L’armée israélienne encercle mercredi la grande ville de Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, où font rage les combats parmi les plus intenses en deux mois de guerre contre le Hamas. La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits humains dans les Territoires palestiniens occupés Francesca Albanese accuse l’Occident et Israël de crimes de guerre.
A pied, à moto, entassés dans des charrettes ou leurs bagages empilés sur les toits de leurs voitures, des milliers de civils continuent de fuir vers le sud, acculés dans un périmètre de plus en plus exigu près de la frontière fermée avec l’Egypte et confrontés à une situation humanitaire catastrophique.
Engagée depuis le 27 octobre dans une offensive terrestre contre le Hamas dans le nord de la bande de Gaza, l’armée israélienne a étendu ses opérations au sol à l’ensemble du territoire, près de deux mois après le début de la guerre déclenchée par l’attaque sanglante du Hamas contre Israël le 7 octobre.
« Nos forces encerclent Khan Younès dans le sud de la bande de Gaza », a déclaré le chef d’état-major de l’armée israélienne, Herzi Halevi, dans un communiqué. « Nous avons sécurisé de nombreux bastions du Hamas dans le nord de la bande de Gaza, et nous menons maintenant des opérations contre ses bastions dans le sud », a-t-il poursuivi.
« Nos forces trouvent des armes dans presque tous les bâtiments et maisons, des terroristes dans de nombreuses maisons et les affrontent », a-t-il ajouté.
Des sources du Hamas et du Jihad islamique ont indiqué à l’AFP que leurs combattants mènent de violents affrontements avec les troupes israéliennes dans le but de les empêcher d’entrer dans Khan Younès et les secteurs situés à l’est de la ville, ainsi que dans les camps de réfugiés à proximité.
Selon le bureau de presse du gouvernement du Hamas, des tirs d’artillerie ont fait « des dizaines de morts et de blessés » dans la nuit de mardi à mercredi dans plusieurs villages à l’est de Khan Younès, et l’armée israélienne a également attaqué plusieurs autres secteurs de la bande de Gaza.
Selon le ministère de la Santé du Hamas, des frappes aériennes israéliennes contre le camp de Nousseirat, dans le centre du territoire, ont fait ainsi six morts et 14 blessés. D’après la même source, d’autres frappes sur le camp de Jabalia ont fait plusieurs morts et blessés, et le directeur d’une clinique de Khan Younès, Ramez al-Najjar, a été tué dans un raid israélien contre son domicile.
Heures sombre de l’humanité
Ces dernières 48 heures, différents organes des Nations unies ont multiplié les appels à agir pour un cessez-le-feu. La situation à Gaza est « proche de l’heure la plus sombre de l’humanité », selon l’Organisation mondiale de la santé. La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits humains dans les Territoires palestiniens occupés Francesca Albanese était pour sa part en France. Elle dénonce la complicité des pays occidentaux vis-à-vis d’Israël.
« Je suis vraiment choquée. Ce n’est pas seulement le manque d’action pour arrêter les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité qui sont en train d’être commis dans le territoire palestinien occupé. C’est vraiment le soutien presque total et inconditionné que les États occidentaux ont donné à Israël, en lui reconnaissant non seulement le droit de se protéger – qui est bien sûr un droit qu’Israël a envers son territoire et ses citoyens – mais on a reconnu à Israël le droit de mener une guerre très violente contre le peuple qu’il garde sous occupation. Et ça, c’est illégal ! », déclare Francesca Albanese à RFI.
Elle poursuit : «Tout le monde dit : « C’est l’enfer sur terre ». Il faut arrêter ce massacre de civils. Il est clair, pour nous qui suivons les questions israélo-palestiniennes depuis des années, que le but ici n’était pas seulement d’éliminer le Hamas en tant que mouvement politique ; le but, c’est d’éliminer les Palestiniens de la bande de Gaza et ça a été évoqué par des politiciens israéliens avant même le 7 octobre.
Nous sommes aujourd’hui plusieurs dans la communauté des droits humains à dire que les pays occidentaux sont complices. Ils s’aplatissent totalement sur ce qu’Israël et les États-Unis ont décidé. Ces derniers ont leurs propres objectifs, mais les Européens ? Pourquoi les Européens doivent-ils les suivre quitte à s’éloigner du reste du monde ? Car ce conflit ne se limite pas à une région. Ce conflit met face à face le Sud global, qui se reconnaît dans la façon dont les Palestiniens sont traités par l’Occident, avec le Nord global. Pourquoi ne pas choisir de jouer un rôle différent ? »
Avec AFP/RFI