣🤣🤣🤣🙏🙏🙏👍