Depuis quelque temps, on Algérie on assiste à une multiplication d’annonces spectaculaires autour de projets présentés comme des « inventions révolutionnaires».
On voit apparaître des valises solaires exhibées comme si elles venaient d’être créées ou encore des projets industriels lancés en grande pompe, sans véritable base scientifique. Pourtant, la plupart de ces solutions existent déjà depuis longtemps sur le marché mondial.
Cette mise en scène traduit une dérive dangereuse : confondre communication politique et véritable recherche scientifique. Car l’innovation ne se décrète pas. Elle ne jaillit pas d’un simple effet médiatique. Elle est le fruit d’années de travail patient, mené dans des laboratoires solides, entourés d’équipes compétentes, validés par des pairs et inscrits dans un écosystème cohérent.
Prenons l’exemple des chercheurs qui ont reçu le prix Nobel pour la batterie lithium-ion. Leur réussite ne vient pas d’un coup de projecteur isolé, mais d’un effort collectif sur plusieurs décennies, dans des laboratoires dotés de moyens conséquents. Leur travail illustre une vérité universelle : la science avance par accumulation, collaboration et validation rigoureuse.
En Algérie, la tentation est grande de croire au raccourci : une visite officielle, un prototype présenté devant les caméras, et soudain le pays basculerait dans la modernité.
Mais le véritable transfert de technologie ne peut pas fonctionner ainsi. Il doit d’abord passer par les chercheurs eux-mêmes, par des coopérations scientifiques concrètes, des échanges de savoir-faire et la création de laboratoires opérationnels. Ce n’est qu’ensuite que la dimension politique ou industrielle peut intervenir pour soutenir et généraliser l’innovation.
Si nous voulons vraiment rattraper notre retard, nous devons cesser de célébrer des mirages. L’Algérie n’a pas besoin d’illusions technologiques, mais d’investissements massifs dans ses universités, ses centres de recherche et ses talents. Ces compétences existent, aussi bien dans le pays que dans la diaspora. Mais elles ne pourront s’exprimer que si on leur donne un environnement sérieux et durable.
La science n’est pas une vitrine. Elle n’est pas une conférence de presse. Elle est une construction collective, exigeante et patiente. Tant que nous continuerons à privilégier le spectacle plutôt que la rigueur, nous applaudissons des illusions au lieu de bâtir des solutions réelles.
L’avenir de l’Algérie dépend moins des annonces tapageuses que de la confiance donnée à ses chercheurs. À nous de choisir si nous voulons des feux d’artifice éphémères… ou des bases solides pour un progrès durable.
Professeur T. Kerbache