Mardi 6 mars 2018
Comment vit Bouteflika
Il a déserté le palais d’El-Mouradia pour vivre dans cette résidence de Zéralda avec une partie de sa famille qui forme sa garde rapprochée. Il y a Zhor Bouteflika : la sœur protectrice qui assure les fonctions d’intendante, de cuisinière personnelle et d’aide-soignante à la résidence de Zeralda. Ancienne sage-femme, elle veille sur le frère-président depuis son arrivée au pouvoir en 1999. Il y a aussi le très influent frère cadet Saïd aux missions multiples : veiller au confort et à la sécurité de son aîné, tenir son agenda, filtrer ses audiences, transmettre ses messages et instructions. Saïd joue également les intermédiaires entre le chef de l’État et les différentes institutions du pays. On trouve également l’autre Bouteflika dont on ne parle jamais, Nasser Bouteflika, le frère confident, conseiller de l’ombre, dit-on, très discret secrétaire général du ministère de la Formation professionnelle, moins influent que Saïd, mais néanmoins maillon fort du cercle présidentiel. Mais dans le premier cercle de proximité du président, il n’y a pas que les Bouteflika. Il y a aussi Mokhtar Reguieg, inusable directeur du protocole, qui gère l’agenda présidentiel et quitte rarement la résidence de Zeralda, sans oublier Nacer Habchi, chef de la Direction générale de la sécurité et de la protection présidentielle (DGSPP) depuis juillet 2015, son équipe assure la sécurité renforcée du chef de l’État, aussi bien à sa résidence que lors de ses déplacements.Le complexe présidentiel de Zeralda, c’est plusieurs villas ultra-sécurisées, un domaine de chasse ou même un lac artificiel. Pour y accéder, il faut franchir plusieurs barrages militaires et emprunter une route qui serpente au milieu de champs parsemés de serres. Devant le portail, des gardes vêtus d’une chasuble arborant le sigle DGSPP (Direction générale de la sécurité et de la protection présidentielle) veillent au grain. Impossible pour les invités et les véhicules de pénétrer dans l’enceinte entourée de hauts murs de couleur ocre sans être fouillés et passés au scanner. La présidence dispose d’une autre grande résidence d’État avec d’immenses terrains, un lac artificiel, un domaine de chasse et des villas de haut standing. Les présidents Chadli et Zéroual s’y rendaient fréquemment pour y recevoir leurs hôtes, y organiser des battues ou s’y reposer. Bouteflika n’y met jamais les pieds depuis son accident vasculaire cérébral de 2013.
Bouteflika a installé son bureau dans la troisième villa, au fond de la résidence.Il y règne un silence monastique. Un préau aux murs desquels sont suspendus des tableaux donne sur une porte qui s’ouvre sur un long couloir conduisant à la salle où Bouteflika accorde ses audiences, interdites aux journalistes.
À l’origine, les trois villas de Zeralda, qui disposent notamment d’un terrain de tennis, devaient servir d’hôtel de luxe pour accueillir les invités du groupe Sonatrach. Après les scandales de corruption présumée qui ont ébranlé la compagnie dès 2010, les bâtiments ont été récupérés par l’ex-DRS, avant d’être affectés à la présidence de la République durant l’été 2013. D’importants travaux y ont été effectués pour le confort de ses occupants, ainsi que pour l’accueil des visiteurs. Seuls les cameramen de la télévision nationale et les photographes de l’agence officielle APS sont autorisés à pénétrer dans son bureau une poignée de minutes. Le cérémonial est rituel. Les invités sont conduits vers la salle d’audience. La porte se referme. Dans un silence monastique, les journalistes et les membres de la délégation attendent à l’étage au-dessus, sous l’œil placide de la garde présidentielle et autres membres du protocole.
L.M.
Source : Jeune Afrique