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Carpe diem et la supercherie du futur

Futur

Image par Cedric Franchetti de Pixabay

Le futur, on le fantasme et on l’espère autant qu’on le redoute. Il est la voie vers un néant par une représentation de l’esprit qui n’a aucune limite puisque sa définition est qu’il n’est pas encore survenu.

Le passé est soustrait de notre pouvoir de le modeler car nous n’avons aucune prise sur lui. Mais le futur est une page blanche qui attend toutes les projections de craintes et de désirs, notre écriture le façonne librement.

Depuis des siècles, des astrologues prétendent nous le prédire. Madame Irma, avec ses cartes, sa boule de cristal et son marc de café, perce les mystères de l’au-delà jusqu’à la limite que permet le billet de monnaie qu’elle avait eu la prudence d’encaisser avant la séance de spiritisme.

La science prétend qu’elle n’existe que pour cet objectif de préparer l’avenir. Les statistiques trouvent des équations pour construire la tendance d’une droite à partir des données disponibles. La médecine nous fixe les limites biologiques comme ultime futur.

Il y a les utopistes comme les communistes qui ont toujours cru au « grand soir », celui qui allait apporter liberté et prospérité aux peuples après la révolution.

Il y a ceux qui nous en proposent des dates,  des chiffres magiques comme ce fut le cas de Nostradamus et que fait abondamment la littérature. Nous étions tous attentifs à la survenance de la très énigmatique année 1984 de George Orwell. C’est vrai que ce fut l’année de naissance de notre couple, c’est déjà une prédiction, non ?

Mais aussi les millénaristes, au basculement du second millénaire puis à celui du troisième. Qu’allait devenir le monde et l’humanité ? Était-ce les chevaux de l’Apocalypse qui allaient venir frapper à notre porte pour nous rappeler à son avertissement ultime avant l’anéantissement.

Le  cinéma nous propose des gigantesques bonds temporels avec Star Trek ou des retours vers le futur. Où est le futur et qu’est-il ? Un temps passé car nous en imaginons tellement les contours comme si nous les avions vécus ou finalement un temps présent puisque c’est à partir de là qu’on se l’imagine ?

La grammaire et sa conjugaison ont tenté de nous en donner une réalité avec le temps du passé antérieur. Comme pour en marquer la vraisemblance, elle l’a placé dans le mode indicatif qui est celui de la réalité.

On peut tout faire dire au futur et son contraire. Il est la proie aux délires, aux manipulations et aux excuses. Ces excuses qui nous permettent de décaler notre responsabilité au futur. « Oui, c’est promis », « Un jour viendra… » et ainsi de suite, le futur a bon dos pour être le réceptacle des promesses.

La plus grande supercherie sur la manipulation du futur, la championne depuis quatre millénaires, la religion. Un piège pour les faibles d’esprit à qui on offre une éternité au-delà de la mort. Des prairies où chevauchent des amazones, des rivières de miel et des saunas relaxants. Et pour ceux qui refusent de prendre la carte d’abonnement à la religion, les feus éternels.  

Le futur in abstracto n’existe pas tel que l’humanité l’a défini et s’en sert pour toutes ses projections et manipulations.  Le futur est en nous, c’est la promesse à la vie. C’est en nous que le mystère de la vie a misé pour que nous la remplissions de beauté, d’intelligence et d’humanisme. Le futur est né avec notre naissance.

Finalement, la plus grande sagesse est dans le célèbre vers en latin d’Horace, Carpe diem, quam minimum credula postero, « Cueille le jour présent sans te soucier du lendemain ». Vers que retiennent tous les lycéens du monde (les plus sérieux) par sa version courte,  Carpe diem.

Boumediene Sid Lakhdar

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