Vendredi 20 novembre 2020
Financement libyen : les syndicats de magistrats dénoncent les «pressions» de Sarkozy
Les organisations syndicales reprochent à l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, de s’attaquer à l’indépendance des juges d’instruction chargés de l’affaire.
Les relations continuent de se tendre entre la justice et Nicolas Sarkozy. Depuis la rétractation de Ziad Takieddine sur ses accusations de financement libyen de la campagne de Sarkozy, ce dernier fait feu de tous bois.
Les deux principaux syndicats de magistrats ont dénoncé, vendredi 20 novembre, les « attaques » de Nicolas Sarkozy, du président du Sénat et du patron des députés Les Républicains contre les juges d’instruction qui enquêtent sur les soupçons d’un financement libyen de la campagne de l’ex-chef de l’État.
L’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) et le Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche) ont adressé un courrier commun au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) pour dénoncer « une forme de pression inacceptable et intolérable » sur les magistrats instructeurs.
Une «offensive médiatique contre les juges d’instruction »
«Les attaques très fortes portées contre le Parquet national financier depuis l’été 2020 visant à le décrédibiliser (…) constituent aujourd’hui un marchepied pour porter une atteinte similaire à l’indépendance des juges d’instruction spécialisés en matière économique et financière », affirment les syndicats dans leur courrier. « Nicolas Sarkozy, mis en examen et prévenu dans plusieurs procédures judiciaires, a choisi d’organiser sa défense en portant une offensive médiatique contre les juges d’instruction, qu’il accuse d’avoir mené leurs missions en dehors de toute légalité », s’offusquent l’USM et le SM.
«Bien plus grave encore, poursuivent les syndicats, est la reprise de cet argumentaire insultant (…) par deux personnalités politiques qui ne sont pas partie à la procédure et qui réitèrent les attaques contre la justice précédemment proférées : le président du Sénat Gérard Larcher, deuxième personnage de l’État, et le président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, Christian Jacob. » Ces « attaques émanant du pouvoir exécutif et d’élus de la représentation nationale (…) érodent encore un peu plus la confiance des citoyens dans la justice », estiment les syndicats.
«Je ne suis pas un pourri »
Après le retrait surprise d’accusations sur un présumé financement libyen de sa campagne 2007 de la part de Ziad Takieddine, sulfureux intermédiaire et l’un des principaux témoins à charge contre l’ex-président, Nicolas Sarkozy avait fait part de sa « colère » d’avoir été « traîné dans la boue ». «Ce dossier n’est truffé que de faux », a estimé l’ancien président de la République, mis en examen le 12 octobre pour « association de malfaiteurs » dans cette affaire.
« J’ai dit aux juges : « Cherchez pendant un siècle (…), vous ne trouverez rien » », a-t-il assuré sur BFM TV. « Je ne suis pas un pourri, et ce qui m’est infligé est un scandale qui finira dans les annales », a également affirmé Nicolas Sarkozy, qui sera jugé à partir du 23 novembre dans une autre affaire, celle des « écoutes ».
Selon le procureur national financier, les charges contre l’ex-chef de l’État «ne se limitent pas aux déclarations » de Ziad Takieddine et s’appuient « sur des indices graves ou concordants ».