Amel avait un grand cœur et l’Algérie dans le cœur. Ce matin funeste du 26 janvier 1997, la main assassine de l’islam politique avait frappé encore une fois une femme, une autre. C’était Amel, pétrie de vie, belle et digne comme une jonquille qui fleurit sur un tas de fumier.
Les islamistes, à cette époque, ne tuaient pas pour nous endeuiller mais pour nous attrister. Si l’assassinat abject d’Amel peut trouver un jour la voie du deuil, il nous attristera à jamais. C’est pour cette raison que les islamistes tuent, c’est l’essence même de leur idéologie, c’est le nouveau totalitarisme d’aujourd’hui.
Parce que Amel refusait de vivre dans une société prise dans l’étau esclavagiste de l’islamisme, prisonnière d’un code de la famille, cruellement infâme, qu’elle avait résisté, avec conviction, dignité et courage, au diktat des fous d’Allah, à la république islamique que le FIS avait promis d’instaurer s’il arrivait au pouvoir.
Insoumise, pugnace et profondément imprégnée des valeurs universelles de modernité, de progrès sociale et de démocratie, Amel, par son opposition viscérale aux injonctions moyenâgeuses des islamistes, son courage à garder la tête haute, une tête bien pleine, une tête bien faite, dans une société sous le feu incandescent des attentats islamistes, a été le symbole de l’Algérie qui résiste. Amel ne croyait qu’à une seule Algérie possible, celle de la vie contre la mort, celle du vivant contre le dominant.
Chez Amel il n’y avait pas de lendemains qui chantent. Il n’y avait que des aujourd’hui qui bruissent. Chaque jour était un combat de plus à gagner, une parcelle de progrès à libérer, des têtes basses à relever. La seule vraie révolte qui comptait pour elle, c’était celle des consciences mortes en nous, des territoires occupés par l’islam politique, et de ces femmes que l’on soumettait à coup de couteau sur la gorge.
Telle une hirondelle, Amel revient aujourd’hui raviver en nous l’ultime combat qui nous anime, l’ultime étincelle qui nous rallume, le combat pour lequel des milliers de femmes, de partout dans le monde, des plus lointaines sociétés rétrogrades et fascisantes à la plus âpre des luttes civilisatrices menées contre la pègre islamiste avilissante, l’inéluctable victoire de la vie contre l’obscurantisme.
Mohand Ouabdelkader