Mardi 27 avril 2021
Ali Yahia Abdennour, la mort d’un juste !
Le moudjahid, avocat et militant des droits de l’homme, Ali Yahia Abdenour, est décédé dimanche 25 avril 2021 à l’âge de 100 ans. Il a été inhumé lundi après-midi au cimetière de Ben Aknoun (Alger) en présence d’une foule compacte – des compagnons de route et de lutte qui ont partagé son combat, mais aussi des jeunes militants et des femmes – qui a accompagné le doyen des défenseurs des droits humains à sa dernière demeure.
Les Algériens pleurent Ali Yahia Abdenour. Ce grand homme si simple aux grandes valeurs humanitaires qui a consacré toute sa vie pour la défense des droits de l’homme.
Ali Yahia Abdenour, né il y a 100 ans dans un village au pied du Djurdjura, est un nationaliste de première heure. Il a consacré sa vie à la lutte pour la démocratie et le respect des droits de l’homme, d’abord à la lutte de libération de l’Algérie au sein du PPA-MTLD de 1945 à 1949 puis a rejoint le FLN en 1955 avec la fondation de l’UGTA comme organisation de masse en soutien au FLN.
Ainsi, Ali Yahia Abdenour, devient l’interlocuteur de Larbi Ben M’hidi et de Abane Ramdane dans le déclenchement d’une grève générale de huit jours du 28 janvier 1957, au moment de l’ouverture du débat de la question algérienne à l’ONU en 1957, ce qui lui a valu la prison de 1957 à 1960. A sa libération, en 1960, il a été expulsé en France, puis en 1961 il a rejoint la Tunisie et avec le soutien de Krim Belkacem et de Benkhedda, il a repris l’UGTA, dans laquelle il défend la liberté de position de l’UGTA face aux offres de service qui viennent des différents clans du FLN et de l’État-Major général. En 1962, Ali Yahia Abdenour s’emploie à imposer la centrale syndicale comme partenaire unique des questions sociales.
A la libération, Ali Yahia Abdenour choisit la voie politique qui est sa profonde raison. En 1963, après la déception de l’échec de l’assemblée constituante, il rejoint Aït Ahmed et d’anciens officiers de l’ALN pour fonder le FFS qu’il quittera en novembre de la même année. A 47 ans, après des études d’avocats, Ali Yahia Abdenour ouvrira un cabinet d’avocat au centre d’Alger qui deviendra un centre de contacts politiques en dehors du FLN.
Avocat à la cour d’Alger et à la Cour suprême, il plaide notamment devant la Cour de sûreté de Médéa et le tribunal militaire de Blida. En 1980, il se constitue pour défendre les 24 détenus du printemps berbère. Son soutien aux victimes de la répression, de toutes les répressions, son combat démocratique dédié a la défense des droits de l’Homme l’ont de nouveau conduit en prison en 1983, 1985 et 1987.
Après l’ouverture politique qui a suivi les émeutes d’Octobre 1988, Abdenour Ali Yahia est porté à la tête de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH) ce qui le conduira naturellement à être le premier président de la Ligue algérienne des Droits de l’Homme (LADH).
Pendant la décennie noire, il a pesé de tout son poids pour le règlement politique de la crise, Ali Yahia Abdenour n’a cessé d’oeuvrer pour la paix et écrit dans son livre La Dignité humaine qui reste un témoignage éclairant sur l’Algérie indépendante. «Quand les droits de l’homme sont bafoués, je ne cherche pas à savoir si la victime est islamique, éradicatrice ou démocrate», avant de rajouter: “Nous sommes dans l’univers manichéen où l’on peut dénoncer la torture d’Octobre 1988 tout en se taisant ou même en justifiant celle qui sévit depuis juin 1991 avec une rare violence. Pourquoi une telle discrimination entre les victimes de l’état de siège d’Octobre 1988, celles de l’état de siège de juin 1991 et de l’état d’urgence du 9 février 1992 toujours en vigueur», écrit-il.
Partie prenante du Contrat de Rome, qui a vu les forces représentatives du moment signer le contrat national. Dans La Dignité Humaine, Ali Yahia Abdenour défend ce choix politique en disant : «Le contrat national dont chacun peut mesurer la densité et la richesse demeure l’événement politique le plus important de ces dernières années.» L’avocat n’a cessé de prendre des initiatives pour le droit humain et malgré les déchaînements de violence contre ses positions, il est resté droit dans ses bottes et n’a pas hésité à dénoncer les magouilles du clan Bouteflika, la corruption institutionnalisée qui atteint des niveaux industriels
En 2011, a plus de 90 ans, il était une figure de proue des rassemblements de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) a meme se faire bousculer par la police lors de manifestations pacifiques. En 2018, le système Bouteflika a décidé de l’expulser même de son modeste appartement Algérois ainsi le vieux routier de la défense des Droits humains se retrouve dans la rue aux côtés des millions de manifestants lors du soulèvement du 16 février 2019 pour ensuite cosigner, en mai 2019, un appel interpellant le commandement militaire et l’exhortant à «nouer un dialogue franc et honnête avec des figures représentatives du mouvement citoyen (hirak), des partis et des forces politiques et sociales qui le soutiennent, afin de trouver au plus vite, une solution politique consensuelle».
Da Abdenour fut un brillant avocat, un militant intègre aux grandes valeurs humaines. Il a vécu en digne, il est mort en digne et la seule chose qu’il regrettait dans sa vie est qu’il ne s’était pas assez occupé assez de ses enfants.
Riposte internationale s’incline devant l’Homme, devant l’avocat et devant l’illuminé intellectuel. Nous présentons nos sincères condoléances à la famille Ali Yahia ainsi qu’à tous les militants et défenseurs des droits et libertés . Repose en paix Dda Abdenour. Tu as toujours été juste et défendu les causes nobles des droits de l’homme. Que Dieu t’accueille dans son vaste paradis.
Paris le 27 avril 2021
Riposte internationale
Pour le bureau Fédéral
Ali Ait Djoudi