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lundi 20 octobre 2025
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L’OMI confrontée à des producteurs de pétrole

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Des pays majoritairement producteurs de pétrole ont réussi à faire reculer d’un an l’adoption d’une réglementation qui aurait permis une décarbonisation totale dans le transport maritime vers 2050.

Après quatre jours d’intenses négociations, les États-Unis, la Russie, l’Arabie saoudite, et d’autres pays ont réussi le 17 octobre à bloquer une taxe mondiale sur les émissions de gaz à effet de serre du transport maritime. La proposition de reporter d’un an le vote sur l’adoption de la nouvelle réglementation a été portée au vote par l’Arabie Saoudite et l’Organisation maritime internationale (OMI) a ajourné sa réunion.

Cette situation contraste avec ce qui s’était produit en avril. Le secrétaire général de l’OMI, Arsenio Dominguez, exultait alors quand plusieurs des plus grandes nations maritimes du monde avaient décidé d’imposer une taxe minimale de 100 $ US pour chaque tonne de gaz à effet de serre émise par les navires au-delà de certains seuils.

L’OMI estimait que cette première taxe mondiale sur les émissions de gaz à effet de serre, qui devait être entérinée le 17 octobre, générerait des recettes annuelles entre 11 et 13 milliards $ US qui devaient être versées au fonds « zéro émission nette ». Cet argent devrait soutenir des pays en développement et investir dans un transport maritime vert. Le plan contraindrait dès 2028 les navires à réduire progressivement leurs émissions, jusqu’à la décarbonisation totale vers 2050. Il devrait changer la situation actuelle alors que les émissions du transport maritime ont augmenté au cours de la dernière décennie pour atteindre environ 3 % du total mondial.

Forte réaction des producteurs de pétrole

Ce report arrive à la fin d’une semaine de tractations à Londres, alors que les États-Unis ont menacé de pénalités commerciales, de restrictions de visas ou de frais portuaires supplémentaires les délégations qui voteraient pour le projet. « Les États-Unis ne toléreront pas cette nouvelle taxe écologique mondiale frauduleuse sur le transport maritime », a affirmé à ce sujet Donald Trump.

Le ministre français des Transports, Philippe Tabarot, a dénoncé les actions pour faire dérailler l’accord. Il considère que c’est un très mauvais signal. C’est que ces pressions pourraient convaincre des pays qui seraient en position de faiblesse.

De plus, Washington proposait un changement de procédure pour l’acceptation de ce projet. Les nouvelles réglementations de l’OMI sont considérées comme acceptées (l’acceptation tacite) sauf si un tiers de ses 176 membres ou l’équivalent de la moitié de la flotte marchande mondiale déclarent s’y opposer. Les États-Unis proposent une « acceptation explicite », qui demanderait que deux tiers des pays votent pour l’adoption. Le représentant brésilien a dénoncé en plénière les méthodes américaines, disant espérer que cela ne remplacera pas la manière habituelle de prendre des décisions au niveau mondial.

Les actions des membres de l’administration Trump face à cette nouvelle réglementation sont compréhensibles puisque la quasi-totalité des accords commerciaux qu’elle signe oblige l’achat de gaz ou de pétrole américain. Le directeur des programmes internationaux au sein du Natural Resources Defense Council, Jake Schmidt, affirme qu’« on observe une tentative plus systématique d’intégrer une stratégie de priorité aux énergies fossiles dans toutes leurs actions. »

L’ancienne envoyée spéciale de l’Allemagne pour le climat, Jennifer Morgan, considère que les membres de cette administration « utilisent clairement divers instruments pour tenter d’accroître la consommation mondiale d’énergies fossiles, au lieu de la réduire. » Un exemple de cela serait l’accord commercial avec l’Union européenne que l’administration Trump a conclu le mois dernier. En échange de réduire certains droits de douane, elle a imposé l’achat de 750 milliards de dollars de pétrole et de gaz américains sur trois ans.

Un an pour régler le problème

Le secrétaire général de l’OMI, Arsenio Dominguez a réagi laconiquement à ce report. « Je n’ai pas grand-chose à vous dire pour l’instant. Ça n’arrive pas souvent. » Il se déclare engagé à trouver un moyen d’avancer normalement.

La chef de la diplomatie climatique chez Opportunity Green, Emma Fenton, invite les pays à continuer à faire preuve de l’esprit de solidarité dont ils ont fait preuve en avril.

D’autres acteurs du domaine sont prêts à relever leurs manches. « Ce n’est pas une très bonne nouvelle, mais le travail continu dès la semaine prochaine sur le contenu du texte », affirme la déléguée générale de l’association Wind Ship, Lise Detrimont, « Il s’agit maintenant de faire en sorte que ce qui bloque aujourd’hui soit plus abouti dans un an. » L’organisme, qui développe le marché des navires propulsés par le vent, considère que beaucoup d’efforts ont été faits à partir de 2015 pour réduire l’intensité carbone de chaque navire. Malheureusement, les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter en raison de l’augmentation du trafic. « C’est pour cela qu’il faut des navires très fortement décarbonés, si on veut réussir à réduire l’empreinte du transport. »

« En approuvant une norme mondiale sur les carburants et un mécanisme de tarification des gaz à effet de serre, l’OMI a franchi une étape cruciale pour réduire l’impact climatique du transport maritime », affirme Natacha Stamatiou de l’Environmental Defense Fund.

« En votant pour l’adoption de ce cadre, les gouvernements entreront dans l’histoire avec la première tarification mondiale du carbone et ouvriront la voie à la réduction de l’impact mondial du transport maritime sur le climat », a expliqué John Maggs, représentant de la Clean Shipping Coalition à l’OMI.

Michel Gourd

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