Une délégation militaire algérienne de haut rang participe à la conférence regionale des chefs des services de renseignement de cinq pays voisins de la Libye qui se tient les 21 et 22 décembre 2024.
C’est ce qu’a rapporté aujourd’hui l’agence de presse libyenne qui a indiqué que « les directeurs du renseignement militaire de l’Algérie, de Tunisie, du Soudan, du Tchad et du Niger sont arrivés vendredi soir à Tripoli pour participer à la conférence des dirigeants du renseignement des pays voisins de la Libye ».
La conférence aborde plusieurs dossiers, notamment la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogue et le phénomène de l’immigration clandestine, selon la même source.
Selon le bureau des médias du gouvernement libyen, la conférence vise à « renforcer la coopération régionale et coordonner les efforts de sécurité pour faire face aux défis communs et parvenir à la sécurité et à la stabilité dans la région ».
La présence de la délégation militaire algérienne à cette importante conférence régionale qui n’a pas été annoncée par le ministère de la Défense nationale intervient dans un contexte géopolitique dominée par les bouleversements intervenus au Moyen-Orient avec comme risque une reconfiguration considérable de l’échiquier militaire méditerranéen.
En effet, le renversement brutal du dictateur Bachar el-Assad et l’effondrement de son régime ayant compromis ses chances de garder ses troupes et ses bases dans cette région, la Russie cherche à transférer ses équipements et ses forces de Syrie vers la Libye.
Cette potentielle redistribution des cartes par Moscou qui cherche à repenser sa stratégie régionale en Méditerranée et au Sahel inquiète particulièrement la Libye, où le gouvernement d’unité nationale redoute une concentration accrue des forces russes sur son territoire.
Une question qui pourrait bien se trouver à l’ordre du jour de la conférence régionale des responsables militaires des 5 pays voisins de la Libye.
La même préoccupation (le redéploiement de ses troupes au Maghreb) pourrait avoir aussi constitue le principal objet de la présence en Algérie d’une délégation russe de haut rang envoyée en Algerie par Vladimir Poutine pour rencontrer les autorités algériennes.
Le vice-ministre des Affaires étrangères et représentant spécial du président russe pour le Moyen-Orient et l’Afrique, Mikhaïl Bogdanov, et le vice-ministre russe de la Défense, Ionos Bek Ivekurov ont été reçus mercredi dernier par le chef de l’Etat Abdelmadjid Tebboune en présence du général de corps d’armée Saïd Chanegriha, chef d’état-major et vice ministre de la défense.
Les envoyés spéciaux de Vladimir Poutine ont probablement cherché à avoir l’assentiment de l’Algérie quant au transfert d’équipements et des forces russes vers la Libye à partir de la Syrie, après les bouleversements intervenus dans ce dernier pays.
L’Algérie qui a fait du refus de toute présence militaire étrangères à ses frontières un principe de souveraineté a-t -elle cède aux sollicitations des envoyés du maître du Kremlin dont la haute fonction politique confirme que Moscou veut rassurer l’Algérie du niveau et de la nature de sa présence en Libye ? « Le transfert des forces et des équipements russes depuis la Syrie et leur repositionnement dans les bases russes en Libye feront certainement partie des questions que Moscou cherche à clarifier auprès de la partie algérienne, d’autant plus que l’Algérie adopte une position qui rejette toute présence étrangère et mercenaires en Libye» explique l’analyste des affaires de sécurité Hussein Ag Issa interrogé par le quotidien Al-Araby Al-Jadid paraissant à Londres.
« Je crois que la Russie, en raison d’incidents antérieurs, a pris conscience du caractère sensible de la présence des forces de Wagner ou de toute force étrangère dans les zones proches de la frontière algérienne, et comprend la position et l’inquiétude de l’Algérie. Ce qui l’oblige à tenir la partie algérienne informée de tout développement lié au stationnement des forces affiliées à la Russie », dira l’analyste qui s’est confié au média londonien.
Mais tout porte à croire que dans cette affaire du transfert de leurs troupes vers la Libye, les Russes chercheraient à faire avaliser « le coup parti ». Voire même imposer le fait accompli à leurs interlocuteurs algériens.
Car, à se fier à l’agence de presse Reuters, des images satellite ont montré vendredi la Russie transportant du matériel militaire depuis la base, ainsi que l’apparition de deux avions cargo Antonov, qui effectuaient des vols alternés entre la Russie et l’est de la Libye, plus précisément la base aérienne d’Al-Khadim située à l’est de Benghazi.
Sofiane Ayache