Au Burkina Faso, un Français a été interpellé le 28 juillet par les services de renseignements. Il est depuis détenu dans un lieu inconnu. Jean-Christophe Pégon est le directeur au Burkina de l’ONG Inso, qui fournit des informations sécuritaires aux organisations humanitaires. Le Français est soupçonné d’espionnage par le régime militaire en place. Quatre salariés burkinabè d’Inso ont à leur tour été arrêtés la semaine dernière.
Ouagadougou n’avait pas communiqué officiellement sur l’arrestation de Jean-Christophe Pégon, et son ONG Inso ne voulait pas compliquer les discussions engagées avec les autorités burkinabè pour sa libération.
L’affaire ayant finalement été médiatisée en France ce mercredi 3 septembre, cette précaution est désormais inutile. Quatre salariés burkinabè de l’ONG ont à leur tour été arrêtés vendredi 29 août par la Sécurité d’État.
Cela fait donc plus d’un mois que Jean-Christophe Pégon est détenu par les services burkinabè dans un lieu tenu secret. Sollicité par RFI, le ministère français des Affaires étrangères n’a souhaité faire aucun commentaire. Son organisation Inso affirme qu’il se porte bien, mais ne s’exprime pas sur les discussions en cours. Mêmes réserves en ce qui concerne ses quatre collègues burkinabè.
Veille sécuritaire pour les ONG
Des discussions forcément délicates, car elles portent sur des soupçons d’espionnage. Inso, en français « organisation internationale des ONG pour la sécurité », est basée aux Pays-Bas. Elle est spécialisée dans la veille sécuritaire pour les humanitaires qui se déplacent sur le terrain. Présente dans 26 pays à travers le monde, elle fournit des informations à plus de 1400 ONG. Inso recense les incidents sécuritaires et ses analyses aident les ONG à organiser leurs missions dans les zones de conflit. Pour ce qui concerne le Burkina Faso, il s’agit donc des régions où s’affrontent les jihadistes du Jnim, liés à Al Qaeda et l’armée burkinabè avec ses supplétifs VDP (Volontaires pour la défense de la patrie).
« Données à caractère sensible »
Mais les autorités militaires en place à Ouagadougou depuis le coup d’État d’octobre 2022 voient cette activité d’un mauvais œil. Trois jours après l’arrestation du directeur-pays d’Inso, Ouagadougou a suspendu le 31 juillet les activités de l’ONG pour trois mois renouvelables. Motif officiel : « collecte de données à caractère sensible sans autorisation préalable, contrairement à son objet d’assistance humanitaire ».
Tout comme ses alliés malien et nigérien de l’Alliance des États du Sahel, le régime du capitaine Traoré dénonce régulièrement des tentatives de coup d’État ou des conspirations internationales. Les trois régimes militaires putschistes ont également fait de la France leur bête noire commune. Un autre Français est d’ailleurs actuellement détenu au Mali depuis le 14 août : arrêté en même temps que des dizaines de militaires maliens, il est, comme eux, accusé de « tentative de déstabilisation ».
Précédents burkinabè
Au Burkina, un Français travaillant pour une entreprise minière australienne avait déjà été accusé d’espionnage l’été dernier. Il avait été relâché au bout de deux semaines. En 2023-2024, quatre agents de la DGSE française avaient été retenus prisonniers à Ouagadougou pendant plus d’un an. Ils étaient venus au Burkina dans le cadre d’une mission de coopération sécuritaire avec le pays, en lien avec les services burkinabè. C’est finalement une médiation du Maroc qui avait permis leur libération.
Avec Rfi