Les révélations de Guermit Bounouira, secrétaire particulier du défunt chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah, secoue la toile et sans doute en haut lieu également.
Décoiffante est l’actualité algérienne. Dans un espace médiatique arbitrairement verrouillé, les révélations faites sur la toile agitent et interrogent.
C’est par le tribunal militaire que les autorités ont répondu au nouveau scandale politico-sécuritaire déclenché par Guermit Bounouira. Le tribunal militaire a condamné à mort, lundi passé, Guermit Bounouira. Ce dernier est accusé de « haute trahison », de « divulgation de documents officiels », de « divulgation de secrets militaires », sans compter celui d’une «intelligence avec des pays étrangers ».
Le procès au tribunal militaire concernait également le général en fuite à Londres, Ghali Beleksir et Larbi Zitout, ancien diplomate et youtubeur patenté, tous deux établis à Londres. Zitout et Belkesir ont été condamnés à une peine de prison à perpétuité, a rapporté El Watan.
Guermit Bounouira, ancien proche de Gaïd Salah, et actuellement en détention à la prison de Blida, a rendu public, une semaine avant son procès, un enregistrement vidéo des plus glaçants sur les mœurs des hauts dirigeants du pays. Il porte de très graves accusations contre Saïd Chengriha, l’homme fort de l’armée. Il l’accuse de trafic de drogue. D’autres officiers sont aussi cités nommément dans des affaires de drogue. Les révélations de Guermit sont une véritable bombe à fragmentations. Il n’échappera à personne que Guermit offre par ses révélations le beau rôle à son ancien chef Ahmed Gaïd Salah. Dans la foulée de ses déclarations, le prisonnier Bounouira nous apprend qu’il a sauvé la tête de Chenegriha.
Faut-il prendre pour argent comptant ces accusations ? En l’absence d’une justice indépendante à même de mener des enquêtes impartiales et indépendantes, l’opinion reste sur sa faim.
Outre les accusations qui jettent l’effroi dans l’opinion public sur la hierarchie militaire, il y a lieu de s’interroger sur les complicités dont a bénéficié Guermit Bounouira pour faire sortir sa vidéo. Pas seulement. Eu égard aux très graves accusations qu’il porte sur l’homme le plus puissant actuellement en Algérie, il y a lieu de croire que Guermit fait feu de tout bois pour un objectif bien précis.
L’ancien bras droit de Gaïd Salah était poursuivi depuis le 11 août 2020 pour haute trahison, à peine une semaine après son extradition par la Turquie vers l’Algérie. La Turquie où il était réfugié l’avait livré aux autorités algériennes après un mandat d’arrêt international lancé contre sa personne. Il faut rappeler que ce sous-officier était à la retraite quand il a quitté le pays par l’aéroport d’Alger.
Hiérarchie et luttes de pouvoir
Combien de généraux sont en prison depuis le printemps du Hirak ? Combien sont actuellement en fuite à l’étranger ? La chute de Bouteflika a révélé de profondes fractures, voire des luttes impitoyables au sein du sérail. L’un des derniers épisodes est celui du général-major Mohamed Kaïdi. Limogé il y a deux mois, plusieurs influenceurs le disent maintenant en détention. Aucune information officielle n’est venue démentir ou confirmer ces révélations qui touchent pourtant l’un des officiers supérieurs les plus importants jusqu’à récemment.
Les purges se poursuivent dans un climat exécrable. Elles renseignent sur les luttes sourdes au sein de l’appareil de l’armée.
Dans ce théâtre d’ombres en casquettes, le peuple suit, désemparé, les remous en haut lieu. Entre crise économique, arrestations, répression … le peuple essuie les plâtres en silence pour l’heure.
L. M.