Vendredi 24 septembre 2021
Et nous voilà dans la gueule du loup !
Que se passe-t-il en Algérie ? Les jeunes de mon pays ont-ils perdu définitivement l’espoir dans la révolution du Sourire ? Nacer Soltane, un hirakiste du quartier de Bab El Oued, a pris ses valises, il y a quelques jours et rejoint, la mort dans l’âme, l’autre rive de la Méditerranée. Mais par quel moyen, devinez-vous ?
Par une embarcation de fortune, et voilà le malheur! Un hirakiste qui bat le pavé chaque vendredi dans les rues d’Alger, fuit illégalement son pays, en compagnie de sa famille. Il semble que le désespoir a atteint le cœur des miens après l’escale des grandes espérances qui a jalonné les moments forts du Hirak.
Affichant un large sourire devant le smartphone, ses enfants, un bébé en bas âge et leur mère qui accompagnent Nacer sur son embarcation de fortune, ne savent plus désormais de quoi leur avenir sera fait. Seul leur espoir en des lendemains meilleurs sous d’autres cieux leur donne quelques étincelles de lumière et surtout d’évasion d’un quotidien morbide, au creux des roulis de vagues de la Méditerranée. Nacer n’est pas seul dans cet état de désenchantement, hélas!
En 72 heures, soit entre le 18 et le 20 septembre, environ 1000 harraga algériens ont débarqué sur les côtes d’Alméria, Alicante, Murcie et les îles Baléares. Un record jamais atteint jusque-là, après celui enregistré entre juillet et août dernier! C’est ce qu’a révélé Francisco Jose Clemente Martin, responsable du Centre international d’identification des migrants disparus (Cipimd) et membre de l’ONG « Heroes del mar ».
La question qui se pose, d’ores et déjà, étant la suivante : pourquoi y a-t-il ce retour en force du phénomène des harraga après l’accalmie de l’après-22 février 2019 ? Pas de grand mystère !
Nul doute que la grave situation que traverse notre pays, avec la tournure autoritaire du régime, la cherté de la vie et l’impasse économique, la perte de confiance dans ce slogan fleuri de « Nouvelle Algérie » qui fane, de jour en jour, suite aux arrestations arbitraires de militants du mouvement citoyen, est la principale cause de ce tsunami humain vers le vieux continent.
L’Algérie est-elle devenue irrécupérable? L’errance de notre jeunesse en Méditerranée ces dernières années est, à n’en point douter, un facteur de désagrégation du corps de la nation.
Un facteur dangereux qui, s’il est explicable durant le règne bouteflikien n’en reste pas moins « mystérieux » si l’on regarde ce que promettent nos élites à la télévision officielle. Le rêve d’une vie meilleure semble s’émietter au fil des jours devant le mur d’incompréhension qui sépare ceux d’en haut de ceux d’en bas.
Dorénavant, il convient de regarder avec sérieux cette saignée nationale : ces jeunes à la limite du suicide social qui affrontent à mains nues un quotidien des plus difficiles.
Les choses s’aggraveront davantage, si nos élites ne prennent pas les décisions adéquates pour sortir de ce tunnel.
La transition démocratique à laquelle aspirent les Algériens ne devrait pas être un vœu pieux. Il faut des réformes d’urgence et un renouvellement générationnel qui rime avec les aspirations populaires.