Qui ne se souvient pas du tube des années 1960-70 A vava ewetnaɣ, interprété par Cherif Nadir et Chabha ? C’était au temps des années sombres d’un « boumedienisme » féroce qui ne faisait pas de cadeau à tout ce qui rime avec Kabyle et Kabylie…
Et pourtant, on ne sait trop comment, ni pourquoi, cette chanson était diffusée régulièrement sur les ondes de la chaîne 2. La seule explication à cela, est que même ceux que l’on surnommait les KDS du pouvoir étaient partie prenante de ce message clair et ne le traduisaient pas à leurs compagnons du partie unique arabophone.
Ô mon père ils ne font que nous malmener
Ils font de nous ce que nous n’avons jamais été
Ô ma fille Ils nous ont reconnu et débusqués
Celui qui ne sait pas patienter, que peut-il arracher ?
Imagine-t-on aujourd’hui de telles paroles, on ne peut plus claires, échapper à la censure ?
Dans la lignée de ce titre revendicatif, le tube de M’henni Amroun Teččeṛdiyi Jeddi-k, magistralement repris par Karim Branis & Abdelhak Sahel, vaut le détour :
Tu fais éloge de ton grand-père
Et moi je ne fais que t’écouter
Jusqu’à me faire oublier le mien !
Nous sommes désorientés
Chaque fois que quelqu’un vient
Il ne fait éloge que des siens…
De tels énoncés, clairs, nets et précis, on en trouve par dizaines. De Slimane Azem à Ali Ideflawen, de Ferhat Mehenni à Oulahlou, en passant par Boudjmaaâ Agraw, les Kabyles n’ont jamais cessé de dénoncer ce pouvoir illégitime qui veut faire germer des boutures contre nature de nos terres. Mais la censure qui s’abat sur les cultures du terroir limite bien souvent leur portée…
Ce ne sont certainement pas les équipes actuelles au pouvoir qui laisseront du lest à la chape de plomb sous laquelle on a toujours voulu dissimuler jusqu’à nos gènes pour les remplacer par des boutures venues d’ailleurs ! Jusqu’à quand ?
Kacem Madani