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Le miroir numérique que le régime algérien ne supporte pas

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Le pouvoir parle de modernité, mais redoute surtout ce qu’elle révèle. La numérisation n’éclaire pas le pays, elle expose ses zones d’ombre. Et c’est cette lumière-là que le régime ne supporte pas.

La machine, la numérisation, l’IA : en Algérie, tout cela n’est qu’un prétexte commode. Ce qui inquiète vraiment, ce n’est pas ce que ces outils savent faire, mais ce qu’ils pourraient rendre visible, le retard soigneusement entretenu, la paresse intellectuelle devenue réflexe, la vieille garde qui n’a jamais dépassé le stade du fichier imprimé, tamponné, béni par la bureaucratie. La modernité ne fait pas peur. Le miroir qu’elle tend, si.

En réalité, le pouvoir ne vit pas à l’ère de l’intelligence artificielle. Il vit dans celle de la pseudo-numérisation, cette modernité de carton qui scanne le désordre au lieu de le corriger. Numériser, chez nous, ce n’est pas transformer. C’est archiver la médiocrité, convertir la corruption en PDF, mettre le piston en ligne, stocker l’arbitraire dans un serveur. Le cachet a changé de forme, pas de fonction. Le régime de décision reste inchangé : opaque, lent, clientéliste, verrouillé comme une vieille armoire dont personne n’ose ouvrir les tiroirs.

La numérisation version pouvoir n’a jamais été pensée pour libérer. Elle a été conçue pour resserrer. Centraliser les données, tracer les citoyens, croiser les fichiers, automatiser la suspicion. Ce qu’ils appellent “transition numérique” n’est, en réalité, qu’une prolongation technique du vieux réflexe policier : voir, classer, bloquer. Dans leurs mains, la technologie ne sert ni l’efficacité ni la transparence. Elle sert la mise au pas. C’est la bureaucratie qui se dote d’une loupe, pas d’un cerveau.

L’intelligence artificielle, elle, reste un horizon lointain pour cette machine d’État. Non pas parce qu’elle serait trop complexe, mais parce qu’elle est politiquement ingérable. Une IA réelle ne respecte ni les rangs ni les réseaux ni les héritiers. Elle compare, détecte, expose les anomalies. Elle ferait s’effondrer tout le système de l’exception permanente, du passe-droit discret, de l’ordre maintenu par le flou et l’improvisation. Voilà pourquoi ils en parleront sans cesse, mais n’en voudront jamais vraiment. Une IA qui fonctionne mettrait trop de lumière là où ils ont bâti leur confort, dans l’ombre.

Dans les cercles du pouvoir, toute technologie suit trois étapes immuables : la briser, la contrôler, la corrompre. Depuis l’indépendance, le réflexe est resté le même. L’Algérien est un suspect à gérer, jamais un citoyen à servir. On ne cherche donc jamais à comprendre ce qu’une technologie pourrait offrir à la société. On cherche seulement comment l’intégrer au circuit des privilèges et comment l’utiliser pour surveiller davantage. Ce qui ne peut pas être récupéré est bloqué. Ce qui ne peut pas être bloqué est sali. Ce qui échappe est criminalisé. La modernité, ici, n’est jamais adoptée. Elle est capturée, détournée, neutralisée.

Les mêmes qui n’arrivent pas à faire fonctionner une plateforme administrative sans qu’elle s’effondre prétendent numériser le pays. Ils confondent souveraineté avec centralisation, modernité avec communication, gouvernance avec affichage. Ils croient que poser un écran, lancer une application, annoncer un “programme national” suffit à faire entrer l’Algérie dans le futur. Ils ne font que déplacer l’échec d’un bureau à un serveur.

La jeunesse, elle, n’attend plus rien de cette comédie. Elle utilise, apprend, contourne. Elle vit déjà dans un monde d’automatisation, d’outils rapides, de raisonnement distribué. Elle avance pendant que le système débat encore de cadres juridiques pour des réalités qui le dépassent. Et c’est précisément cette autonomie qui affole le pouvoir : une génération qui n’a plus besoin de lui pour comprendre, produire, collaborer. Une génération débranchée de leur tutelle.

Le conflit est là. Non pas entre l’Algérie et la technologie, mais entre un système qui ne survit que par le verrouillage et une société qui aspire à l’usage libre. Entre un pouvoir qui a besoin de lenteur pour durer et une jeunesse qui vit dans l’instant, la vitesse, l’adaptation permanente.

Ce pays ne manque ni de cerveaux ni de compétences ni d’outils. Il manque d’un État qui accepte enfin de ne plus être le centre de tout. Il manque d’un pouvoir qui préfère construire plutôt que surveiller. Il manque, surtout, de courage politique.

L’intelligence artificielle ne sauvera pas l’Algérie.

Mais la numérisation, telle qu’ils la pratiquent, peut parfaitement l’achever : moderniser la surveillance, automatiser l’injustice, rendre l’oppression simplement plus performante.

Car le vrai danger pour ce régime n’est pas la technologie. Le vrai danger, c’est la fin de l’obscurité organisée. Et c’est précisément là que tout peut basculer.

Une génération qui voit clair n’a plus besoin qu’on lui explique comment marcher.

Le régime peut retarder l’évidence, mais il ne peut pas stopper une société qui avance, lentement mais sûrement, vers son propre mode post-obscurité, vers un horizon post-système algérien.

Zaim Gharnati

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3 Commentaires

  1. La numérisation en Algérie n’est appliquée (avec une anarchie inextricable) qu’aux citoyen-ne-s… le régime des caporaux avec tout son arsenal de flicage de la population fait de son mieux les choses il y va de sa survie…
    pour le reste des discours que des discours…

  2. La photo se passe de tout commentaire : deux vieux dinosaures, deux vieux seniles, grabataires, libidineux qui décident pour un peuple dont 75 pour cent à moins de 30 ans

  3. QUESTION:
    « Les Kabyles correspondent-ils à la notion de peuple autochtone selon les normes internationales et constituent-ils de bons candidats à l’autonomie gouvernementale en vertu du droit international ? »

    Reponse:

    Oui, le peuple kabyle répond aux critères de « peuples autochtones » selon les normes du droit international, et les avis juridiques internationaux confirment qu’il s’agit d’un « peuple » jouissant du droit à l’autodétermination, qui est le fondement de l’autonomie.
    Statut autochtone selon les normes internationales. Bien qu’il n’existe pas de définition unique et universellement contraignante des « peuples autochtones » en droit international, les critères généralement admis reposent sur une définition de travail à laquelle le peuple kabyle satisfait :

    Continuité historique : Les Kabyles font partie des peuples amazighs (berbères), les habitants originels de l’Afrique du Nord, antérieurs aux invasions et à la colonisation qui ont suivi.

    Auto-identification : Le peuple kabyle s’identifie comme un groupe culturel et une nation autochtones distincts.

    Culture et institutions distinctes : Ils conservent une langue distincte (le kabyle/Taqbaylit), des coutumes traditionnelles, des institutions sociales et une forte identité culturelle qui les distingue de la société algérienne dominante.

    Statut de minorité : Ils constituent souvent une minorité au sein de la société algérienne et sont confrontés à la marginalisation et à la discrimination de la part de l’État.

    Attachement au territoire : Ils entretiennent un lien fort, historique et profond avec leur territoire ancestral dans la région de Kabylie, au sein des montagnes de l’Atlas.

    Le Groupe de travail international pour les affaires autochtones (IWGIA) et l’Organisation des nations et des peuples non représentés (UNPO) classent systématiquement les Amazighs, y compris les Kabyles, parmi les peuples autochtones.

    Candidature à l’autonomie en vertu du droit international
    En vertu du droit international, le peuple kabyle est considéré comme un « peuple » et constitue un candidat sérieux à l’autonomie en raison du respect de critères spécifiques et des actions documentées de l’État algérien :

    Droit à l’autodétermination : L’article 1 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et l’article 1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipulent tous deux que « Tous les peuples ont le droit à l’autodétermination. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel ». La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) affirme expressément ce droit pour les peuples autochtones à l’article 3.

    Répression et marginalisation systématiques : Des rapports soumis au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) et à l’UNPO décrivent une histoire d’exclusion systématique, d’assimilation forcée (« arabisation »), de criminalisation des mouvements politiques (comme le MAK) et de suppression de leur langue et de leur culture par le gouvernement algérien. Ces actions sont considérées comme des violations de leurs droits humains fondamentaux et constituent un argument solide au regard des principes du droit international.

    Peaceful Aspiration: The Kabyle movement has emphasized a peaceful, democratic path for autonomy or independence, engaging with international institutions like the UN and the African Commission on Human and Peoples’ Rights.

    Avis juridiques : Un avis juridique rendu par des avocats britanniques en septembre 2024 a confirmé que le peuple kabyle constitue un « peuple » ayant un droit légitime à l’autodétermination en vertu de la Charte des Nations Unies et d’autres lois internationales.

    Bien que le droit international privilégie généralement l’autodétermination interne (l’autonomie au sein d’un État existant), les cas de marginalisation profonde et de violations systématiques des droits de l’homme peuvent renforcer les revendications d’autodétermination externe (indépendance) en dernier recours. Les actions de plaidoyer et les demandes de reconnaissance formelles soumises aux instances internationales témoignent d’un effort concerté pour exercer leur droit à déterminer leur avenir politique.

    Et une demande de marriage pour toutes pour teboune et Co !!!

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