25 novembre 2024
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A-t-il profité de ses fonctions pour s’enrichir ?

Déclaration de patrimoine

A-t-il profité de ses fonctions pour s’enrichir ?

Aucun ministre éclaboussé par des affaires comme Panama papers n’a été mis en examen. Ici Bouchouareb à côté d’Ouyahia.

Excédé par les accusations qui pleuvaient sur certains membres de son gouvernement d’alors, Abdelmalek Sellal aurait, selon ce qui a été rapporté par la presse, instruit les membres du gouvernement à l’effet d’entamer l’opération de remise de leurs déclarations de patrimoine, conformément à la réglementation en vigueur.

S’agissait-il d’une opération de transparence à laquelle souhaitait se livrer Abdelmalek Sellal après la publication du scandale des « Panamas Papers » ?

Lire : Les petites affaires du fils d’Ould Kaddour, patron de Sonatrach

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Ce qui est certain, se sont empressés d’écrire certains journalistes, c’est que cette affaire qui mettait en cause des responsables et non des moindres a produit quelques effets, sans compter les accusations formulées par Louisa Hanoune à l’encontre de deux membres du gouvernement, C’est dans ce contexte que le Premier ministre aurait donc instruit les membres de son staff pour, dit-on, en finir avec la culture du «soupçon » pesant sur quelques uns de ses ministres qui auraient « oublié » de déclarer leurs biens.

L’instruction du Premier ministre, si instruction il y avait, consistait en fait à rappeler aux ministres et aux grands commis de l’État de s’acquitter d’une obligation légale ; elle donne donc à déduire que des manquements à cette obligation ont été constatés ! 

Il est intéressant de noter que dans ces cas-là, dans certains pays, européens notamment, c’est la Cour des comptes qui prend sur elle de publier sur son site internet la liste des personnes n’ayant pas remis de déclaration de patrimoine initiale après leur entrée au gouvernement ou à l’occasion de leur élection, ainsi qu’une liste de celles n’ayant pas remis de déclaration de patrimoine lors de leur cessation de fonction ou du non renouvellement de leur mandat électif.

À ce propos, ouvrons une parenthèse, non pas pour excuser les cadres qui se dérobent à cette obligation, mais pour préciser que le formulaire est composé de sept pages à renseigner en arabe et en français ; la publication de toutes les déclarations de patrimoine, de l’ensemble des responsables en poste, aurait nécessité une ou plusieurs éditions de journaux officiels : faut-il, dans ces cas précis, recourir à des résumés, au risque d’amputer ces déclarations de leur contenu ?

Autre remarque, la publication d’office au Journal officiel peut aussi déclencher des réactions en chaîne :

  • Les déclarants peuvent être amenés à faire des démentis ou à apporter des éclaircissements suite à des dénonciations par des tiers,

  • Les banques, les notaires, les services des domaines auront ainsi leur mot à dire grâce à leurs fichiers,

  • Il en est de même des services de sécurité qui peuvent déclencher des enquêtes sur des richesses ou des biens non déclarés.

Outre la transparence qu’elle induit, la déclaration de patrimoine  permet aux tiers, citoyens ou autres, de saisir la justice en cas de soupçon de déclarations mensongères. Mais attention tout de même à ne pas tomber dans le déballage qui ne serait pas sain pour le pays et qui, surtout, donnerait le sentiment qu’il y a des choses à régler. Mais tant mieux aussi si l’objectif visé concerne la préservation des deniers publics et des biens de l’État !

La déclaration de patrimoine, faut-il le rappeler, permet de faire la comparaison entre le montant de la fortune d’un responsable public au moment où il entre en fonction et le moment où il en sort. Cela permettrait, ainsi, de répondre à la question lancinante qui taraude l’esprit de tout citoyen :

« A-t-il profité de ses fonctions pour s’enrichir ? »

Les citoyens algériens, sont pourtant loin d’être dupes ; d’ailleurs ils sont très réservés concernant la véracité des déclarations de patrimoine faites par les responsables.

On a même avancé un chiffre pour dire que 80% des grands commis de l’État et autres élus qui se sont succédé toutes ces dernières années ne déclarent pas leur patrimoine et, conséquemment, celui-ci n’a pas fait l’objet d’une publication.

La preuve, et à en croire ce qui avait été rapporté par la presse il y a quelque temps, l’ex-président du MSP (Abou Djerra Soltani à l’époque), a reconnu implicitement, sur les ondes de la Chaîne 2, que ni lui ni aucun ministre de sa formation n’ont été soumis à cette obligation quand ils étaient au gouvernement. Il aurait ainsi déclaré : « Je suis pour la déclaration de patrimoine à condition qu’elle soit vraie, mais il faut savoir qu’aucun responsable en Algérie n’a de fortune en son nom tous leurs biens sont enregistrés sous des noms d’emprunts ».

Prenant un ton ironique, il a aussi dit à propos de certaines déclarations des ministres d’alors : « Le peuple algérien se réjouit de savoir que ses ministres sont pauvres » !Ce à quoi aurait répondu l’ancien ministre Abdelaziz Rahabi : « L’appréciation de Soltani sur la déclaration du patrimoine est d’une gravité qui interpelle les consciences des serviteurs et commis de l’État, quels qu’en soient la responsabilité ou le grade ; elle présente la corruption comme une fatalité et sa généralisation à ceux qui ont exercé ou exercent encore une responsabilité comme une évidente réalité ».

Les déballages, les affaires arrivent au moment où le gouvernement d’Ahmed Ouyahia est malmené par la crise qui s’est installée dans le pays ; crise de confiance et crise morale aussi depuis la survenance de l’affaire de Kamel El bouchi et les dégâts collatéraux qu’elle a provoquée sur nombre de responsables et non des moindres lesquels à ce jour n’ont pas publié la liste de leurs biens.

L’opinion nationale est dans l’expectative des procès dont certains ne pourront absolument pas y échapper à en croire le ministre de la Justice Tayeb Louh qui vient de déclarer : « la Justice est forte et indépendante  et nul n’est au dessus de la loi ». Dans la foulée, Tayeb Louh annonce la création d’«un pôle judiciaire spécialisé dans les affaires financières » !

Trop tôt, trop tard, mais sinon découvre-t-on, soudainement, en Algérie la nécessité de la moralisation de la vie publique ?

Cela fait quelque temps déjà qu’il y a régulièrement des scandales financiers et de corruptions présumées qui sont révélés ; en tous les cas la triche et la fraude semblent faire partie du sport national, à tous les niveaux.

Les Algériens veulent-ils, aujourd’hui, qu’on leur parle de chômage, d’emploi, de logement ou bien alors de la moralisation de la vie politique ? Il serait intéressant de les sonder à ce sujet, même si leurs priorités sont connues.

De ce qu’on a déjà entendu, on retient bien évidemment le fameux « tous pourris » qui a prospéré au fil du temps, et qui a dépassé les bornes avec l’affaire des 701 kilos de cocaïne qui selon ce qui a été écrit ça et là a emporté des présumés « intouchables ».

De toutes les façons, disent certains, les déclarations de patrimoine ne changeront pas grand-chose et n’empêcheront pas la malhonnêteté, la corruption et l’enrichissement sans cause de croître.

Certes, mais tous ceux qui viendraient à critiquer le procédé réglementaire en vigueur, celui qui oblige les responsables à déclarer leur patrimoine, auraient été les premiers à s’émouvoir, voire même à s’indigner, s’il n’y avait pas de mesures réglementaires à même de cadrer cela !

Toutefois, il ne faudrait pas confondre publication du patrimoine, ce qui est obligatoire, et publicité autour du patrimoine, ce qui, au regard des concernés, est considéré comme une atteinte à leur vie privée. C’est l’avis d’un ancien président français qui avait fait sa campagne contre la transparence absolue ! Un thème racoleur, a-t-il dit, qui est sorti à la veille de chaque élection. Et, a-t-il ajouté, quand il n’y a plus de sphère privée, cela s’appelle le « totalitarisme ».     

Faut-il croire alors que la focalisation sur la transparence du patrimoine peut être aussi assimilée à une gesticulation qui risque de produire des effets inverses de ceux escomptés ?

Peut-être pas, car si personne ne conteste qu’un ministre, élu ou autre wali doivent être totalement transparents, c’est d’abord dans leur action et dans l’exercice de leur mandat ou de la fonction que cette transparence doit être radicale !

A la veille des importants changements qui sont annoncés mais qui tardent à venir, le sentiment général révèle qu’il faut nécessairement lutter contre la corruption et la dilapidation des biens publics, et que s’il y a encore des hommes politiques honnêtes, qu’ils se mettent au travail sur ces sujets ! Il y va de l’avenir du pays et de sa réputation qui, il ne faut pas se voiler la face, est sérieusement entachée « urbi et orbi ».

Auteur
Cherif Ali

 




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