Jeudi 16 janvier 2020
En Syrie, des dizaines de morts après la reprise de l’assaut du régime à Idleb
Près de 20 civils et des dizaines de combattants ont péri ces dernières 24 heures dans la province d’Idleb en Syrie, où le régime a repris ses bombardements en vue de s’emparer d’une ville stratégique, a indiqué jeudi une ONG.
Mercredi, 19 civils dont trois enfants on été tués dans des frappes du régime sur la ville d’Idleb (nord-ouest) tandis que 29 combattants du régime et 26 jihadistes et rebelles sont morts dans des combats jeudi, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
A Damas, l’agence officielle syrienne Sana a fait état de six civils tués et 15 blessés dans la chute de roquettes sur un quartier de la ville d’Alep (nord) sous contrôle du régime de Bachar al-Assad.
L’escalade dans la province d’Idleb met en péril une trêve annoncée par la Russie, une alliée de M. Assad, et censée avoir débuté dimanche après sa confirmation par la Turquie qui soutient des groupes rebelles dans la province.
« Les combats ont éclaté au sud de la ville de Maaret al-Noomane, en même temps que de violents bombardements malgré la trêve », a indiqué à l’AFP le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane, qui s’appuie sur un vaste réseau de sources dans le pays en guerre depuis 2011.
Le régime et ses alliés ont repris deux villages dans leur avancée vers Maaret al-Noomane et se trouvent désormais à sept km de cette ville clé, selon l’ONG qui a fait état de raids aériens du régime et de l’allié russe. Un des deux villages a ensuite été repris par les jihadistes et les rebelles, d’après l’OSDH.
La province d’Idleb et des secteurs des provinces voisines d’Alep et de Lattaquié échappent encore au contrôle du régime et sont dominés par les jihadistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-branche syrienne d’Al-Qaïda). Des groupes rebelles y sont également présents.
Selon le Comité international de Secours, « quelque 650.000 personnes supplémentaires, dont une majorité de femmes et d’enfants, pourraient être forcées de fuir leur foyer si les violences persistent ».
« Nulle part où aller »
Selon l’agence Sana, les opérations du régime contre « les terroristes sont une réponse aux tirs et au ciblage récurrent de civils » par les groupes jihadistes et rebelles.
Le quotidien prorégime Al-Watan a imputé « l’effondrement du cessez-le-feu » aux « organisations terroristes » qui ont « violé » la trêve en attaquant des sites militaires syriens.
Dans la ville d’Idleb, chef-lieu éponyme de la province, des journalistes de l’AFP ont constaté de vastes destructions. Au milieu des décombres, des Syriens s’activent pour retrouver d’éventuelles victimes.
Les bombardements ont pulvérisé immeubles, ateliers et garages. Des conducteurs, piégés dans leur véhicule, font partie des victimes.
Moustapha a survécu mais son atelier a été détruit et quatre de ses employés sont morts. « Ce n’est pas le quartier que j’ai laissé en m’absentant » pour aller chercher des pièces de rechange, dit-il, en larmes, à la vue du quartier dévasté.
Le nouveau cessez-le-feu s’ajoute aux nombreuses trêves mort-nées en Syrie.
Selon l’Union européenne, les opérations « du régime et de son allié russe ne font pas de distinction entre les cibles militaires et civiles ».
Moscou a nié mener des « missions de combat depuis le début du cessez-le-feu » à Idleb.
« Il n’y a pas de trêve. Les gens ont peur », a dit Sari Bitar, un ingénieur de 32 ans vivant à Idleb. « Je ne peux pas rester dans une zone où vont avancer régime, forces russes et milices iraniennes (alliées de Damas). Le seul souci, c’est que nous n’avons nulle part où aller. »
Soldats turcs tués
Le régime a mené une offensive d’envergure à Idleb entre avril et août 2019: un millier de civils ont été tués, selon l’OSDH, plus de 400.000 personnes déplacées d’après l’ONU.
Le pouvoir, qu contrôle désormais plus de 70 % du territoire, s’est dit déterminé à reconquérir cette région abritant environ trois millions de personnes.
Sur un autre front de la guerre, dix personnes dont trois soldats turcs ont été tuées jeudi dans un attentat à la voiture piégée dans une zone du nord syrien contrôlée par les forces d’Ankara. Selon l’OSDH, l’attentat s’est produit dans la ville de Suluk, non loin de la frontière syro-turque.
Déclenché par la répression de manifestations pacifiques prodémocratie, le conflit en Syrie s’est complexifié avec l’intervention de plusieurs acteurs étrangers. Il a fait plus de 380.000 morts.