Dimanche 13 janvier 2019
Un sursaut de la Wilaya IV héroïque
Le symposium du 08 janvier 2019, tenu à la Bibliothèque nationale par la fondation de la wilaya IV historique avait comme générique « L’affaire de l’Elysée entre la vérité et la propagande ».
Ce que d’autres qualifient de « l’affaire Si Salah », en revanche, pour les services secrets français, elle est connue sous le nom de code Tilsit parce qu’elle est aussi l’affaire de l’Elysée ! En reprenant le même intitulé, la fondation inscrit ce « sursaut » de la Wilaya IV comme un des événements internes de la France à l’instar de ceux qui intitulent notre Révolution de « Guerre d’Algérie » alors qu’elle reprend dans sa brochure en arabe distribuée à l’occasion que de Gaulle rencontrera le GPRA quelques jours après son entretien avec les trois officiers de la 4 à l’Elysée le soir du 10 juin 1960.
A ce sujet Mohamed Téguia écrit dans son livre « L’Algérie en guerre » que de Gaulle «leur fi part de faire appel aux dirigeants de l’extérieurs le 14 juin ». Il est utile de signaler que la rencontre de Melun, à la fin du mois de juin avait échoué et que la politique de « pacification» s’intensifiait durant l’été et l’automne 1960 par les grandes opérations Cigale et Ariège en Oranie, dans le Nord-Constantinois puis dans les Aurès. Comme il est nécessaire de rappeler que cette année-là l’indépendance est tour à tour proclamée au Cameroun le 1er janvier, au Togo le 27 avril, au Mali le 20 juin, à Madagascar le 26 juin, au Dahomey le 1er août, au Niger le 3 août, en Haute Volta le 5 août, en Côte d’Ivoire le 7 août, au Tchad le 11 août, en République Centrafricaine le 13 août, au Congo le 15 août, au Gabon le 17 août et en Mauritanie le 28 novembre. C’est comme si pour de Gaulle il avait fait le choix d’élaguer toutes ces colonies, juste pour pouvoir se préserver l’Algérie.
Si on enserre l’Etat-major de la Wilaya IV dans la période de l’histoire de 1954 à 62 on ne peut qualifier sa démarche de juin 1960 que d’un faux bond mais si on le considère pour ce qu’il est un des organes de Direction de la Révolution qui anticipe dès 1960 sur ce qui allait se passer inéluctablement l’été 62 s’il n’agissait pas avant que les 3 B qui se sont embourgeoisés jusqu’à ne pas s’entendre sinon pour éliminer Abane et confier le gouvernement à Ferhat Abbas.
Pour la wilaya 4 ce crime et cette concession à la bourgeoisie ne seraient-ils pas fatals et leur devoir n’est-il pas d’y remédier ? C’est ce qui a été tenté peut-être par la Wilaya IV et a échoué dans sa récupération du cours de la Révolution face à une direction coloniale qui avait à sa tête le sanguinaire Général de Gaulle qui s’était fixé comme tâche la capitulation des combattants des djebels sous la forme dite « paix des braves » utilisant un rouleau compresseur aux mains du général le plus étoilé qui a, à ses ordres un million de soldats, et autant d’auxiliaires dont le seul but d’affaiblir l’ALN jusqu’à lui imposer des cessez-le-feu partiels par-dessus la tête du Nidham
Ceux qui qualifient la lutte de libération nationale de guerre militaire font une erreur aussi grave que ceux qui la qualifient de guerre civile. La Révolution ne peut être réduite à un problème d’armement car il a été prouvé que la manifestation de décembre 1960 à elle seule était plus bénéfique que la plus grande des victoires de l’ALN.
Si on paraphrase Hadj Ahmed Keddar qui disait : « lebsoulhoum leâbaya taâ-islam oubach iâ rouhouh ». On peut dire, en ce qui concerne les responsables du FLN : ils les avaient galonnés pour les dégrader, car pourquoi un colonel ou officier de l’ALN ne serait-il pas considéré d’abord comme un dirigeant de la Révolution ? Nous savons qu’aucun des officiers n’a fait d’Ecole de guerre mais tous ont été formés au sein des partis politiques. Les Novembristes étaient plutôt de la gauche, n’en déplaise à cet historien anglicisant
L’état-major, ici le conseil de la Wilaya, est comme un être vivant et comme tout être vivant il a une conscience, une intentionnalité et une autonomie
Si on connaît l’intention de l’ennemi qui est, dans ce cas, de damer le pion à l’ALN pour contourner le FLN, on ne connait toujours pas, à ce jour, l’intention exacte de la Wilaya IV sinon celle de tâter le terrain, à la recherche d’un cessez-le -feu !
En attendant l’accès à nos propres archives, nous pouvons affirmer sans se tromper que l’intention n’était rien d’autre que de faire avancer la Révolution. Dans ce cas, l’injuste exécution des officiers n’a comme sous-bassement que le mépris de certains dirigeants envers le peuple qui au lieu de voir la solution dans sa mobilisation se figent sur le manque d’armement et en font la clé de voûte. Il suffit de lire la brochure de la fondation pour s’en convaincre.
A la tête d’une Wilaya il y a normalement un wali. Pourquoi un colonel ? Là se situe peut-être le paradigme qui a été fatal à ces officiers de la 4 et qui est néfaste à tout le peuple à ce jour.
La diplomatie, cette arme redoutable de la Révolution a pris le relais de la lutte héroïques des djounouds et s’est hissée au niveau des manifestations du peuple de décembre 60 et de juillet 61, ne pouvait avoir comme siège que l’extérieur.
Oublier ou sous-estimer le rôle de la diplomatie est comme faire fi de la mobilisation du peuple pour faire de la récupération des armes un mobile déterminant et asseoir le paradigme de la guerre militaire ou civile et non celui de la Révolution.