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vendredi 15 août 2025
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Le marché aux migrants de Donald Trump

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Connaissez-vous le Royaume d’Eswatini ? C’est un petit État enclavé entre la frontière orientale de l’Afrique du Sud et le Mozambique, d’une superficie totale de 17.360 km2, avec 1,4 million d’habitants. Anciennement appelé Swaziland, il est depuis 1986 dirigé d’une main de fer par un dictateur corrompu, le Roi Mswati III. Si on en parle tant  dans les  journaux aujourd’hui, c’est en raison de son lien avec Donald Trump qui ne sait sans doute pas où se trouve Eswatini sur la carte du monde.

En effet, alors que le rapport annuel du Département des USA sur ce pays  dénonçait des cas de détentions arbitraires, d’homicides pour des raisons politiques, de tortures, de traitements cruels des forces de sécurité et de très mauvaises conditions de vie dans les prisons, Donald Trump a signé avec lui un accord secret pour qu’il reçoive sur son territoire des délinquants et des citoyens en attente d’être jugés aux USA. Après la construction en Floride d’un centre de rétention dans un marécage entouré de reptiles, Donald Trump veut,  grâce au mirage des dollars, passer au-dessus des lois qui dans les démocraties, veillent à ce que les déportations respectent les droits de l’homme,

Fin juillet 2025, cinq déportés sont arrivés en Eswatini, originaires de Cuba, de Jamaïque, du Laos, du Vietnam et du Yémen. Le 1er août 2025, l’un d’entre eux appelle sa famille à La Havane au téléphone mais il ne peut pas parler longtemps ni renseigner sur sa situation.

Il s’agit de Roberto Mosquera, âgé de 58 ans, arrivé aux USA à l’âge de 13 ans. Condamné deux fois à des peines de prison allant du vol de voiture à l’assassinat. Il les a effectuées entre 1989 et 1996 et 2010 et 2012. Détenu le 16 juin 2025, il est expulsé le 14 juillet à Eswatini qui se trouve  à 13.000km de Miami où vivent  sa mère et sa modeste famille qui ne pourront pas venir le voir. 

L’opposition et les défenseurs des droits de l’homme d’Eswatani ne comprennent pas pourquoi cinq étrangers sont arrivés dans les prisons de leur pays sur le seul fait d’un accord entre le gouvernement Trump et les autorités locales. En Afrique du Sud, Etat voisin, le gouvernement craint que d’autres déportations puissent constituer un risque pour la sécurité du pays.

Le cas de Mosquera n’est pas une exception. Donald Trump a trouvé en Afrique et en Amérique latine des opportunités  pour continuer sa politique de déportation de migrants dans des territoires lointains, à l’abri du regard de la presse et des défenseurs des droits de l’Homme, en signant  avec certains pays un accord secret. Pour l’instant, les pays ayant accepté de recevoir ces déportés sont le Mexique, le Guatemala, le Salvador, le Costa Rica, le Panama, le Soudan du Sud, le Rwanda et le Kosovo. Le Nigeria a refusé de recevoir des déportés et de participer à ce marché sordide mais Trump n’a pas reculé et il a sollicité honteusement l’Ukraine, la Moldavie, la Géorgie, la Tunisie, le Maroc et la RDC. Attendons de voir ce qu’ils  feront.

Les ONG, les groupes de défense des droits de l’homme et les experts juridiques des USA s’alarment face à ce qui se passe  et affirment que ces déportations vers une nation qui n’est pas le lieu d’origine du migrant pourraient violer le droit international.

Le professeur Ray Brescia, de la faculté de droit d’Albany (États-Unis, affirme que ”le concept d’expulsion vers un pays tiers doit être considéré à la lumière du concept plus large d’asile » mais, ajoute t-il, « il existe un principe de droit international – le non-refoulement – qui signifie que l’on n’est pas censé renvoyer quelqu’un dans son pays d’origine s’il n’est pas certain pour lui qu’un pays tiers pourrait constituer une option sûre”.

Le  Professeur David Super, du centre juridique de l’Université de Georgetown, interrogé  par BBC News sur la légalité de l’expulsion vers un pays  tiers, considère quant à lui que les expulsions vers l’Eswatini et le  Sud Soudan posent de sérieuses questions sur le respect du droit international.

En effet, lorsque des migrants ont été pour la première fois déportés  au Soudan-Sud, en mai 2025, un recours en justice a été déposé devant un tribunal de district alors que le vol avait déjà décollé. Le juge a estimé que les tentatives d’expulsion des déportés avaient violé son ordonnance selon laquelle ces derniers devaient être autorisés à contester leur expulsion vers des pays tiers.

L’avion a été dérouté vers Djibouti, sur la côte est de l’Afrique, où les hommes ont été détenus dans un conteneur d’expédition pendant que l’affaire était entendue. Elle a été renvoyée devant la Cour suprême, qui a autorisé les expulsions mais n’a pas précisé si le Sud-Soudan était considéré comme un lieu sûr pour les déportés.

Pour l’instant, on ne sait toujours pas ce que  sont devenus les cinq déportés à Eswatini. Un avocat représentant le  groupe d’avocats qui les défend s’est présenté devant la prison où il  pense qu’ils sont  détenus. Mais l’accès lui a été barré.

Ces péripéties vont probablement se multiplier. Donald Trump n’écoute personne et se fiche du droit international, il veut juger lui-même. Comme il le fait en politique étrangère en soutenant Vladimir Poutine qui veut reconstruire l’Empire des Tsars ou Benyamin Netanyahu qui voit dans la Bible les frontières d’Israël, Donald Trump veut traiter les délinquants et les migrants, qu’ils soient innocents ou jugés coupables de crimes par des tribunaux, comme des populations que l’on peut vendre ou acheter. 

Il croit pouvoir ramener le monde à la féodalité ou aux pires moments du colonialisme.

Emile Martinez

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