À Bagdad, la campagne électorale bat son plein à l’approche des législatives du 11 novembre 2025. Mais cette fois, un acteur majeur manque à l’appel : le courant sadriste.
Ce retrait, inédit dans la vie politique irakienne récente, bouleverse les équilibres internes du camp chiite et rebat les cartes à l’échelle nationale.
Moqtada al-Sadr, chef religieux et figure populaire, avait bâti un mouvement structuré autour d’un discours nationaliste et anti-corruption. En se retirant du jeu, il prive la scène politique de l’une de ses voix les plus influentes et laisse un vide difficile à combler. Selon plusieurs estimations, cette absence pourrait coûter jusqu’à cinq sièges aux forces chiites dans la capitale, profitant ainsi aux listes sunnites et aux candidats indépendants.
Face à cette nouvelle donne, cinq grandes coalitions s’affrontent à Bagdad. L’alliance de Nouri al-Maliki (Dawlat al-Qanun), celle du Premier ministre Mohammed al-Sudani (Al-Imar wa al-Tanmiyah) et le parti du président du Parlement Mohammed al-Halbousi (Taqaddum) dominent le paysage. Abdel Rahman al-Jazaeri, du bloc de Maliki, estime que la présence de leaders expérimentés est essentielle pour « combler le vide laissé par les Sadrists et préserver la cohésion du bloc chiite ».
Mohammed al-Sudani, en campagne active, tente quant à lui de transformer cette absence en opportunité. Il appelle à un scrutin « équitable et transparent » et multiplie les déplacements pour convaincre un électorat fatigué par les crises politiques, la corruption et le chômage.
Mais pour d’autres observateurs, comme Ali al-Freiji, du bloc de Mohsen al-Mandlawy, le retrait sadrist pourrait ouvrir la voie à une nouvelle génération de candidats indépendants, porteurs de projets concrets et plus proches des attentes de la jeunesse. Une recomposition politique semble s’esquisser, portée par la lassitude des électeurs envers les partis traditionnels.
Reste que l’incertitude domine toujours. Ali Fadhlallah, analyste politique, rappelle que le vote à Bagdad demeure imprévisible, fortement influencé par les dynamiques locales et tribales. Selon Munaf al-Mousawi, du Centre de recherches stratégiques de Bagdad, les pertes chiites dans la capitale pourraient être compensées ailleurs, limitant ainsi l’impact global du boycott sadrist.
À l’échelle du pays, ce scrutin s’annonce donc comme un test crucial pour la stabilité politique et la crédibilité du système électoral irakien. Et si Moqtada al-Sadr a choisi le silence, son ombre continue de planer sur une Bagdad en quête de nouveaux repères.
Djamal Guettala

