24 novembre 2024
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De Dreyfus à Benzema : la France égale à elle-même

Tribune

De Dreyfus à Benzema : la France égale à elle-même

La politique, la religion et le sport sont des sujets qui passionnent et qui fascinent, impossible d’être à la marge. À chaque occasion, on se sent interpellé et on s’invite au débat pour donner une opinion, un avis comme sur le cas de Benzema.  

De Guy-Roux qui disait : «Le peuple s’est laissé abuser par les médias», il continue : «On a commis une erreur stratégique, alors je ne dirai pas c’est une erreur dans l’absolu pourquoi ne pas prendre Benzema ….pour gagner une épreuve il faut avoir un phénomène». Victime d’une machination à grande échelle pour une affaire presque banale, Benzema est la proie idéale pour en faire un tollé médiatique entretenu par des médisances et des propos alambiqués. Pour un jeune footballeur issu de l’immigration, un enfant des quartiers, il est le candidat espéré pour créer du sensationnel : c’est l’affaire Dreyfus des temps modernes. Et Émile Zola vient au secours de Dreyfus, il accusa le système judiciaire dans une lettre adressée au président Félix Faure.   

Pour ceux qui ne connaissent pas celle-ci, en 1894, un gradé de l’armée française, capitaine Alfred Dreyfus, fut accusé d’espionnage au profit de l’Allemagne sur de fausses preuves. En fait, à cause de ses origines juives, victime d’un complot judiciaire, il a subi un traitement et un procès non équitables. Et le plus dur dans cette histoire, c’est l’attitude des hommes politiques influents, qui versèrent, par antisémitisme, dans la haine avec leur relais médiatiques.

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Les contextes sont bien différents, mais on peut se permettre de voir une similitude entre les deux affaires, même distantes l’une de l’autre de plus d’un siècle : c’est l’attitude française à travers ses orateurs dominants envers leurs dissemblables qui n’as pas changé. D’Éric Zemmour à la famille Le Pen, tout le monde s’invite au débat, ils font de la stigmatisation pour des maigres dividendes politiques ou pour se faire une place populiste dans le but d’amuser la galerie.

Manuel Valls un prétendant à la dernière présidence française est descendu aussi bas pour saboter un jeune joueur et s’exprimer sur un fait qui est du ressort d’un entraîneur et non d’un politicien.

Il y a trop d’anticipations sur le cas Benzema qui est l’un des meilleurs joueurs au monde. La France, à travers ses hommes et ses femmes politiques, sportifs ou autres, comme des hâbleurs, ne lui réservent que du mépris et de la haine alors qu’il est en présomption d’innocence. En chemin inverse, dans l’ordre, les politiciens s’autorisent le métier d’entraîneur pour qu’il ne soit pas sélectionné, l’entraîneur a pris de l’avance sur la décision des juges pour le considérer “persona non grata“ au sein du groupe, et les juges l’ont acquitté. Par contre Sarkozy est cité dans une affaire de « blanchiment d’argent » et de « relations secrètes » avec un dictateur, malgré des preuves accablantes, le système lui a accordé la chance d’aller aux élections pour représenter les Français.

Tous, la majorité, critiquent un joueur titulaire au Real Madrid, la sommité des clubs de foot de la planète, qui les a transcendés en humilité et en popularité. Sans parler des faits qui motivent ces rois de la parlotte, la presse française encore une fois s’est défaussée sur ce joueur, elle a manqué à son devoir d’informer, elle a usé de son pouvoir pour relayer les brimades et les assertions fallacieuses et nuire à l’image d’un jeune talentueux qui fait rêver plus d’un.

On dénigre une idole pour une jeunesse en quête d’espoir qu’on déprécie dans un style des plus désolants.

La réaction de Zidane, – désormais un des plus grands entraîneurs du monde du foot -,est  éloquente. Elle est mesurée et plein de sens. Sa réponse à la critique de Gary Lineker l’ancien international anglais, consultant de BBC : « Benzema est le meilleur », d’autant plus à le considérer comme son petit frère, est un message aux détracteurs. Être protégé par son entraîneur est un grand privilège. En 2006, Zidane a été victime lui aussi d’un lynchage médiatique pour accélérer son départ à la retraite et faire oublier son succès à la coupe de monde 98 sous le slogan «Black-Blanc-Beur», une époque qui a postulé la France dans un rang plus élevé que celle d’aujourd’hui. Claude Droussent, directeur de la rédaction de L’Équipe, s’en souviendra pour longtemps de son erreur, juste après 24 heures, il s’est contraint de s’excuser dans la pire humiliation.

Didier Deschamps, en homme lige de Noël Le Graët, a cédé à la pression et aux diatribes lassantes, il a suivi la masse dominante sans presque avoir sa propre opinion. L’épisode Benzema hante son esprit. À chaque fois que le Madrilène est couronné d’un succès, le sélectionneur Français subit un fardeau de plus qui complique une position ferme et intraitable. Le ridicule prend de plus en plus de place dans les espaces réservés aux milieux politiques et sportifs français, surtout que cette dernière coupe d’Europe fut une apothéose pour Benzema. Heureux à côté de son compatriote Zidane, il savoure son troisième trophée.

Au lieu de s’échiner devant les partisans de la culpabilité, Didier Deschamps aurait pu sauver sa phase en faisant un choix qui est du domaine sportif et non politique ou journalistique. Avoir de la pugnacité comme Émile Zola et son courage d’avoir soutenu Dreyfus avec abnégation, l’entraîneur pourrait accuser les conciliabules qui lui ont soufflé à l’oreille sur la stratégie de l’équipe de France.

Voila un mauvais départ pour le mondial. Selon les réseaux sociaux, les français ont réagi face à cette dérive, ils savent que cet abus est l’œuvre d’un système opaque. L’événement de la Russie est une occasion qu’il ne faut pas rater pour une banale histoire réduite à deux hommes. La compétition est très exigeante au point de vue de la préparation de groupe, le doute et le manque de cohésion sont des démons à conjurer, ils doivent être éliminés. Le démon du moment c’est Benzema, le fils d’immigré. Le président de la Fédération française de Football Noël Le Graët, déstabilisé par le démon, a raté son occasion de se taire en confirmant que Benzema ne sera pas repris. Il vient de mettre son pied dans le plat, l’effet Zidane est pour quelque chose; ce dernier en quittant l’Espagne en direction, fort possible, de l’équipe de France, Le Graët et Des Champs n’y seraient que sursitaires.

Si Dreyfus a été partiellement réhabilité par preuve d’innocence, après un grand périple judiciaire, sans doute Benzema le serait aussi un jour.   

  

 

Auteur
Mahfoudh Messaoudene, ing. Québec

 




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