Lundi 3 septembre 2018
La réponse de Mourad Bourboune, auteur du scénario
« Quelle tambouille ! Larbi Ben M’hidi ne méritait pas ça ! » C’est ainsi que le scénariste du film « Ben M’hidi » a réagi, dans une déclaration au Matin d’Algérie, à l’interdiction de projection.
« C’est vrai que les héros meurent incompris. Je viens d’apprendre que le ministère des Moudjahidine ou une structure qui en dépend, vient d’interdire la projection du film sur le martyr Ben M’hidi. Qui sont donc ou ceux qui se réclament tels, qui s’arrogent le pouvoir de juger d’une œuvre d’art et surtout celui de la censurer ? De quoi ont-ils peur ? C’est affligeant ! Mais le problème est aussi ailleurs : on m’a demandé de faire la scénario du film Ben M’hidi. Il représente deux ans de travail. Jusqu’à aujourd’hui je n’ai pas été rémunéré, pas un centime !
Sur le fond : Je connaissais l’enjeu : il s’agissait de ne rien travestir du parcours de cet homme, de ne rien lui attribuer d’inexact, de parfaitement restituer ses profondes motivations, de porter un éclairage sur sa stratégie de chef politique et militaire, de sorte que le film soit également une fenêtre pédagogique sur la guerre de libération que les jeunes connaissent de moins en moins. Vous devinez la masse de travail qu’il a fallu déployer pour rester au plus juste de l’histoire.
Le scénario a été lu par le ministère de la Culture puis par le ministère des Moudjahidine, les deux jurys l’avaient approuvé et ils m’ont transmis leurs félicitations. Madame Khalida Toumi en personne m’avait personnellement écrit pour me dire sa satisfaction pour le travail.
À l’époque, le scénario était fait pour le réalisateur irlandais Ken Loach, cinéaste de grande envergure, à la hauteur du personnage Ben M’hidi.
Et puis ce fut le cafouillage !
Le ministère de la Culture a voulu changer le scénario après l’avoir approuvé, et le modifier en catimini, sans associer l’auteur, comme si le scénario lui appartenait.
Ensuite, l’option Ken Loach a été écartée et le film accaparé par un réalisateur algérien de modeste envergure et dont je ne me rappelle pas avoir vu un film, et qui a entrepris de s’attaquer à une réalisation aussi délicate que celle d’un film sur Ben M’hidi.
Tout ça pour au final déboucher sur l’interdiction de projection ! Je voulais faire texte à la gloire de cet immense personnage Larbi Ben M’hidi mais hélas force est de constater qu’il n’ait pas donné à tous d’être à la hauteur de cet immense stature… »