Brahim Boughali, le président de l’APN, a un problème avec la vérité et les réalités qui président le pays. Il reproduit avec dévouement la politique moutonnière de l’ère Bouteflika.
Quand on est au pouvoir on peut ne rien se refuser, y compris la forfaiture. M. Boughali a déclaré sans risque d’être remis en cause dans les très dociles travées de l’APN que l’Algérie « avance sur la voie de la véritable pratique démocratique promise par le Président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune ».
Retenez bien « la véritable pratique démocratique » ! Une expression qui balaye tout ce qui s’est fait jusqu’à présent dans le pays et passe du coup un bon coup de brosse à Tebboune. Il faut croire qu’on n’est pas loin des inénarrables « fakhamatouhou ».
Au-delà de la formule, ampoulée qu’elle est, l’assertion prête à sourire tant elle jure avec la réalité du pays. Car finalement, Tebboune a-t-il besoin de cette cour de laudateurs pour exister ? C’est à le croire.
Car avec M. Boughali on n’est pas seulement dans la connivence, mais carrément dans l’asservissement. Pourtant, le président de l’APN devrait avoir l’humilité de ne pas en rajouter. Le parlement qu’il représente n’est « élu » que par la grâce de 23% d’Algériens. Donc plus de 85% du peuple algérien n’a pas dit son mot. C’est l’une des premières leçons de démocratie quand on veut la respecter.
Ensuite, il faudra que quelqu’un dessille les yeux de M. Boughali et l’inviter à cesser de se contenter de cette presse réduite à relayer la voix de son maître. S’affranchir des œillères imposées par la fonction. Parce qu’il y a une réalité autrement moins prosaïque pour les autorités en place. Elle court dans les marchés, les rues des quartiers populaires, dans les douars et villages les plus reculés.
Après deux années de manifestations populaires inédites dans l’histoire algérienne, la société est anesthésiée par la crise d’abord sanitaire puis économique. La paranoïa, imposée par le pouvoir aspire les meilleures volontés dans le découragement.
La scène politique nationale est désormais congelée. Les partis sont réduits à de simples adresses postales. Les rares qui essayent de porter une autre voix que celle des dirigeants sont soumis à la censure et aux pressions administratives les plus abracadabrantesques. Si l’on ajoute à ce tableau l’immobilisme économique avec ce qu’il charrie comme l’absence de visibilité, il y a lieu de croire que la situation n’est – hélas ! – pas celle que décrit le président de la Chambre basse.
Faut-il terminer sans évoquer l’arbitraire dont sont victimes plus de 300 détenus d’opinion. Dont six femmes. Leur tort ? Avoir osé réclamer une autre gouvernance, une Algérie meilleure, plurielle et démocratique. On ne peut construire un pays contre son peuple. On ne peut non plus gouverner longtemps par l’esbroufe, le mensonge et la manipulation des sentiments du peuple. Le précédent de Bouteflika devrait servir de leçon.
Yacine K.