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jeudi 21 août 2025
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Djamel Sabri, la voix rebelle du rock chaoui

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Une guitare rugit dans les montagnes des Aurès, une voix s’élève, puissante et indomptable. Djamel Sabri ne se contente pas de chanter : il défie, revendique et fait vibrer la langue chaouie avec une énergie brute et électrique.

Né à Oum El Bouaghi, au cœur d’une région façonnée par la résistance et la mémoire orale, Sabri grandit entouré des chants de ses grands-parents et des récits de son arrière-grand-père, compagnon du légendaire Aïssa Djermouni. Dès l’adolescence, il se plonge dans la culture amazighe et compose ses premières mélodies au lycée d’Aïn Beïda. Sa passion pour la musique devient alors un acte de préservation et d’affirmation identitaire. Son premier album, Yemma El Kahina (1982), rend hommage à la reine guerrière symbole de résistance et marque le début d’un parcours qui ne ressemble à aucun autre dans la musique algérienne.

En 1980, Sabri fonde le groupe Les Berbères, pionnier du rock chaoui. Sous l’impulsion du parolier El Hadj Tayeb, leurs chansons sont exclusivement en langue chaouie, affirmant une identité longtemps reléguée aux marges. Leur énergie et leur son nouveau séduisent rapidement le public, jusqu’à une tournée en France qui scelle leur réputation.

Mais à leur retour en 1986, le groupe se dissout sous les pressions du pouvoir, qui exige que Sabri chante en arabe. Il refuse, fidèle à sa langue et à sa vision artistique. « Les corbeaux s’envolent en groupe, mais l’aigle s’envole tout seul », aime-t-il à répéter, dessinant le portrait d’un artiste indépendant et obstiné.

Son deuxième album, Bachtola (1990), propulse Djamel Sabri sur la scène nationale. Le morceau phare raconte l’histoire d’un homme prêt à défier sa tribu pour l’amour de sa bien-aimée, mêlant légende aurésienne et énergie rock. Ce succès lui vaut le surnom de « Mick Jagger algérien », reflet de son charisme et de sa puissance scénique. Ses albums suivants, Amghar (1999) et Silineya (2003), prolongent son exploration musicale, fusionnant riffs électriques et mélodies ancestrales, poésie et contestation sociale. Chaque album témoigne de son engagement artistique et de son refus des compromis : la musique pour Sabri est un acte de résistance et de liberté.

Surnommé « l’Aigle des Aurès », Djamel Sabri est devenu une figure emblématique du rock chaoui et de la culture amazighe vivante. En 2021, le centre de recherche en langue et culture amazighes de l’université de Béjaïa organise un hommage au campus d’Amizour pour célébrer quarante ans de carrière, saluant une trajectoire unique dans l’histoire de la musique algérienne. Cet hommage reconnaît enfin l’importance de son œuvre, qui a traversé les décennies en restant fidèle à ses racines.

Mais l’héritage de Djamel Sabri ne se limite pas au passé. La chanson Bachtola connaît une nouvelle jeunesse grâce au DRP Choir, un groupe de jeunes talents de la wilaya de Bordj Bou Arréridj. Leur reprise audacieuse, qui mêle tradition musicale et sons contemporains, a été visionnée par plus de 1,3 million de personnes sur TikTok. Cette popularité soudaine prouve que la musique de Sabri continue de toucher et d’inspirer de nouvelles générations, tout en affirmant la vitalité du patrimoine amazigh dans un contexte moderne.

La carrière de Djamel Sabri est celle d’un artiste qui refuse de plaire à tout prix, qui choisit la fidélité à sa langue et à sa culture plutôt que le compromis. Sa musique est un pont entre les générations et un témoignage vivant de la résistance culturelle.

Les riffs électriques se mêlent aux récits des anciens, chaque chanson devenant un acte de mémoire et un geste politique. Sa voix, toujours intense, rappelle que l’art peut être un outil de liberté, capable de traverser les époques et de fédérer les communautés autour d’une identité partagée.

Discographie essentielle

Yemma El Kahina (1982)

Bachtola (1990, réédition 2011)

Amghar (1999, réédition 2011)

Silineya (2003)

Aujourd’hui encore, Djamel Sabri reste une figure respectée et admirée. Il incarne la résistance artistique face aux pressions politiques et culturelles, la fierté amazighe et l’innovation musicale. À travers ses chansons et leur transmission aux nouvelles générations, son œuvre prouve que la musique peut être à la fois un vecteur de plaisir et un instrument de mémoire, un outil de revendication et un chant d’espoir.

Djamal Guettala

Vedio Reprise Bachtola par le Groupe DRP

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2 Commentaires

  1. La rébellion (incarnée par Djamel SABRI) contre L’OPPRESSION et la CASTRATION culturelle et artistique est une constante du régime depuis 1962…Mais des DS voient le jour ça et là chaque jour que la providence fait
    La rébellion GOES ON…!

  2. Djamel Sabri, Interdit de chanter chez lui pendant les annees 80-90 alors que les danseuses du ventre libanaise chantaient sur place a coups de petrodollars. qui vas payer pour cette trahison ????

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