Lundi 6 mai 2019
Les coups de filets et de sifflets du général Gaïd Salah
Tandis que le mouvement citoyen revendique une crise politique qui ne peut être résolue que par la destitution de tout le système politique, le pouvoir, lui, cherche une voie de sortie par des « descentes » musclées judiciaires pétaradantes dont l’appareil, par son emballement, ses actions coups de poings et coups de filets, révèlent plus un caractère urgentiste, expéditif et bâclé.
Les coups de filets et de sifflets du général de corps d’armée, maître de l’ « Opération mains propres » rappellent ceux des généraux de l’O.A.S qui, obstinément, ont refusé de quitter l’Algérie…
Il y a désormais deux Algéries diamétralement opposées : celle du système qui s’entredéchire autour d’un d’un numéro d’écrou constitutionnel, le 102 et celle du mouvement de la dissidence qui se refuse à un si glauque et désolant spectacle de la première censée répondre à ses revendications.
Cette Algérie d’Ahmed Gaïd Salah, de ce numéro d’écrou du 102 allie et coordonne son « vide constitutionnel » que son système ne cesse d’amplifier et d’aggraver à mesure qu’il s’obstine à faire la sourde oreille au mouvement de la dissidence citoyenne du 22 février qui revendique sa fin de règne de potentat, à son «vide juridique». Vide juridique, car une institution judiciaire «accélérée», a-t-il dit lui-même, le général de Corps d’armée, chef d’Etat-major de l’ANP et vice-ministre de la Défense nationale, qui rue sur les brancards, détourne une crise d’essence politique matricielle en une crise mineure réparable aux tribunaux, répond aux urgences politiciennes, monte la garde aux services des urgences, s’emploie à être le pompier de service, révèle son opportunisme et son implication active dans les luttes partisanes et claniques du système.
C’est, au prorata des comparutions, des destitutions de petits et gros requins, de voleurs à la tire et de mandats d’arrêts émis à l’encontre de dilapidateurs et détrousseurs de deniers publics et de comploteurs destructeurs de la sécurité de l’Etat, de détentions provisoires de corrompus et de corrupteurs de la fourmilière d’un système, ordonnés par les coups de téléphone et de sifflets du Général de corps d’armée, que le système pense, ainsi, par ses actions thriller, comme celles du temps de l’OAS qui ne veut pas quitter le pays qu’il a mis à feu et à sang sous le regard compatissant de l’Armée gaullienne, gagner la sympathie du mouvement de la contestation du 22 février qui acclamerait à tout rompre ses actions salvatrices de luttes anticorruption qui ont frappé cette fois le noyau dur du clan de l’ex-prétendant malheureux à un 5e mandat présidentiel.
Mais Gaïd Salah endosse pour cela sous son treillis tous les pouvoirs d’une République rendue bananière par ses corruptions discursives. Il est en effet, tour à tour, selon les rapports de forces claniques en sa faveur ou à son détriment, l’autorité du ministre de la Justice qui n’existe pas en tant que tel, du ministre de l’Intérieur affaiblit lui aussi par un premier ministre alias qui, à son tour, n’a rien d’un chef de gouvernement devant un chef de l’Etat de ce numéro d’écrou constitutionnel du 102 de Ahmed Gaïd Salah.
L’Algérie d’Ahmed Gaïd Salah joue ses pitreries, désormais, au tribunal de Sidi M’hamed qui est, en quelque sorte devenu, en ces temps de crise intra-pouvoir, une «corrida» bien festive pour les clans adverses dont Gaïd Salah et d’autres restés dans l’anonymat qui se donnent à cœur joie dans les coulisses, de voir, courir, sous les huées de quelques «manifestants Taïwan» payés rubis sur l’ongle, «klitou leblad», vers le tribunal où la justice du « peuple » les « entendra ».
Mais la question que le citoyen lambda se pose est celle-ci : pourquoi toutes ces arrestations de prime abord «expéditive et «télécommandées» de «pontes» en disgrâce du système par d’autres du même système qui se refont une virginité à la faveur de la crise politique, et ce, en un temps record, dans la précipitation et surtout dans une mise en spectacle médiatique ?
Cet empressement, plutôt cet emballement trahit le fait que l’appareil judiciaire ne «rend pas la justice» selon la formule consacrée» mais rend corvéable à merci cette justice des urgences à des fins politiciennes, des guerres claniques d’un pouvoir qui livre en pâture des «boucs émissaires» de ses propres rangs. Elle a pour objectif de faire diversion dans l’opinion des Algériens qui, ébahis par de telles «prises», arrestations de «ripoux intouchables» qu’ils seraient enfin prêts non seulement à dialoguer avec un système qui a prouvé sa crédibilité et sa fiabilité. Mais aussi à lui fabriquer à la série, formatés, comme sous les quatre mandats du démissionnaire, patron du «clan» par les services de Gaïd Salah, prêts donc à fournir les 99,99% à un candidat de la présidentielle.
Mais, malgré cette course marathonienne de mauvais aloi enclenchée par un Général de corps d’armée qui, en même temps qu’il se veut légaliste, s’en remet au peuple, dit le comprendre, n’hésite pas à lui tendre des souricières, confond ses règlements de compte personnels dans la chasse gardée des réseaux de pouvoirs prédateurs à l’intérieur des clans mâles du système pour la mainmise des rentes de l’économie de marché concurrentielle, à la crise politique de l’Algérie portée et revendiquée par le mouvement de la dissidence citoyenne et populaire.
En accentuant ainsi cette pseudo lutte anticorruption censée faire taire la colère de la rue algérienne et surtout espère-t-il faire disparaître à jamais des slogans ce «Dégage» qui lui est asséné chaque vendredi, le régime en place n’a fait qu’accroitre l’ aversion à son égard. Car, il ne fait que remonter ses égouts à la surface, empuantit, empeste ses rouages déjà si nauséabonds de toutes les saletés et faussetés de ses mœurs. Tant il est vrai que, pour le plus nais et naïf citoyen, il est impensable d’accepter un dialogue avec cette bande qui, le jour, se donne l’apparence de « représentants légitimes du peuple » et la nuit venue se transforme en « clans OAS » qui se donnent la chasse via une justice croupière et de mise aux enchères du 102.
L’armée algérienne qui, depuis l’indépendance, a été manœuvrière dans les jeux et enjeux politiciens et dans les violences meurtrières contre les mouvements insurrectionnels citoyens pacifiques à l’origine, ne cache pas ses velléités dictatoriales, ainsi que le dit, d’ailleurs, l’infatigable palabreur sous un euphémisme grossier : «accompagner». Accompagner quoi ? La Justice, le dialogue, les présidentielles, le Peuple. Accompagner au sens d’encercler, de corrompre dans tous les sens du terme.
L’Algérie du mouvement de la dissidence citoyenne du 22 février reste fidèle à sa revendication principale, unique et sans détour. il exige que le système dans son ensemble prenne sa valise et dégage. Il ne veut pas de son dialogue, ni de sa phase de transition, ni de ses élections présidentielles. Ces poursuites judiciaires donquichottesques engagées contre ses corrompus et corrupteurs, ses dangereux comploteurs contre la sécurité de l’Etat ne font pas partie de leur revendication car ces véreux et les verrous appartiennent à la même corruption familiale clanique.
Si les dilapidateurs des richesses ont prospéré c’est bien parce que le système dans lequel ils ont grandi leur a été un terrain propice à de tels actes honorifique dans la hiérarchisation de l’univers de la corruption systémique. Ce n’est qu’une parodie de justice qui ne durera que le temps d’une saison des vaches maigres ; le temps que ce même système réconcilie ses clans, lèche ses blessures, recouvre ses forces, reprenne de l’embonpoint, puisse enfin fourbir ses plans machiavéliques pour aller en rangs serrés vers les élections présidentielles, cauchemar, présentement, de Gaïd Salah.
De ces coups de filets et de sifflets, de ces opérations de survie OAS, le mouvement de la dissidence citoyenne du 22 Février veut préserver l’Algérie de cette nouvelle «corruption exemplaire» du chef d’Etat-major de la Défense nationale. Entre une Algérie d’une corruption larvée où une justice improvisée et elle-même corruptrice de ses fondamentaux se met en branle dans un contexte de crise dont la solution est politique et non pas judiciaire, et l’Algérie de ses millions d’Algériens qui clament la destitution d’un système perverti par sa Justice même, il y a l’indéterminé d’un pays no man’s land, faussé, appelé à disparaître et le déterminé d’une Patrie à (re) construire et surtout à projeter dans le futur.