22 novembre 2024
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La souveraineté de l’Afrique sur l’Afrique s’appelle liberté

« Un peuple sans souveraineté est non seulement un peuple privé de liberté mais un peuple menacé dans son existence » Jean Marie Le Pen

L’héritage colonial a placé les dirigeants algériens au lendemain de l’indépendance officielle devant plusieurs stratégies théoriquement possibles mais pratiquement explosives, eu égard au contexte historique de l’époque, accepter l’héritage et poursuivre la voie tracée par le colonisateur français c’est-à-dire poursuivre la voie capitaliste.

Contester son héritage et emprunter à titre transitoire une voie non capitaliste, refuser l’héritage colonial et s’engager dans la voie de la construction du socialisme selon le modèle marxiste-léniniste, accepter l’héritage sous forme d’inventaire et s’efforcer de chercher une troisième voie à mi-chemin entre le capitalisme et le socialisme. 

Il est clair que le socialisme eu égard au contexte historique de l’époque était une référence quasi obligée du discours des gouvernants. Cela s’explique aisément un régime dictatorial dépourvu de toute légitimité propre ne peut durer qu’en recherchant le soutien populaire. Et il ne peut le faire que de deux manières soit en mettant l’accent sur l’islam, soit en se réclamant du socialisme.

Pour les dirigeants algériens, une fois la souveraineté retrouvée, l’islam devait s’effacer de la scène politique, et céder la place aux idéologies nationalistes (panarabisme nassérien) et matérialistes (autogestion yougoslave et socialisme soviétique) qui ont trouvé en Algérie un terrain propice à leur expansion. 

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C’est dans cette situation géopolitique (guerre froide entre les deux superpuissances USA-URSS, montée en puissance du panarabisme arabe, accélération de la décolonisation, mouvement des non-alignés, tiers-mondisme en vogue etc.) bien particulière qu’un Etat militaro-rentier a vu le jour. 

Il va s’appuyer dans un premier temps sur l’accaparement des biens abandonnés par les colons  déclarés « biens vacants » c’est à dire propriété de l’Etat (terres, usines, commerce, biens immobiliers) et dans un deuxième temps sur la nationalisation des hydrocarbures qui consiste dans le transfert de la propriété des gisements pétroliers et gaziers à l’Etat algérien c’est-à-dire pratiquement aux détenteurs du pouvoir. 

Dans les bouleversements qu’a connus la société algérienne colonisée puis décolonisée, on insiste toujours sur les conséquences de la colonisation rarement sur la phase de décolonisation. L’ordre colonial français était une occupation du territoire par « l’épée et la charrue » ; l’ordre étatique algérien serait une appropriation privative du sol et du sous-sol algériens par les «textes et le fusil». Si la violence exercée par la colonisation était légitimée par la mission « civilisatrice » de la France la violence légale de l’Etat algérien s’effectue au nom du « développement ». Les mots changent mais les objectifs sont les mêmes. L’enjeu des pouvoirs n’est autre que la soumission de l’homme à l’ordre établi c’est-à-dire l’acceptation de son statut de sujet. 

Le rapport entre contestation et répression, domination et émancipation est reconduit dans l’Algérie post coloniale. Ils vont reproduire les méthodes d’oppression du colonisateur et poursuivre la trajectoire  économique et sociale tracée (Plan de Constantine avec pour objectif la concentration des populations sur la bande côtière pour mieux les contrôler). 

Ce schéma d’aménagement d’inspiration coloniale mis en œuvre au lendemain de l’indépendance a eu pour conséquences le bétonnage des terres agricoles situées sur le littoral et la pollution des côtes de la Méditerranée. A contrario, les hauts plateaux seront abandonnés dans un état de sous-développement plus adaptés à recevoir des industries de transformation avec une répartition spatiale équilibrée de la population par la création de villes nouvelles.  

En imposant un schéma institutionnel dont la logique de fonctionnement était radicalement opposée à celle de la société indigène, et un modèle économique, étranger aux réalités locales, le colonisateur préparait en fait la société postcoloniale à l’échec de la modernisation politique et du développement économique. Sur le plan économique, le colonisateur français avait orienté la production de ses « ex colonies » vers l’extraction des matières premières et leur acheminement vers l’industrie française. 

Il avait également limité le développement des industries manufacturières des pays colonisés afin de faciliter la vente des produits manufacturés français vers ses « ex colonies ». Sur le plan agricole, les cultures vivrières tournées vers les besoins des populations autochtones (économie de subsistance), avaient été abandonnées et remplacées par les cultures spéculatives destinées à la métropole (vins, tabacs, agrumes etc.). 

Les Algériens ont été formatés par la colonisation pour s’autodétruire en se dressant les uns contre les autres selon la vieille formule « diviser pour régner » qui a fait l’ascendance et la prospérité de l’Occident et le déclin et l’atomisation du monde arabo-musulman. Face aux Etats continents (USA, Chine, Indes, Brésil, Europe), les micro-Etats de l’Afrique et du Moyen Orient s’inclinent et n’opposent aucune résistance devant le pillage de leurs ressources non renouvelables et se montrent par contre arrogants et méprisants à l’égard de leurs propres peuples. A la fin du XXème siècle, les macro-Etats détruisaient le mur de Berlin et savourent aujourd’hui la paix retrouvée dans une prospérité inégalée. 

Au XXIème siècle, les micro-Etats dressent des murs entre les peuples et rivalisent en armement pour s’opposer les uns aux autres au profit des intérêts étrangers. Pourtant, toutes les frontières sont aberrantes et artificielles mais aucun chef d’Etat arabe et africain ne veut remettre en cause les frontières héritées de la colonisation, chacun tient à sa petite épicerie qu’il veut protéger des supermarchés. 

Le Maghreb des peuples est une donnée sociologique indéniable et les Etats Unis d’Afrique, une voie salutaire à l’émancipation des peuples par la disparition des micro-Etats africains qui font le lit des intérêts occidentaux. Malheureusement trop de murs séparent les peuples, trop d’hommes de pouvoir s’y éternisent et très peu d’hommes d’Etat émergent dans ce monde de faucons où l’hirondelle ne fait pas le printemps. 

Hier, c’était l’Algérie rurale qui affrontait l’Algérie européenne ; aujourd’hui, c’est l’Algérie indépendante qui enterre l’Algérie rurale. Cela ne date pas d’aujourd’hui, ses racines remontent loin dans l’histoire. Trois mille ans d’invasions étrangères ont fait de l’Algérie ce qu’elle est aujourd’hui.

Tantôt soumise, tantôt rebelle, l’Algérie se cherche. L’Algérie française, une illusion ; l’Algérie algérienne, une utopie, l’Algérie musulmane, un refuge ; l’Algérie socialiste, un blasphème, l’Algérie indépendante, une imposture, l’Algérie de demain, une inconnue. 

Dr A. Boumezrag

PS/ Dans les faits, l’Etat indépendant continue l’Etat colonial, il reste séparé du peuple et proche de la métropole. Reprenant à son compte le discours colonial, les Etat post colonial décrétèrent l’immaturité des peuples africains les rendant inaptes à la démocratie et au développement. 

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