Le Festival de Cannes a entamé sa 78e édition ce mardi 13 mai, dans une atmosphère mêlant émotion, hommage et engagements forts. Si les projecteurs ont salué des figures du cinéma international comme Robert De Niro et Juliette Binoche, c’est aussi la présence dense, vibrante et réfléchie du monde arabe — en particulier du Maghreb — qui imprime un souffle singulier à cette édition.
Le Maghreb s’invite avec gravité et grâce
Cette année, les cinéastes maghrébines imposent leur regard sur le monde avec une rare intensité. Qu’elles explorent la mémoire familiale, les tensions religieuses ou les silences ruraux, leurs œuvres portent une parole libre, souvent ancrée dans le réel, mais toujours traversée par une recherche esthétique exigeante.
La réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania, déjà saluée en 2023 pour Les Filles d’Olfa, revient en compétition officielle avec Tu ne feras point d’images. Ce nouveau film, fiction intime et symbolique, retrace la quête intérieure d’Amira, une jeune femme qui, en héritant d’une clé mystérieuse, se lance dans un voyage à travers les non-dits familiaux. À travers ce récit, Ben Hania interroge la transmission, le poids des traditions et la liberté de créer. Soutenu par plusieurs coproducteurs européens, le film bénéficie également de l’appui d’ARTE France Cinéma, confirmant l’intérêt grandissant pour un cinéma arabe affranchi des clichés.
Une autre Tunisie filmée par Erige Sehiri
Dans un registre tout en délicatesse, Erige Sehiri dévoile Promis le ciel, présenté dans la section Un Certain Regard. Après Sous les figues, la cinéaste poursuit son exploration de l’intime au sein des communautés rurales, en captant les nuances d’un quotidien à la fois tendre et tendu. À travers des récits tissés de silences et de gestes retenus, Sehiri pose un regard social subtil, où la condition des femmes reste au cœur de son cinéma.
Hafsia Herzi, entre création et transmission
De son côté, Hafsia Herzi poursuit son parcours singulier entre les deux rives de la Méditerranée. Présente cette année à Cannes dans un film français projeté en séance spéciale, elle signe également un court-métrage à la Quinzaine des cinéastes. Actrice révélée, réalisatrice affirmée, Herzi incarne cette nouvelle génération maghrébine qui s’émancipe des cases et des regards condescendants, pour mieux revendiquer la complexité de ses identités.
Gaza dans les cœurs et à l’écran
Cannes 2025 ne pouvait ignorer les drames du monde. Dans son discours d’ouverture, Juliette Binoche a évoqué la mémoire de Fatima Hassouna, jeune photographe tuée à Gaza en avril dernier. Son travail devait être présenté à Cannes, scellant ainsi la présence poignante de la Palestine sur les marches du Palais. Cette évocation, loin d’être anecdotique, témoigne d’une édition attentive aux fractures contemporaines et aux récits des peuples meurtris.
Un continent en mouvement
Au-delà du Maghreb, le continent africain et le Moyen-Orient s’illustrent avec une vitalité créative impressionnante. Du Liban au Sénégal, du Maroc à l’Égypte, les cinéastes s’approprient les codes du cinéma pour mieux les détourner, proposer des formes nouvelles et porter des récits puissants, enracinés dans leurs réalités, mais ouverts sur le monde.
Une présidence engagée, un festival en transition
Avec Juliette Binoche à la tête du jury, le Festival assume une posture artistique et politique. Entourée de réalisateurs aux visions audacieuses comme Dieudo Hamadi ou Payal Kapadia, elle incarne une édition où l’engagement poétique croise les luttes symboliques. Le cinéma n’y est pas seulement célébré pour sa beauté, mais pour sa capacité à déranger, éclairer, et surtout, relier les consciences.
Djamal Guettala
Arreter d’utiliser le mot Maghreb ! Il est epjoratif pour les Imazighen et tout Amazigh qui l’utilise contribue a notre oppression (foi de Kabyle)