Kamel Rezig, figure controversée du gouvernement, cristallise aujourd’hui les critiques des milieux économiques et politiques.
Les débats qui agitent le Parlement et les acteurs du secteur mettent en évidence une urgence : concevoir une politique commerciale plus cohérente, capable d’éviter les chocs successifs qui perturbent le marché et fragilisent les entreprises.
Au-delà de leurs répercussions internes, les décisions du ministre alimentent aussi des tensions diplomatiques. L’Union européenne a ouvert une procédure de règlement des différends, accusant Alger de mesures « quasi-protectionnistes » contraires à l’accord d’association de 2005.
Un gouvernement sous pression
Sur le plan interne, la contestation a poussé l’exécutif à agir. Le 3 août, une réunion interministérielle a décidé de libérer exceptionnellement toutes les marchandises bloquées dans les ports, aéroports et zones sous contrôle douanier.
Pour beaucoup d’acteurs économiques, le mal est pourtant déjà fait. « Les entreprises supportent des charges financières lourdes, notamment les salaires, sans pouvoir maintenir leur production», a alerté le député d’El Oued, Tahar Ben Ali, qui plaide pour des mécanismes plus souples et mieux concertés.
Dans l’opposition, Abdelouahab Yagoubi, élu du Mouvement de la société pour la paix (MSP), dénonce une « improvisation totale ». Selon lui, la réforme a été imposée sans coordination intersectorielle, ni préparation administrative ou numérique. Elle a, ajoute-t-il, entraîné des pénalités pour la trésorerie publique et terni la crédibilité commerciale du pays.
Des mesures qui déstabilisent le marché
Deux décisions récentes du ministère illustrent ces tensions. D’abord, le « programme prévisionnel d’importation », qui oblige les opérateurs à soumettre un plan détaillé avant tout dédouanement, a provoqué un blocage inédit des ports et perturbé les chaînes d’approvisionnement. Malgré la levée exceptionnelle des marchandises, les entreprises restent fragilisées.
Ensuite, l’autorisation d’exporter une partie de la production d’œufs, censée sauver une filière avicole en crise, a entraîné une flambée des prix. Le plateau de 30 unités, vendu environ 300 DA début juillet, dépasse désormais 540 DA. La raréfaction de l’offre locale, amplifiée par l’exportation, a accentué la volatilité du marché et pesé sur le pouvoir d’achat des ménages.
Une stratégie contestée
Ces mesures s’inscrivent dans une politique engagée depuis 2021 visant à réduire la dépendance aux importations. Si la facture annuelle est passée de 60 à 40-50 milliards de dollars, la méthode, jugée trop administrative, crée des déséquilibres : importations en hausse de 24 % au premier trimestre 2025, exportations hors hydrocarbures en baisse de 13,4 % et inflation persistante.
Avec plus de 70 milliards de dollars de réserves et l’absence de dette extérieure, l’Algérie conserve une marge financière. Mais l’économie reste dépendante des hydrocarbures, et la confiance des acteurs économiques comme des partenaires étrangers s’effrite. Et quand des incompétents sont mis aux postes aussi stratégiques, il faut s’attende à toutes les derives possibles et imaginables.
Samia Nait Iqbal