Une arène de taureaux fous que cette scène littéraire algérienne. De la testostérone qui gicle de partout. Des coups de langues et de poings qu’ils s’envoient comme des captives dans un harem. De qui est le plus grand scribe et crabe de la galaxie des mots. De qui se range le mieux sous la botte ou le mocassin.
Un concours de qui pisse le plus loin sur une horde d’âmes zombifiés qui n’en demande pourtant pas tant. Des salons feutrés parisiens à ceux ensoleillés d’Alger au style arabo-andalous , l’écrivain est le dernier missile à la mode. La dernière arme affûtée, faute de mieux. Faute d’intelligibilité diplomatique et de négoce fructueux, on s’envoie les egos boursouflés d’auteurs en mal éternel de projecteurs.
En attente avide d’une gloire pour figer leurs noms dans le ciel desséché d’un pays qui craque et dont les morceaux tombent sur la tête des gens qui ne lisent presque rien, mais comptent les points pour mieux tuer le temps. Même si ces esprits chagrins du verbe lorgnent secrètement sur les cieux plus cléments de cet ailleurs qu’ils font semblant de detester tant qu’ils ne l’ont pas atteint.
Des écrivains alourdis de leur masculinité hypertrophiée comme les couffins dont on charge les ânes. Qui se laissent manipuler et traîner dans la boue, pourvu que jamais, on ne les oublie.
Que ne dirait-on pas si des écrivainEs se comportaient de la sorte !
Solidarité dites vous ? De qui gît dans une misérable taule et de qui tire ses marrons du feu, ou sa petite gloriole personnelle de la misère de l’autre.
Se battent-ils contre l’érosion culturelle ? Des cafés littéraires qui disparaissent ? De l’absence des théâtres ? Des lois contre le cinéma qui altèrent la créativité et la conscience populaire ? Et qu’est ce qui relève de la critique aujourd’hui ou de la trahison ? Qui fixe les limites ?
Pour l’heure, la seule vérité est que les auteurs, comme les journalistes, comme les militants , comme les artistes n’osent plus. Et que c’est cette cause majeure qu’on feint d’ignorer. Ils fixent tous l’étranger en oubliant le front intérieur laissé aux intégristes qui nous lâchent, de temps à autre, des miettes, des passages sans issues, pour mieux nous anesthésier. L’empire et l’époque leur sont favorables. Ils rêvent désormais grand et ils n’ont pas tort.
Et cette guerre des plumes psalmodiée comme le jihad, contre qui sera-t-elle menée. Contre d’autres écrivains j’imagine ! Pour soulager du poids de leurs travaux l’intégrisme et l’autoritarisme qui sévissent. Se tromper à ce point d’ennemi est une sévère dérive.
Reste que le plus grand service qu’ont rendu les extrêmes droites françaises et algériennes à leurs peuples respectifs, est d’avoir permis de re-visibiliser nos écrivains.
Et même s’ils m’agacent parfois, j’apprécie les œuvres de ces garçons ! Et j’aime aussi les savoir libres de leurs gestes et paroles.
Mais il n’est pas farfelu de leur rappeler que se pavaner dans les palais, ou se vautrer dans les honneurs, c’est avoir un pied dans la courtisanerie et l’autre dans le déshonneur.
Myassa Messaoudi