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Captatio benevolentiae ou l’art de crétiniser les masses…

Bardella.

Le danger RN

Je ne sais plus où je l’avais lu, mais je vous assure que c’est une vérité vraie : l’Agora des Athéniens n’a rien de novateur, et c’étaient les Berbères qui avaient inventé la démocratie. Oui, les Berbères comme moi, de chez moi, en Afrique du Nord.

Foutaise dites-vous ! Mais est-ce un drame si des Africains furent à l’origine de la démocratie ? L’exploit n’est pas exceptionnel, en tout cas : les Égyptiens, des Africains aussi comme eux et moi, furent  peut-être bien avant eux, à l’origine des pyramides ! Trêve de plaisanterie, « Tadjemâat », le conseil du village, n’en déplaise à tous les marchands de haine, fut ma foi aussi vieux que Agora et les pyramides et, dirais-je même, la plus vieille forme démocratique au monde.

Mais, chut, cela pourrait causer une sévère montée d’adrénaline à certains de nos amis européens ou occidentaux de l’extrême droite qui prendraient, sans l’ombre d’un doute, mes propos pour des carabistouilles d’un fou « tiersmondiste ».

J’éviterai donc ce sujet pour en prendre maintenant un autre, moins polémique, mais autrement plus important par les temps qui courent : « les origines du totalitarisme ». Attention, je ne fais là que copier le titre de Hannah Arendt, mais pour parler d’un autre drame : le drame de ce que l’on considère aujourd’hui comme des vieilles démocraties dans le Vieux continent. Bon, on ne sait plus qui a fait ce standard de classement et quel est le degré de sa compatibilité au prisme de la réalité! C’est un autre débat

Revenons à nos moutons : le totalitarisme ou comment naît-il en pleine démocratie ? En rhétorique, on parle de « captatio benevolentiae« , c’est-à-dire, en termes terre-à-terre : faire des discours aux phrasés emberlificotés, assez bien soignés et avec une certaine démagogie baratineuse, sans aucun lien avec la réalité, juste pour voler le cœur de son auditoire.

Bref, promettre monts et merveilles, afin qu’on ait les bonnes grâces de ceux qui nous écoutent, les galvaniser et les détourner en notre faveur, en suivant les règles démocratiques.

Dans captatio benevolentiae, la recette populiste est facile à trouver : on dégoupille à tout va la bouteille des clichés et des stéréotypes. L’ennemi à abattre : c’est l’autre, ce sont les autres, tous ces autres, immigrés ou réfugiés, venus voler le pain des nôtres, salir notre pays et prendre nos femmes.

Captatio benevolentiae, c’est la bible des démagogues, tant en démocratie qu’en temps de dictature. Les démagogues sont ceux qui parviennent à séduire dans l’opposition, et à décevoir, une fois au pouvoir, aux manettes du grand bateau.

Cela pourrait concerner, par exemple, aussi bien Hitler en Allemagne Nazie, Mussolini en Italie fasciste, Juan Peron en Argentine que  Jordan Bardella en cette France dite « démocratique ».

Conquérir le pouvoir avec de fausses promesses, « it’s a piece of cake » comme disent les Anglais, mais prendre le pouvoir et gérer les masses, c’est comme dans le mythe de Sisyphe : on fait remonter le rocher jusqu’au sommet de la montagne avant qu’il (le rocher) nous fasse descendre jusqu’en bas.

Cela dit, la rhétorique vaseuse en dehors du circuit du pouvoir va finir par se heurter à la réalité de l’exercice du pouvoir lui-même, et c’est là que les catastrophes surviennent. Les catastrophes, c’est la nazisme, c’est le fascisme, c’est le populisme, c’est la xénophobie, c’est la dictature et sui generis.

Les populistes-démagogues font usage du discours comme outil de persuasion avant qu’il ne se transforme, à l’épreuve du pouvoir, en arme de destruction massive. Les populistes ne savent exceller que dans le discours, et c’est là que se trouve le véritable problème : le danger réel qui pourrait échapper au contrôle des démocraties modernes…  

Kamal Guerroua

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