« Nous avons décidé de retirer de notre site la tribune du politiste Paul Max Morin sur le récent voyage d’Emmanuel Macron en Algérie, publiée jeudi 1er septembre. Ce texte reposait sur des extraits de citations qui ne correspondent pas au fond des déclarations du chef de l’Etat. Si elle peut être sujette à diverses interprétations, la phrase « une histoire d’amour qui a sa part de tragique » prononcée par M. Macron lors de la conférence de presse n’évoquait pas spécifiquement la colonisation, comme cela était écrit dans la tribune, mais les longues relations franco-algériennes. Le Monde présente ses excuses à ses lectrices et lecteurs, ainsi qu’au président de la République. »
C’est par ce message inédit dans l’histoire de la presse que le journal sépulcrale, Le Monde, s’adresse à ses lecteurs pour justifier le retrait de la tribune signée de Paul Max Morin, chercheur associé au Centre de recherche politique de Sciences-Po intitulée « Réduire la colonisation française en Algérie à une histoire d’amour parachève la droitisation d’Emmanuel Macron sur la question mémorielle », publiée dans Le Monde ce 1er septembre, en fin de matinée.
Paul Max Morin constate d’abord qu’en « cinq ans, la colonisation sera passée, dans la syntaxe présidentielle, d’un « crime contre l’humanité » (2017) à « une histoire d’amour qui a sa part de tragique ». Le chercheur estime ainsi que « la droitisation du paysage politique français a amené Emmanuel Macron à durcir sa ligne ».
Selon le chercheur la phrase présidentielle s’inscrirait ainsi « dans la continuité d’une idéologie coloniale qui n’a jamais cessé d’utiliser des euphémismes pour masquer les réalités sociales et politiques. »
Par ailleurs, Paul Max Morin rappelle que toutes les archives sur la colonisation française et la guerre d’Algérie n’ont pas été ouvertes. Le chercheur n’y va pas par quatre chemin. Il estime de juste que la colonisation n’est pas et ne peut pas être une histoire d’amour, contrairement à ce qu’a soutenu Emmanuel Macron à Alger devant Abdelmadjid Tebboune.
Le chercheur a démonté le changement de ton de Macron sur la colonisation : «En cinq ans, la colonisation sera passée, dans le verbe présidentiel, d’un “crime contre l’humanité” (2017) à “une histoire d’amour qui a sa part de tragique” (2022).» A peine croyable comme changement de ton.
La tribune du chercheur a suscité la colère de l’Elysée, poussant donc Le Monde à la retirer ? Dans quel monde sommes-nous ? Et dire qu’elle a été discuté avec la rédaction comme l’a déclaré l’auteur à ChekNews de Libération.
Qu’y a-t-il donc de fallacieux dans l’analyse de Paul Max Morin qui justifierait le retrait de la tribune des colonnes du journal ?
Au-delà du malaise que suscite ce retrait au sein même de la rédaction de ce journal dont le sérieux et la neutralité ne sont pas à démontrer, c’est la forme même de ce message d’excuses qui invite à l’étonnement !
En effet, selon Le Monde « Ce texte reposerait sur des extraits de citations qui ne correspondraient pas au fond des déclarations du chef de l’État ». En guise de démonstration le journal se focalise sur une seule phrase, celle où il est question « d’histoire d’amour qui a sa part de tragique. » !?
Là où le message du journal prend des allures ubuesques, c’est dans la gaucherie de justification de la non-correspondance des envolées de Paul Max Morin avec le fond des déclarations de Macron. Voilà qui est on ne peut plus clair ! Que se passe-t-il à la rédaction du Monde pour s’illustrer par un tel rétropédalage ? Pourtant ce journal a été à l’origine de l’une des plus importantes enquêtes qui a dépoussiéré la question de la torture en Algérie ? Avec cette volte-face il est bien difficile de ne pas y voir un fil à la main des médias dans l’hexagone !? Pardon monsieur le président !
Pauvre France !
Kacem Madani