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mercredi 13 août 2025
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Nadia Agsous : une voix littéraire et journalistique engagée entre deux rives

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Nadia Agsous est une femme de lettres et de médias franco-algérienne dont le parcours singulier s’inscrit à la croisée du journalisme, de la littérature, de la communication et de la pensée critique. Elle incarne une voix attentive aux fractures du monde contemporain, aux voix oubliées, aux espaces de transition entre les cultures. 

À travers ses écrits, ses chroniques, ses interventions médiatiques et ses activités de transmission, elle tisse des liens entre l’intime et le politique, entre le récit individuel et les enjeux collectifs. Formée à la littérature, à la sociologie des migrations et à la communication publique, elle navigue entre disciplines avec une aisance qui lui permet d’éclairer les complexités de nos sociétés sous différents angles. Engagée sans être dogmatique, rigoureuse sans être distante, Nadia Agsous déploie une œuvre intellectuelle et artistique habitée par une quête constante : celle de comprendre, de relier et de transmettre.

Vivant et travaillant à Paris, elle incarne une voix engagée, lucide et profondément humaniste, attentive aux récits invisibles, aux mémoires enfouies et aux dynamiques culturelles des deux rives de la Méditerranée. Journaliste et chroniqueuse littéraire, communicante et écrivaine, elle conçoit et anime deux émissions sur AlternaTV, média alternatif diffusé sur les réseaux sociaux : AlternaCultures, consacrée aux expressions artistiques et aux enjeux culturels contemporains, et L’Interview, série de portraits et d’entretiens avec des intellectuels, artistes, penseurs et acteurs de terrain.

Son parcours académique reflète la diversité de ses centres d’intérêt et la profondeur de sa réflexion : titulaire d’un master 2 en littérature anglo-saxonne et anglophone obtenu à l’université d’Alger, elle a également décroché une licence en aménagement et développement territorial à l’université de Villetaneuse, ainsi qu’un DEA en sociologie des migrations à l’université Paris 8. Cette formation multidisciplinaire s’est prolongée par une spécialisation en communication publique, domaine dans lequel elle mène aujourd’hui des actions de stratégie et de médiation, notamment en tant que chargée de communication interne.

Nadia Agsous a collaboré avec de nombreux médias, tant dans la presse écrite que dans la presse numérique. On retrouve sa plume dans El Watan (supplément culturel Arts et Lettres), mais aussi dans Le Huffington Post, Médiapart, La Cause Littéraire, Vie des livres, Le Mague, et d’autres revues littéraires et plateformes numériques. Ses contributions, riches et variées, abordent avec exigence les grands thèmes de notre temps : mémoire, exil, altérité, condition migrante, identité, justice, dialogue interculturel.

Parallèlement à son activité journalistique, elle construit une œuvre littéraire marquée par une écriture poétique, dense, à la fois introspective et politique. Son premier livre, Réminiscences (Éditions Marsa, 2012), rassemble des textes en prose et en vers, accompagnés de dessins de l’artiste algéro-belge Hamsi Boubekeur. Ce recueil intime et onirique explore la mémoire, le sentiment d’appartenance et la quête de soi. En 2014, elle publie Des Hommes et leurs Mondes aux Éditions Dalimen, un ouvrage d’entretiens avec le sociologue Smaïn Laacher. Cet échange approfondi permet une immersion dans l’univers des migrants, ces femmes et ces hommes relégués en marge de la société, dont la parole reste trop souvent inaudible.

Son premier roman, L’Ombre d’un doute, paraît en 2021 aux Éditions Frantz Fanon. Situé dans la ville imaginaire de Bent’Joy, ce récit interroge la transmission de l’identité collective historique, les blocages liés à la mémoire figée, et la possibilité pour l’individu de s’en libérer. Porté par une langue forte, symbolique et poétique, le roman évoque l’éveil, le déracinement, la réinvention de soi, à travers une fable aux accents mythiques et politiques. En 2023, elle publie Nulle Terre Ailleurs, roman-récit qui se déroule à Al-Qods – Jérusalem. L’ouvrage, enrichi de photographies de portes prises dans la vieille ville en 2014, se présente comme un plaidoyer littéraire en faveur de la paix. Portée par un idéal de justice et de cohabitation, l’autrice y fait entendre des voix habitées par la souffrance mais traversées d’espoir, incarnant le rêve d’un avenir partagé sur cette terre plurielle.

L’écriture de Nadia Agsous est traversée par la tension entre l’enracinement et l’errance, la mémoire et l’émancipation, la blessure et la réparation. Son style mêle le souffle poétique à la précision sociologique, la narration fictionnelle à la réflexion politique. Elle conçoit également un atelier de lecture intitulé Des mots et des idées. Lire pour dire, dans lequel elle invite à penser ensemble, à lire pour mieux dire le monde, à travers une approche collective, critique et libératrice de la littérature.

Femme de lettres, de pensée et de terrain, Nadia Agsous développe une œuvre dense et cohérente, nourrie par la richesse des parcours migratoires, les contradictions de l’Histoire, et le désir inlassable de faire dialoguer les mondes. Sa voix, singulière et résolument contemporaine, s’impose comme une passerelle entre les langues, les cultures et les imaginaires.

Dans cet entretien, Nadia Agsous nous ouvre les portes de son univers pluriel, à la fois littéraire, journalistique et engagé. Elle explore à travers ses ouvrages et ses émissions des questions essentielles liées à l’identité, à la mémoire, à la migration et au vivre-ensemble. Avec une sensibilité aiguë et une réflexion nourrie par une solide formation universitaire, elle nous invite à mieux comprendre les enjeux culturels et sociaux qui traversent nos sociétés contemporaines.

Le Matin d’Algérie : Votre parcours croise littérature, sociologie et journalisme. Comment ces approches se nourrissent-elles mutuellement dans votre manière d’écrire, de penser et de transmettre ?

Nadia Agsous : Je situerai mon parcours à l’articulation de ces trois disciplines qui dialoguent et influencent ma façon de conceptualiser et de communiquer. La littérature me permet de manier la langue, d’explorer la richesse des images et des nuances, tout en plongeant dans la profondeur des émotions et des récits individuels. Elle insuffle ainsi une dimension émotionnelle et narrative à mes écrits. La sociologie, quant à elle, me fournit les outils nécessaires pour comprendre les dynamiques sociales (L’Ombre d’un doute, 2021, et Nulle terre ailleurs, 2023). Elle permet également de comprendre comment se construisent les identités et les rapports de pouvoir (L’Ombre d’un doute notamment). Le journalisme, pour sa part, m’oblige à une rigueur de méthode et une exigence de clarté, de précision et de concision dans la restitution des faits.

À ces trois disciplines, j’ajouterais l’histoire, la psychologie et les arts visuels. L’histoire est un moyen de nous immerger dans le temps et de comprendre le présent à travers le passé. La psychologie, quant à elle, apporte un éclairage sur les sentiments et les motivations intérieures des personnages, leur conférant une profondeur émotionnelle. Les arts visuels apportent une dimension esthétique et émotionnelle qui enrichit l’expérience de lecture.

Ces différentes influences interagissent de manière complémentaire. Chacune d’entre elles influence ma manière de conceptualiser le monde et de le retranscrire, apportant une perspective supplémentaire, voire nouvelle, qui enrichit ma réflexion, mon écriture fictionnelle, poétique ou journalistique, ainsi que le genre littéraire que je choisis (nouvelles, romans, poésie, etc.).

Le Matin d’Algérie : Votre premier ouvrage, Réminiscences, mêle prose, poésie et dessins, offrant une expérience artistique plurielle. Qu’est-ce qui vous a poussé à choisir ce format hybride pour votre premier livre, et quel message souhaitiez-vous transmettre à travers ce dialogue entre mots et images ?

Réminiscences est mon premier ouvrage publié. Dès 2012, mon intérêt pour la combinaison du texte (qu’il s’agisse de prose ou de poésie) et de l’image était manifeste. J’ai donc opté pour un format hybride, car il reflète naturellement ma façon de voir, d’interpréter et d’exprimer le monde. Je crois fermement que l’expression des souvenirs, des idées et des émotions ne peut se faire pleinement qu’à travers l’interaction de plusieurs langages artistiques. 

La prose littéraire, dont le terme vient du latin prosa, qui signifie « direct » ou « allant tout droit », évoque la narration, c’est-à-dire l’art de raconter une histoire. La poésie, quant à elle, est un genre littéraire qui utilise un langage rythmique et imagé pour exprimer des idées, des émotions et des sensations. Le dessin est un mode de représentation et de communication visuelle qui invite à une sorte de contemplation silencieuse. Ce dialogue entre les mots et l’image permet de mieux saisir le sens des réminiscences. La combinaison du texte et de l’image remplit une fonction de complémentarité narrative à deux niveaux. D’une part, les deux genres se relaient, chacun apportant des informations qui enrichissent le sens et la compréhension du contenu. D’autre part, l’intégration d’images dans un texte permet d’introduire une dimension esthétique qui le rend plus agréable à lire et suscite l’envie de le parcourir.

Le Matin d’Algérie : Dans Des Hommes et leurs Mondes, vous dialoguez avec le sociologue Smaïn Laacher autour de l’expérience migratoire. Qu’avez-vous découvert ou compris de nouveau en traversant ces récits d’exil à travers sa pensée ?

Nadia Agsous : Présenté sous forme d’entretiens avec le sociologue, cet essai était l’occasion d’objectiver la question migratoire et de l’aborder de manière humaine. L’objectif était de vulgariser les travaux et les idées de Smain Laacher de manière à les rendre accessibles au plus grand nombre.

Grâce à mes discussions avec lui et à la lecture de ses travaux, j’ai pu avoir une compréhension plus nuancée du phénomène migratoire, rompant ainsi avec les idées reçues véhiculées par le sens commun et les clichés simplistes. Les analyses de Smain Laacher mettent en lumière la complexité, la pluralité des parcours migratoires. Cette approche permet de replacer les migrant·e·s dans une perspective humaine et de les considérer comme des êtres humains dotés d’histoires singulières. À travers la parole de Smain Laacher, cet ouvrage invite à comprendre la complexité des histoires de vie des migrant·e·s, souvent traité·e·s comme des indésirables. Il invite à prendre de la distance par rapport aux idées reçues et aux jugements hâtifs à leur sujet. 

Le Matin d’Algérie : L’Ombre d’un doute interroge la mémoire collective et son poids sur les identités individuelles. Que représente pour vous Bent’Joy, cette ville fictive, et pourquoi avoir choisi la fiction pour traiter un sujet aussi politique et intime ?

Nadia Agsous : Bent’Joy est une ville millénaire, légendaire et mythique. Elle joue deux rôles. Elle constitue le cadre spatial du roman et incarne un personnage. Bent’Joy signifie « fille de joie » : bent, « fille » en arabe, et joy, « joie » en anglais. Ces deux mots appartiennent à des familles de langues différentes : l’arabe, une langue sémitique, et l’anglais, une langue indo-européenne germanique.

Pourquoi ce nom ? Tout d’abord, il fait référence à la beauté du paysage de la ville, entourée par la mer et la montagne sacrée. C’est une ville belle, attirante et attachante.

Deuxièmement, il renvoie à la joie de vivre des Bent’Joyiens, de bons vivants malgré leur pauvreté et le mépris de la famille royale.

Enfin, il fait référence au passé de Bent’Joy, lorsque la ville était reconnue comme un centre de rayonnement culturel et intellectuel où l’on enseignait la liberté et où l’on exaltait la libre pensée. Cette philosophie avait profondément imprégné les Bent’Joyiens. Si Bent’Joy s’inspire de la ville de Béjaïa pour son paysage, elle émerge comme une ville universelle. Elle peut se situer partout où sévissent des dictateurs et où des peuples obéissent aveuglément aux ordres de tyrans. Cette approche permet d’échapper aux particularismes pour favoriser l’universel.

Bent’Joy est également le lieu de la mémoire collective bent’joyienne. C’est un espace de tensions identitaires où le passé et le présent coexistent de manière conflictuelle, du moins pour le jeune protagoniste qui refuse d’endosser l’identité collective héritée et choisit de la reconfigurer pour construire son identité personnelle. Grâce à cette démarche, il parvient à insuffler un vent de renouveau dans sa ville, prisonnière d’un passé stérilisant depuis des lustres. Le choix de la fiction pour aborder ce sujet sensible et complexe est pertinent, car il offre une liberté créative. 

La fictionnalisation de la politique est une stratégie qui permet de contourner la censure en utilisant des procédés narratifs et littéraires comme les métaphores, les contes, les allégories, les allusions… Un récit fictif est un moyen efficace pour sensibiliser les lectrices et les lecteurs à des enjeux historiques, politiques ou sociaux, et d’encourager la réflexion et l’esprit critique.

Le Matin d’Algérie : Dans Nulle Terre Ailleurs, vous proposez un plaidoyer pour la paix à Al-Qods/Jérusalem. Qu’est-ce qui vous a poussée à choisir cette ville comme décor symbolique de votre roman ?

Nadia Agsous : Nulle Terre Ailleurs est un roman qui raconte la Palestine et les Palestiniens à travers l’expérience de Thayri, la narratrice, lors de son premier voyage à Al-Qods/Jérusalem. Mon premier contact avec cette ville m’a procuré un apaisement de l’esprit et une paix intérieure. Il m’a donc semblé évident que l’action de mon roman se déroulerait dans cette ville. Al-Qods (la « ville de la sainteté ») et Jérusalem (la « ville de la paix ») sont le théâtre de la « tragédie moderne » qui se poursuit depuis la Nakba (la « catastrophe » de 1948 pour les Palestiniens). C’est une ville mythique, spirituelle et symbolique, « trois fois sainte », qui rassemble les trois religions monothéistes.

Pour les chrétiens, c’est le lieu où Jésus-Christ est mort et ressuscité, et c’est dans l’église du Saint-Sépulcre que se trouve son tombeau. Pour les juifs, c’est la ville où le roi Salomon a construit le Grand Temple, le Beit ha-Mikdash, considéré comme la « maison de la sainteté ». Pour les musulmans, c’est la troisième ville sainte après La Mecque et Médine. C’est à Al-Qods que s’est déroulé le voyage nocturne (Isrâ) du prophète Mahomet, qui l’a conduit de La Mecque à Jérusalem, puis son ascension céleste (Lailat al-Miraj) sur Bouraq, un animal fantastique venu du paradis.

Al-Qods-Jérusalem appartient à tous. C’est une ville aimée, convoitée et désirée, qui est toujours au cœur des passions. Selon Thayri, c’est une « ville antique au présent tumultueux, peuplée d’ombres ambulantes qui errent dans les bas-fonds de l’histoire ». Dans mon roman, j’ai nommé Al-Qods-Jérusalem « Nulle Terre Ailleurs », une expression qui désigne non seulement l’ouvrage, mais aussi ce lieu unique où se déroule l’histoire et qui symbolise l’enracinement profond et ancestral des Palestiniens sur cette terre. Cette ville, qui incarne la tragédie, la mémoire et l’espoir du peuple palestinien, m’est apparue comme le lieu idéal pour un plaidoyer en faveur de la paix et du vivre-ensemble.

Le Matin d’Algérie : En tant qu’écrivaine engagée pour la justice et le vivre-ensemble, comment percevez-vous aujourd’hui ce que traverse Gaza, et quelle place la littérature peut-elle avoir face à une telle tragédie humaine et politique ?

Nadia Agsous : La situation à Gaza est dramatique, voire catastrophique. Ce que vivent les Gazaouis est une tragédie humaine et politique d’une gravité extrême. Les violences, la souffrance, la faim, les injustices subies, ainsi que l’indifférence et le mépris dont fait preuve une grande partie de la communauté internationale à l’égard de la population gazaouie révèlent un drame profond dans lequel la vie de femmes, d’hommes et d’enfants est mise à l’épreuve. Dans ce contexte bouleversant, l’écriture s’impose comme une urgence, une nécessité vitale pour donner une voix à celles et ceux qui subissent ces atrocités.

Écrire est un témoignage, un acte de résistance, de solidarité et d’empathie, un signe d’espérance. Essais, poèmes, nouvelles, romans, chants, correspondances, journaux intimes et témoignages sont autant de traces qui transmettent l’histoire d’une génération à l’autre.

L’écriture devient alors un outil d’expression, de témoignage, de mémoire et de résilience. Son rôle n’est pas de tuer, car nul n’a le droit de priver des femmes, des hommes et des enfants de la vie ; son but est de résonner pour réveiller les consciences et dire non collectivement à cet acharnement sur toute une population qui dépasse tout entendement, avec la complicité des puissants qui dirigent le monde.

Le Matin d’Algérie : Vous donnez souvent la parole à des figures marginalisées ou invisibles, notamment dans vos articles et entretiens. Pourquoi ce choix d’orientation ?

Nadia Agsous : L’objectif est de donner la parole à des personnes trop souvent réduites au silence. Mettre en avant des récits négligés, ignorés, marginalisés ou oubliés, c’est adopter une démarche humaine et inclusive, fondée sur la prise en compte et la reconnaissance des paroles réduites au silence et/ou négligées. En créant un espace d’expression pour celles et ceux qui n’ont pas eu l’occasion de s’exprimer ou qui en ont été privés, il s’agit de les sortir de l’invisibilité, de leur redonner du pouvoir, de rendre justice à leur vécu et de favoriser le partage d’expériences.

Il est important de souligner que ma démarche ne se limite pas aux seules personnes invisibilisées. J’ai mis en avant des personnalités de renom, comme Boualem Sansal, à qui j’ai consacré plusieurs articles et entretiens, et j’ai organisé plusieurs conférences autour de ses romans. Je peux également citer Yasmina Khadra, Edward Wadie Saïd, Sonallah Ibrahim, Colette, Marguerite Duras, Michel Foucault, et bien d’autres encore. Mes chroniques littéraires, publiées dans le supplément culturel « Art et Lettres » de La Cause littéraire et dans de nombreux autres médias, notamment numériques, témoignent de mon intérêt pour les autrices et les auteurs, qu’ils soient connus ou débutants.

Le Matin d’Algérie : Vous animez un atelier de lecture intitulé Des mots et des idées. Lire pour dire. Quelle place accordez-vous à la lecture partagée dans les processus de transformation individuelle ou collective ?

Nadia Agsous : « Des mots et des idées. Lire pour dire » est un événement littéraire qui célèbre la littérature vivante et l’art de la narration. Il met à l’honneur des autrices et des auteurs qui lisent un extrait de leur roman, nouvelle ou poème, seuls ou à deux. C’est l’occasion pour eux et elles de se faire connaître, de faire découvrir leur univers littéraire, d’échanger avec le public et d’accroître leur visibilité. C’est aussi l’occasion de rencontrer des passionné·e·s de littérature. Ces lectures sont généralement suivies d’une discussion avec le public, favorisant ainsi des échanges enrichissants.

En résumé, ces rendez-vous littéraires sont bien plus que de simples lectures. Ils sont une célébration de la littérature, offrent un espace de dialogue et invitent à explorer ensemble la richesse des imaginaires et des mots. 

La lecture partagée permet de créer un espace de rencontre, de partage et d’échange autour du texte. C’est l’occasion de créer une communauté de lectrices et de lecteurs qui permet à chacun de s’approprier la parole de l’autre, de remettre en question ses propres représentations et de s’ouvrir à d’autres sensibilités. Lire, c’est aussi renouer avec la tradition orale. Lire ensemble, c’est apprendre à écouter, à s’écouter, à dialoguer et à débattre. Cette approche à la fois individuelle et collective offre la possibilité de se découvrir à travers l’autre. En somme, la lecture est une source de transformation profonde.

Le Matin d’Algérie : Vous êtes la conceptrice et animatrice des émissions AlternaCultures et L’Interview sur AlternaTV, une chaîne alternative diffusée sur les réseaux sociaux. Quel est pour vous l’intérêt de ce format et comment ces émissions s’inscrivent-elles dans votre engagement médiatique et culturel ?

Nadia Agsous : Avec AlternaCultures, L’Interview et Des mots et des idées. Textes lus par Nadia Agsous, ces trois émissions diffusées sur AlternaTV me permettent d’explorer des sujets et des thèmes qui me passionnent. Je sélectionne généralement des sujets qui me plaisent. J’ai souhaité faire l’expérience de l’audiovisuel et c’est AlternaTV qui m’a offert cette opportunité. J’ai appris sur le tas et je continue à apprendre.

AlternaTV est une télévision alternative qui émet sur les réseaux sociaux (Facebook et YouTube). Elle aborde des sujets divers et variés et également des sujets considérés comme tabous en donnant la parole à celles et ceux qui font l’histoire mais qui restent invisibles en raison de leur exclusion du débat public.

L’objectif est donc de favoriser un espace d’expression riche, libre et affranchi des censures, des contraintes, des limites et des formats imposés par les médias traditionnels. Mes émissions permettent de mettre en valeur des initiatives culturelles en mettant en avant des autrices et des auteurs. Cela se concrétise en les accueillant sur le plateau d’AlternaTV, mais aussi en lisant des passages de leurs ouvrages, comme c’est le cas dans l’émission « Des mots et des idées ». Textes lus par Nadia Agsous. » À ce jour, j’ai présenté et lu plus de cinquante autrices et auteurs du monde entier.

En résumé, mes émissions s’inscrivent dans un engagement citoyen à travers la culture, la littérature, les idées, la musique, le cinéma, les arts et d’autres médias culturels qui constituent autant d’outils de reconnaissance des expressions culturelles diverses, d’éveil critique, de dialogue, d’ouverture et de lien social.

Le Matin d’Algérie : Dans un monde saturé d’images et d’immédiateté, quelle est, selon vous, la mission du roman aujourd’hui ?

Nadia Agsous : Le roman permet de ralentir le temps, de faire une pause sur une période donnée, sur des expériences humaines, afin de prendre du recul. Le roman ne se contente pas de refléter la réalité. Il bouscule la réalité pour questionner la frontière entre le réel et le fictif.

Ce genre littéraire devient ainsi le biais par lequel nous ouvrons un espace d’imagination, de réflexion et d’introspection pour questionner la condition humaine et approfondir la conscience humaine et sociale. C’est un lieu privilégié pour réfléchir à l’existence et aux rapports humains. Un roman est censé nous enrichir, nous étonner, bousculer nos habitudes, ébranler nos certitudes et nous faire réfléchir au monde qui nous entoure. Le roman ne devrait pas être un simple produit de consommation. Il doit nous sublimer. Il a pour rôle de nous transfigurer.

Le Matin d’Algérie : En tant que journaliste et intellectuelle franco-algérienne, quel regard portez-vous aujourd’hui sur la situation politique en Algérie, notamment concernant les aspirations démocratiques et le sort réservé aux détenus d’opinion ?

Nadia Agsous : La justice, la dignité et la liberté finissent toujours par l’emporter, comme l’histoire l’a amplement démontré. 

Le Matin d’Algérie : Avez-vous des projets en cours ou à venir ?

Nadia Agsous : Je réfléchis à mieux organiser les événements que j’anime actuellement. Plusieurs projets d’écriture sont en cours, et d’autres devraient bientôt se concrétiser, je l’espère. 

Entretien réalisé par Brahim Saci

https://www.youtube.com/@alternatv-atv

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