Philippe Chevallier est un humoriste, acteur et photographe français, né à Redon, en Ille-et-Vilaine. Sa carrière a été marquée par son duo comique avec Régis Laspalès, formé en 1981. Ensemble, ils ont conquis le public avec des sketches mémorables tels que Le train pour Pau et des spectacles comme C’est vous qui voyez ! Leur style humoristique, sur des caricatures du quotidien, a fait d’eux des figures incontournables de la scène française.
Cependant, après 33 ans de collaboration, le duo s’est séparé en 2016. Cette décision a surpris leurs fans. Selon Philippe Chevallier, Régis Laspalès souhaitait se consacrer au cinéma en solo, ce qui a marqué la fin de leur partenariat. Chevallier a exprimé une certaine tristesse face à cette séparation, mais il a également vu cela comme une opportunité de renouer avec ses aspirations personnelles.
Depuis, Philippe Chevallier a poursuivi sa carrière en solo, explorant de nouveaux horizons artistiques. Son dernier spectacle, Mozart au Paradis, est une œuvre originale mêlant musique et théâtre. Dans ce concert-lecture, il incarne un personnage désabusé qui découvre la joie et la lumière à travers la musique de Mozart. Accompagné par des musiciens talentueux, il interprète des œuvres emblématiques du compositeur, telles que, Une petite musique de nuit et La Marche Turque.
Son nouveau spectacle Mozart au Paradis, est une célébration de la beauté et de la grandeur de Mozart, offrant au public une expérience à la fois poétique et musicale.
Ce spectacle explore plusieurs thèmes principaux, inspiré par les écrits de Fabrice Hadjadj, mêlant musique, philosophie et spiritualité, le spectacle met en lumière une joie profonde et bouleversante, souvent associée à la musique de Mozart. Une joie décrite comme une préfiguration de la félicité céleste, la beauté et la grâce, à travers les œuvres emblématiques de Mozart, telles que, Une petite musique de nuit ou La Marche Turque, le spectacle célèbre la beauté intemporelle de sa musique, perçue comme un écho de la création divine.
Ce spectacle explore également les thèmes de la spiritualité et le salut, en établissant un lien entre la musique de Mozart et une quête spirituelle, suggérant que ses compositions incarnent une forme de grâce divine et une ouverture vers le paradis.
Philippe Chevallier, avec son talent d’humoriste, apporte une légèreté et une espièglerie qui rendent ces thèmes profonds accessibles à tous, brisant les barrières souvent associées à la musique classique.
En incarnant un personnage désabusé qui redécouvre la joie à travers Mozart, le spectacle invite à réfléchir sur la capacité de l’art à transformer et à élever l’âme humaine.
Un mélange unique de musique, de poésie et de philosophie qui fait de Mozart au Paradis une expérience à la fois intellectuelle et émotionnelle, célébrant la puissance de l’art pour toucher les cœurs et les esprits.
Le public a particulièrement apprécié la manière dont Philippe Chevallier a réussi à rendre accessible la musique classique de Mozart grâce à son approche humoristique et poétique. L’équilibre entre la profondeur des thèmes abordés, tels que la joie transcendante et la spiritualité, et la légèreté de son interprétation a été salué. Ce spectacle a attiré à la fois les amateurs de musique classique et ceux qui aiment l’humour, créant une expérience artistique unique et fédératrice.
Les critiques ont également noté la qualité de l’accompagnement musical. Les musiciens qui partagent la scène avec Chevallier ont su magnifier les œuvres de Mozart, leur donnant une intensité émotionnelle particulière. Le mélange entre textes philosophiques et musique classique a été perçu comme une célébration de la beauté et de l’art sous toutes ses formes.
Enfin, le spectacle a été reconnu pour son originalité et son caractère inspirant, permettant aux spectateurs de réfléchir sur le rôle de l’art dans la transformation intérieure et la recherche de sens.
Dans Mozart au Paradis, Philippe Chevallier est accompagné par les musiciens de l’Ensemble Bagatelle. Parmi eux, on retrouve Vincent Laissy au piano, qui est également le créateur du spectacle et responsable des arrangements musicaux. Il est rejoint par Lucile Dugué au violon et Aurore Alix au violoncelle.
Vincent Laissy, lauréat du Conservatoire de Paris, est un artiste accompli. En plus de son rôle dans Mozart au Paradis, il a composé des œuvres telles que Salve Regina et dirigé des productions musicales prestigieuses, notamment au Théâtre Traversière à Paris.
Philippe Chevallier continue de démontrer sa polyvalence et son amour pour l’art, que ce soit à travers l’humour, le théâtre ou la musique.
Le Matin d’Algérie : Vous êtes photographe, humoriste, comédien, qui est Philippe Chevalier ?
Philippe Chevallier : Si je savais vraiment qui je suis je serais le premier à en être informé en principe ! « Connais-toi toi-même » disait Socrate. J’avoue que je suis toujours en quête, l’écrivain franco-américain Julien Green disait : « Les grands événements sont intérieurs. » En réalité les événements nous portent sans que l’on ait vraiment son mot à dire et l’on essaie simplement d’agir personnellement en vue de notre bien-être ou tout au moins pour apaiser notre difficulté d’être.
Plus précisément, le rôle de l’humoriste et du comédien n’est pas éloigné de celui du photographe : le sens de l’observation au service de celui ou de ceux qui à leur tour nous observent afin de rentrer en relation, tout simplement.
Le Matin d’Algérie : Comment décririez-vous votre rencontre avec Régis Laspalès et la naissance de votre duo ?
Philippe Chevallier : Une rencontre au cours de théâtre, le cours Simon a suffi pour sceller d’abord une amitié et ensuite une envie d’écrire et de jouer ensemble : il y a chez nous une « complémentarité » qui était comme une évidence ! Nous avions ce que j’appelle un fond commun de placement : une éducation qui nous rapprochait dans notre attachement réciproque à ce que j’appellerais la pesanteur familiale.
Des parents très ouverts d’esprit mais attachés à certaines traditions qui pouvaient l’un et l’autre nous inhiber mais qui nous poussaient à en rire. Un exemple, la grand-mère de Regis lui tricotait des pulls qu’il n’osait pas porter en allant au lycée, idem pour moi avec ma chère mère. Nous étions les seuls adolescents au lycée, lui à Paris et moi à Nantes à porter des vêtements qui ne nous plaisaient pas forcément mais que l’on mettait quand même pour faire plaisir à grand-mère et à maman.
Croyez-moi, quand on se rencontre 10 ans après sur les bancs d’un cours de théâtre, ça crée des liens. Ensuite la complémentarité, un introverti et un extraverti, un taiseux et un bavard, on a joué pendant 35 ans le mythique duo de l’Auguste et du clown blanc.
Le Matin d’Algérie : Quel est le sketch ou spectacle qui vous tient le plus à cœur dans votre carrière avec Régis Laspalès ?
Philippe Chevallier : J’aime tous les sketches que nous avons écrits et joués ensemble, le plus populaire est sans doute celui du train pour Pau, mais il y a aussi celui du week-end chez les amis ou des patelins. Notre passage chez Philippe Bouvard, après avoir écrit un premier spectacle intitulé, Pas de fantaisie dans l’orangeade, nous a appris que lorsqu’on veut glisser sur le terrain de l’absurde il faut partir de la réalité afin de se faire comprendre. C’est seulement après que l’on peut amener le public où on veut.
Le Matin d’Algérie : Quels défis avez-vous rencontrés en tant que duo humoristique et comment les avez-vous surmontés ?
Philippe Chevallier : Le « défi » comme vous dites est permanent , il ne vient pas de l’extérieur, de telle ou telle circonstance mais plutôt de l’intérieur, j’en reviens à la phrase de Julien Green, il s’agit pour l’artiste qui écrit de travailler comme un artisan et de créer des choses qui lui plaisent avec l’espoir que cela plaira aussi au plus grand nombre. Mais l’on est soi-même son baromètre. Il y a le travail et aussi un état de grâce qui fait que, malgré vous, vous plaisez au public, c’est là qu’il faut être fidèle à soi-même et à ceux qui vous regardent.
Le Matin d’Algérie : Pourquoi avez-vous décidé de vous séparer en 2016, et comment cette décision a-t-elle impacté votre carrière ?
Philippe Chevallier : Notre séparation a malheureusement été unilatérale, elle est le fait de Regis et c’est un choix qu’il assume tout seul. Je le regrette profondément mais je n’y puis rien.
La raison profonde de cette décision, je ne la connais ni ne la comprends, Regis était désireux de faire du cinéma et c’est vrai que nous en avons fait assez peu, or il attribuait cette déficience de notoriété quant à l’image au fait que l’on nous associait en permanence, ce qui d’après lui était un handicap auprès des réalisateurs et producteurs, résultat, on est obligés de faire du théâtre chacun de notre côté, c’est une hypothèque sur notre popularité !
À chaque fois que je monte dans un taxi, le chauffeur, souvent algérien, marocain ou tunisien me dit à quel point nous sommes appréciés dans les pays du Maghreb et combien le public regrette de ne plus nous voir. Cela me touche beaucoup : nous sommes Régis et moi très « français » et de ce fait avons vocation à une sorte d’universalité ! Je dis ça évidemment en toute modestie et comme disent les juristes « toutes choses égales par ailleurs ! » L’universalisme de la rigolade, c’est extrêmement flatteur et c’est un immense compliment.
La décision de mon partenaire de casser le duo au prétexte qu’il ne trouvait pas complètement dans notre carrière la satisfaction désirée me fait penser à un nageur qui partirait du Havre pour aller à New York à la nage, arrivé épuisé devant la statue de la Liberté il se dit, c’est vraiment épuisant cette traversée, je retourne au Havre, quel gâchis !
Le Matin d’Algérie : En dehors de l’humour, vous êtes également photographe. Comment cette passion influence-t-elle votre créativité ?
Philippe Chevallier : La photographie a été pour moi une bulle d’air, un espace d’aération artistique qui me permettait de concrétiser, de rendre tangible un univers intérieur fantasmatique. Cette image de la femme que j’avais en tête devenait une réalité accessible à mon propre regard et à celui des autres. C’est là que je vois une différence essentielle entre la peinture et la photographie, la peinture est la translation de l’extérieur vers l’intérieur, c’est à dire la vision personnelle de l’artiste alors que la photo est une objectivisation de son univers intérieur, le parcours est inversé en quelque sorte.
Quant au mélange des genres il est difficile à pratiquer en France, contrairement aux pays anglo-saxons. En outre j’ai toujours pensé que l’érotisme et l’humour ne font pas toujours bon ménage ! Je serais donc un artiste bicéphale.
Le Matin d’Algérie : Mozart au paradis est votre nouveau spectacle, c’est un succès, Comment est né ce spectacle ?
Philippe Chevallier : Le spectacle Mozart au Paradis est une idée du pianiste Vincent Laissy. Quand il m’a sollicité pour illustrer le récital de son trio Bagatelle sur Mozart avec des textes du philosophe Fabrice Hadjadj, j’ai dit oui tout de suite. Je ne connaissais pas Fabrice Hadjadj mais le concept du spectacle m’a tout de suite emballé. Après avoir lu le texte, mon enthousiasme a redoublé.
Le texte est très beau et surtout surprenant par son écriture syncopée qui, à mes yeux, va à l’encontre de l’harmonie mozartienne telle qu’on peut communément l’entendre. Normal, puisque le philosophe nous explique sa « conversion » au grand compositeur qu’il considérait comme le fabricant d’une musique chichiteuse et gentillette, superficielle et artificielle avant d’en prendre la mesure profonde, mystique, religieuse et métaphysique.
C’est un bonheur de travailler avec des musiciens, ils sont tous les trois aussi légers et profonds que le grand Mozart dont la musique a bercé mon enfance puisque mes parents écoutaient beaucoup de musique dite classique.
Le Matin d’Algérie : Un mot sur votre collaboration avec Vincent Laissy et l’Ensemble Bagatelle ?
Philippe Chevallier : Notre entente est cordiale, c’est une ambiance de gaieté qui nous réunit, à laquelle se mêle une volonté affirmée de travail et de sérieux. J’ai l’habitude de travailler avec des comédiens, ces derniers sont souvent dilettantes et se prennent au sérieux, « Mes » musiciens » travaillent énormément et ont un esprit aérien !
Le Matin d’Algérie : Parlez-nous de la rencontre avec Fabrice Hadjadj ?
Philippe Chevallier : J’ai vu Fabrice trois fois, beaucoup de mes amis qui s’intéressent à la philosophie le connaissent ainsi que les catholiques pratiquants. Les échos à son sujet sont toujours élogieux et admiratifs, j’étais donc très impressionné la première fois que je l’ai rencontré et j’ai vu un homme d’une simplicité désarmante et d’une grande gentillesse, éloigné de toute pédanterie et sophistication démonstrative.
J’ai aussi eu l’occasion de rencontrer Fabrice avec une partie de sa famille, sa fille aînée et quatre autres enfants sur les dix qu’il a eus. Après j’ai rencontré son épouse lors d’un concert à Paris, ce qui frappe quand on le voit avec les siens, c’est ce sens de la famille, cette attention portée à chaque instant à tous les membres de la fratrie qui ne l’empêche pas de continuer à vivre sa vie d’intellectuel, de discuter en évoquant des problématiques théoriques tout en demandant à l’une de ses filles de donner le biberon au plus jeune. Il y a chez lui une osmose totale entre le pragmatisme des tâches liées à son devoir de père et la continuation de sa pensée philosophique. Ce qui, somme toute est très normal pour lui puisque ce catholique convaincu met en pratique quotidiennement sa foi religieuse en faisant de la famille un repère et un axe de pensée.
Le Matin d’Algérie : Quels sont vos projets actuels et futurs dans le domaine artistique ?
Philippe Chevallier : Je termine en ce moment une tournée dans toute la France avec Bernard Mabille pour une pièce de théâtre intitulée Le cake aux olives, et j’ai un projet en cours avec trois autres comédiens, L’Apollon de Bellac de Jean Giraudoux que nous allons présenter au festival d’été Les Bourbons qui a lieu chaque année dans l’Allier.
Et bien sûr Mozart au Paradis pendant tout le Festival off d’Avignon du 5 au 26 juillet. Il se pourrait aussi que cet automne nous puissions donner notre spectacle à Paris, mais pour l’instant, chut, on ne dit rien. Je devrais aussi également partir en tournée avec « Les Grands Ducs » à la rentrée. Cette pièce se joue actuellement au théâtre de Passy à Paris. C’est l’adaptation du film de Patrice Leconte au théâtre.
Le Matin d’Algérie : Un dernier mot peut-être ?
Philippe Chevallier : Puissent la musique, le théâtre et l’Art en général contribuer à faire régner sur notre planète un climat de sérénité et d’apaisement entre les peuples et les nations. Cela peut paraître naïf de formuler un tel souhait, que les hommes politiques, s’ils ne sont pas des artistes, soient inspirés en écoutant et en respectant la parole de ceux qui par leur imagination et leur créativité essaient d’établir un monde plus fraternel et ils verront que nous avons tous à y gagner !
Entretien réalisé par Brahim Saci