J’écris ces lignes avec une colère noire. Une rage que je ne sais plus contenir. On a encore défiguré Aïn Fouara. Encore. La statue emblématique de Sétif, notre fierté, notre mémoire, notre femme de pierre. Défigurée. Profanée. Massacrée. Comme on viole une mère sous les yeux de ses enfants.
Je suis né à Sétif. J’y ai grandi. J’ai bu l’eau de cette fontaine des centaines de fois, des milliers. Gouleyante, glacée, pure. Et quand je me penchais pour m’abreuver, c’est elle, la statue, qui m’accueillait. Silencieuse, digne, belle. Elle ne disait rien, mais elle veillait. Elle nous protégeait. Elle nous disait que l’Algérie pouvait être belle, tendre, libre. Aujourd’hui, on l’a brisée encore. Et c’est tout un peuple qu’on insulte.
Ce n’est pas juste un ivrogne. Pas juste un fou. Qu’on ne vienne pas m’endormir avec des histoires d’alcool et d’égarement. L’alcool n’est qu’un prétexte commode. Ce n’est pas la première fois. Ce ne sera pas la dernière. On l’a déjà attaquée en 1997, pendant la décennie noire, au nom d’un islam de mort qui tue. En 2006, encore. En 2017, ils lui ont arraché le visage et la poitrine. En 2022. Et maintenant, en 2025. Toujours le même acharnement. Toujours le même crime. Contre une femme. Contre la nudité. Contre l’art. Contre la beauté. Contre nous.
Ceux qui font ça ne s’en prennent pas à une simple statue. Ils visent ce qu’elle incarne. Une femme nue, debout, fière, libre et qui défie l’obscurantisme. Un corps féminin assumé dans l’espace public. Une œuvre d’art. Une mémoire réappropriée par les Sétifiens, par le peuple, par les passants. Par les amoureux. Par les enfants. Par ceux qui boivent à sa source. Ces dégénérés ne supportent pas cette liberté-là. Ils veulent tout recouvrir d’un voile de peur et de soumission. Ils veulent faire taire jusqu’à la pierre.
Mais moi, je ne me tairai pas.
Je hurle ma colère, parce que ce n’est pas un fait divers. C’est un saccage. C’est une guerre. Une guerre contre la beauté, contre la culture, contre la femme. Une guerre menée à coups de marteau, de haine, de lâcheté. Et nous, que faisons-nous ? On colmate. On répare. On nettoie. Et on attend la prochaine attaque. Mais jusqu’à quand ? Jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien ? Jusqu’à ce que la statue soit réduite en gravats, et qu’un silence complice recouvre tout ?
Où sont les autorités ? Où sont les caméras, la protection, la justice ? Où sont les voix pour dire : ça suffit ? Pourquoi cet acharnement n’est-il pas traité pour ce qu’il est : du terrorisme culturel comme pour les Bouddhas de Bamyan ? Pourquoi cette femme de pierre est-elle si seule ?
J’ai mal, oui. Mal de voir qu’on peut s’en prendre ainsi à ce qui nous élève. Mal de voir qu’en Algérie, en 2025, on ne protège même pas une œuvre d’art, un patrimoine aimé de tous. Mal de voir que la haine est plus tenace que l’amour. Et pourtant, je refuse d’abdiquer.
Moi, enfant de Sétif, je le dis haut et fort : Aïn Fouara est notre honneur. Elle est la mémoire de nos jours heureux. Elle est cette Algérie qu’on aime, quand elle ose être belle, nue, digne, irréductible. Et c’est de moins en moins le cas.
Qu’on le sache : chaque coup porté à son visage est une gifle à tous les Sétifiens. À tous ceux qui aiment encore ce pays. À tous ceux qui refusent la laideur imposée.
Je demande justice. Je demande protection. Je demande qu’on s’élève enfin, qu’on crie notre refus. Assez de silences. Assez d’excuses. Assez d’évitements.
Aïn Fouara est blessée. Mais moi, moi je saigne.
Kamel Bencheikh, écrivain
La réparation, c’est possible; la protection, difficile d’imaginer un endroit plus sûr !
Vous êtes de Setif et savez donc que la ville ne manque pas de casernes militaires; une d’entre elles est quelques pas de Ain El Fouara. Et ce n’est n’est pas une question d’efficacité puisqu’un pet de chat dans le coin le plus perdu du pays se sait dans les QG en une fraction de seconde.
Ceci sans parler de la police, gendarmerie m, police communale, agents en civils.
Il mérite bien une peine, mais 10 ans pour une statue vestige de l’occupation coloniale, c’est vraiment n’importe quoi. Et ça va attiser la colère même des citoyens algériens. Sansal qui a voulu amputer le territoire national et qui a insulté nos concitoyens de l’ouest ainsi que Belguit qui, dés qu’il ouvre la bouche et nous insulte, un d’entre nous meurt de crise cardiaque n’ont pri que 5 ans …