Mardi 10 septembre 2019
Bensalah a mis fin hier aux spéculations sur sa brouille avec Gaïd Salah
Son discours d’ouverture du conseil des ministres a été très pédagogique et plein de messages.
En effet, Il a tenu à rappeler d’abord que tout ce qui se produit aujourd’hui entre dans le cadre de la feuille de route qu’il avait mise d’une manière consensuelle avec les ailes du pouvoir « dès ma prise de fonction dans les conditions connues de tous ».
Il a privilégié la voie du dialogue inclusif avec toutes les forces et les acteurs pour surmonter cette crise sans pour autant rappeler qui en était responsable mais l’expression « des conditions connues de tous », renvoie la faute directement et visiblement à son prédécesseur et aux forces extraconstitutionnelles qui ont été la principale cause de cette débâcle dans la conduite du pays.
Il récupère les résultats de ce fameux rapport du panel de dialogue et de médiation. « J’ai interpellé l’intelligence collective et le patriotisme des Algériens et des Algériennes afin d’adhérer à cette approche tendant à réunir les conditions pour accélérer l’organisation d’une élection présidentielle libre, transparente et crédible, en tant que seule et unique solution à même de consacrer l’autorité de l’Etat et de ses institutions, en lui permettant ainsi de faire face aux difficultés économiques, aux défis sociaux et aux menaces qui guettent notre sécurité nationale dans un environnement régional et international complexe et instable». Il y a réussi en comptant sur la personne de Karim Younes auquel il a fait appelle à deux reprises. Une première fois pour les élections du 4 juillet dernier qui n’a pas abouti pour être annulée faute de candidats, cette fois-ci, selon lui, il a réussi de réunir une frange importante de la population qui adhère à son approche, celle d’aller dans les plus brefs délais pour élire un président sans l’implication de son administration dans sa totalité et sous toutes les formes.
Il appartiendra dès lors en fonction de son programme, débattu et approuvé par la population de mener les réformes qui peuvent aller jusqu’à la révision totale ou partielle de la constitution en réorganisant l’équilibre du pouvoir et les libertés collectives et individuelles pour aller vers cette deuxième république tant réclamée par le Hirak aujourd’hui. En reconnaissance, il a tenu avec la fin de mission de l’instance de dialogue et médiation de saluer voire remercier les efforts consentis par ses membres qui selon lui n’ont pas été dans les conditions faciles pour pouvoir discuter avec 24 partis politiques structurés et plus de 5670 représentants d’associations nationales et locales, outre des personnalités et des compétences nationales.
Le protocole habituel a été scrupuleusement respecté
Sauf qu’étant donné les circonstances particulières où les réseaux sociaux s’enflamment sur la courte absence d’El Mouradia du chef de l’Etat pendant presque une semaine, le premier qui a pris la parole est le vice-ministre, chef d’état major de l’armée Ahmed Gaïd Salah (AGS) pour faire une communication sur l’aspect sécuritaire et, sera suivi par celle du premier ministre avant de passer à l’adoption, les yeux fermés, des deux textes organiques de loi relatifs d’abord à la création d’une instance indépendante des élections et celui portant régime électoral pour formaliser leur passage dans les deux chambres, dans la semaine qui vient.
Dans ce contexte et face aux rumeurs persistantes qui circulent sur les réseaux sociaux et certains milieux médiatiques, le chef de l’Etat dans le communiqué final a fait ressortir son soutien indéfectibles et pour « la vigilance et le sens élevé de patriotisme de notre brave Armée nationale populaire (ANP), digne héritière de la Glorieuse Armée de libération nationale (ALN) et à lui rendre hommage pour ses efforts soutenus en vue de préserver la voie constitutionnelle et le bon fonctionnement des institutions de l’Etat, et d’assurer la sécurité et la stabilité, soutenu dans ses nobles missions, par les différents corps et services de sécurité ».
Plus loin, il adresse ses salutations en personnalisant l’institution militaire à travers son chef d’état major Ahmed Gaid Salah pour «la clarté de ses engagements, son positionnement aux côtés de notre peuple en cette étape décisive de son histoire, et sa détermination à garantir le caractère pacifique des manifestations et à faire face, fermement et résolument, aux agissements attentatoires à notre intégrité territoriale et aux tentatives visant la sécurité et à la cohésion nationales ». Il n’y a plus de doute, un message clair, les choses sont bien rentrées dans l’ordre pour une élection en décembre mais…
Le panel même mission achevée, défend la constitutionnnalité de son rapport.
Une fois rentrés chez eux le dimanche dernier, de nombreux membres restent très sollicités par les médias sous toutes ses formes pour donner plus de précisions à l’opinion publique sur le déroulement de leur consultation avec les partis politique et la société civile. Pour de nombreux, ne sont consignés dans le rapport final que ceux, réellement et formellement représentatifs d’une frange de la société. Pour Bendjelloul, membre du panel des six par exemple rappelle que pour certains « on leur a demandé des signatures pour prouver leur représentative, ils ne sont plus revenu » cela suppose que n’apparaissent dans le rapport final de 200 pages que ceux qui avaient une attache formelle avec la société. Pour ce qui concerne la sollicitude de Karim Younes pour former l’équipe de l’instance autonome qui s’occupera des élections, ils ont bien confirmé qu’elle figure comme proposition dans le rapport sous le prétexte qu’Abdelkader Bensalah n’a pas les prérogatives constitutionnelles de le faire mais pourrait signer les textes comme une simple formalité. Rappelons pour relever la contradiction que le chef de l’Etat qui est lui-même dans une position anti constitutionnelle depuis le 9 juillet dernier a entrepris de nombreux changements sans tenir compte de la constitution que son prédécesseur a trituré bien avant lui. En effet, Comme stipulé donc la constitution, le Président du Conseil de la Nation assume la charge de Chef de l’Etat pour une durée de 90 jours au maximum, au cours de laquelle des élections présidentielles sont organisées, sachant que le Chef de l’Etat, ainsi désigné, ne peut pas être candidat à la Présidence de la République.
Au cours de cette période, le Chef de l’Etat dispose de prérogatives très réduites par rapport à un président élu. A cet effet, il ne peut être fait application des dispositions prévues aux alinéas 7 et 8 de l’article 91 et aux articles 93, 142, 147, 154, 155, 208, 210 et 211 de la Constitution. Pour madame Fatiha Benabou, toujours cohérente dans sa démarche, elle l’explique d’une manière plus pragmatique et sans détour que la volonté du peuple prime sur les formalités constitutionnelles.
Pour elle, aujourd’hui le détenteur réel du pouvoir est le peuple et donc celui qui a validé la mise en place d’une telle instance. Elle part de l’hypothèse, comme membre influent constitutionnellement dans ce panel, que les 24 partis et 5670 rencontres, représentent selon elle le peuple dans son ensemble et donc justifient amplement d’appliquer des mesures exceptionnelles à une situation exceptionnelle non seulement dans l’intérêt général mais aussi pour des raisons incontournables de la pérennité des institutions de l’Etat. Est-ce que le peuple va accepter cette approche le 30éme vendredi, l’avenir nous le dira.