Vendredi 7 juin 2019
Clinique Targa-Ouzemour (Béjaia) : mort d’un bébé, souffrance et questions des parents
Un citoyen de la wilaya de Bejaia tire la sonnette d’alarme sur le calvaire qu’endurent les parturientes à la clinique de maternité « Mère et Enfant » de Targa Ouzemour dans la wilaya de Bejaia.
Il s’agit de notre correspondant M. Outemzabt qui se demande comment cette situation a pu échapper aux responsables de cette structure de santé censée être en propre et capable de répondre aux exigences des milliers de patients. Le directeur est-il au courant ? A-t-il le moindre souci à ses patientes ? Le ministre de la Santé pourra-t-il mettre fin à ce calvaire ? Auprès de qui réclamer l’indifférence du personnel, la surcharge et la pression, l’incompétence des uns et la négligence des autres, l’insalubrité et le manque d’hygiène qui y règnent. Qui saisir et comment ? Le simple citoyen aura-t-il une suite à sa doléance ?
Il remet en cause l’hospitalisation de son épouse et le décès du bébé
M. s’interroge, rongé par la douleur de ce que son épouse a vécu dans cet établissement. « Il n’y a aucune prise en charge dans cette clinique digne de ce nom ! Mon épouse (L.G.) a été admise aux urgences gynécologiques et obstétricales le 16 mai 2019 à 3h du matin. Enceinte de 29 semaines, elle est arrivée au service des urgences de la clinique sans qu’elle ne soit prise en charge dans l’immédiat. Elle a dû attendre quelques heures.
Selon notre interlocuteur, la patiente avait une « menace sévère » mais les médecins l’ont rassuré. Ce n’est pas encore le moment d’accoucher, lui ont-il assuré. D’autres ont affirmé que le bébé était déjà mort. A 12h00, L.G. a ressenti des douleurs intenses. Elle n’a été installée sur le lit d’accouchement que vers 16h00, puis abandonnée à son sort. On lui injecta un traitement « très récent et très cher», d’après la sage femme qui a osé dire à la parturiente qu’il «a coûté 35000 DA ». Pour finir de lui asséner qu’elle « ne le méritait pas ! »
« Une injection qui n’a pas fait son effet car ma femme avait commencé à accoucher seule. Une demi-heure après, la sage-femme arrive, l’aide à faire sortir le bébé qui bougeait (en vie). Résultat : ma femme a accouché d’un bébé vivant mis en couveuse ».
Des explications ?
Contrairement à ce qui a été dit, le bébé était donc en vie (une fille). Elle pesait 1,100 kg. Le mari voudrait savoir qu’elles sont les méthodes utilisées pour tenir en vie le nouveau-né à la 29e semaine et quelles sont ses chances de survivre !
« Dans un hôpital où la prise en charge existe vraiment, le bébé aurait pu vivre ! Tout comme la Polonaise de 29 ans qui a accouché de 6 enfants prématurés à la même date et ils sont tous vivants ! Voyez-vous », estime-t-il !
Et d’ajouter : « Mais ce n’est pas le cas à la maternité à Targa Ouzemour (Algérie) ! A mon arrivée, j’ai pu visiter ma fille (Mélina) en couveuse. Elle bougeait ses doigts. Mais le médecin ne m’a rien confirmé. Elle s’est contentée de lâcher : “Elle n’avait pas beaucoup de chances car elle ne respirait pas bien”. Un aveu qui vaut un condamnation à mort de mon bébé. Mais alors que fait-elle si elle n’est pas censé faire tout pour sauver des vies ?
Toujours des questions du papa éploré : “Mon bébé avait-il besoin d’intubation ? Avait-il été préparé à la respiration non invasive ? Malheureusement, ma fille est morte et j’ignore pour quelles raisons exactes ! Aucun bilan ni compte rendu ne nous a été fourni ! Nous nous disons que c’est le destin en l’absence d’autres prétextes consolants !’’, soupire M.
Deux à trois parturientes par lit : le calvaire !
“Après leur accouchement, les parturientes sont transférées au bloc de la maternité. Elles sont généralement installées dans des chambres de 4 lits dont 7 parturientes et 5 bébés. Comment ? Dans chaque lit, il y avait deux parturientes, voire trois. La chambre était très sale. Les toilettes dégageaient une odeur abominable. Il y avait de l’eau par terre et même des traces de sang. Les insectes et les moustiques y ont trouvé place naturellement. Je n’ai pas pu résister une minute !”, témoigne ce papa.
Le pire est vécu aux moments des visites. Chaque patiente a une visite de sa famille et sa belle-famille. On peut enregistrer jusqu’à plus de 50 visiteurs par pièce. L’air devient irrespirable. Le bruit, la promiscuité,… Les couloirs ne sont pas en reste.
Les « mauvaises conditions de travail », justifient-elles
Comment peut-on agir face à cette situation ? Comment faire face au manque d’effectif, à la pression et la surcharge ?
Le dimanche 19 mai, M. est retourné au service de la maternité pour demander l’attestation d’accouchement pour sa femme. Il a dû attendre 1h30 mn pour sa délivrance (devant le bureau du cabinet médical). Il a préféré sortir prendre de l’air. A son retour au bureau, il trouve une autre dame entourée de stagiaires qui lui avait, raconte-t-il, parlé agressivement.
« Elle m’a même claqué la porte en plein visage après m’avoir invité à sortir. Je lui ai demandé pour quelle raison s’est-elle énervée ? Elle m’a lancé : «Quitte la salle et ferme la porte ! ». Chose que je n’ai pas faite car j’étais étonné et agacé aussi ! Elle a demandé à une stagiaire de fermer la porte et je l’ai empêchée. Puis elle s’est levée et l’a claqué de toutes ses forces ! », décrit-il !
Suite à sa demande auprès des agents de la sécurité, notre correspondant a été reçu par Madame Saidani à son bureau pour parler de ce « comportement ». Il a expliqué qu’il souhaitait rédiger un article car il n’accepte pas qu’une telle affaire soit enfouie.
Ayant vérifié sur les caméras de surveillance, la responsable présente ses excuses et demande à ce que la personne soit convoquée dans l’immédiat !
L’interrogeant sur les capacités et les conditions de la clinique, l’interlocutrice a bien confirmé le manque d’effectif, la surcharge des salles d’accouchement, et le manque de femmes de ménage ! « Nous sommes dépassés ! Nous recevons chaque jour des patientes de partout, y compris d’autres wilayas limitrophes ! Votre femme a eu de la chance d’avoir trouvé un lit ! Il arrive que parfois des parturientes s’installent par terre en attendant une place ! », confie-t-elle avec désespoir.
Cela pourrait expliquer la pression exercée sur les sages-femmes, le stress et le comportement excessif de certains médecins et infirmiers. Mais pas au point de chasser un citoyen en deuil et lui claquer la porte au nez !
“Tout le monde est au courant du manque d’effectif dans cet établissement, mais il y a fort à faire avec la personnalité de certaines personnes qui doivent être rappelé à l’ordre pour tenter de sauver la réputation de cette structure hospitalière et surtout de développer le sens des responsabilités auprès du personnel”, souhaite M.